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TORONTO – Brad Marchand s’est levé, mercredi matin, dans la froideur presque automnale de Toronto, avec le sentiment que ce serait une belle journée pour jouer au hockey. Et ce qui est une belle journée pour Brad Marchand est loin d’en être une pour ses adversaires. 

« J’étais excité, a expliqué le capitaine des Bruins de Boston. L’occasion de jouer dans les séries éliminatoires de la Coupe Stanley n’est pas acquise. On rêve à ça depuis qu’on est jeunes et je me suis réveillé en me disant qu’on vivait le rêve. On est chanceux d’être ici et on doit profiter de chaque occasion. »

C’est exactement ce qu’il a fait quelques heures plus tard face aux Maple Leafs de Toronto.

Marchand était partout sur la patinoire – le long des rampes, dans les escarmouches, après les coups de sifflet. Il était aussi partout sur la feuille de match : il a inscrit le but gagnant et le but d’assurance, en plus de récolter une aide, dans cette victoire de 4-2 des siens qui leur a procuré une avance de 2-1 dans la série. 

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Il a tout simplement été fidèle à sa réputation de peste et de joueur élite. Devant une foule – et des adversaires – qui aime le détester, il a fait ce qu’il fait de mieux depuis tant d’années.

« Il ne recule jamais devant rien, a vanté l’attaquant Charlie Coyle. Avec son leadership et sa façon de parler, il nous tient engagés tout au long du match, peu importe la situation qui se présente. Il ne se laisse jamais affecter par ce qui se passe dans un match. Il a été exceptionnel, ce soir. »

On en a eu la preuve en troisième période. 

Les Maple Leafs venaient à peine de faire revivre leurs partisans en faisant 2-2, par l’entremise de Tyler Bertuzzi, quand Marchand a décidé qu’il n’en avait rien à cirer du fameux 'momentum'. 

Alors que la foule montrait signe de vie pour la première fois depuis qu’elle s’était éteinte après le but de Jake DeBrusk en tout début de période, Jim Montgomery a répliqué en envoyant son capitaine sur la patinoire. La mission était importante; ne pas laisser les Leafs se nourrir de cette énergie.

Seulement 28 secondes plus tard, après une belle séquence en échec avant, Marchand redonnait les devants aux siens grâce à un tir des ligues majeures. Là où maman cache les biscuits. Pendant que la peste célébrait plus que jamais, on a senti l’air être aspiré de l’amphithéâtre torontois.

« Il s’est toujours levé dans les grands moments, a justifié le pilote des Bruins. Tu regardes son total de points en séries éliminatoires (134 en 149 matchs), et wow. Il y a un désir brûlant de gagner en lui et il se fout complètement de ce qui vient de se passer. Bon ou mauvais. Il regarde vers l’avant. »

BOS@TOR: Marchand fait taire la foule en 3e période

Ce but lui permettait de surpasser Cam Neely au premier rang de l’histoire des Bruins pour les buts gagnants en séries (12). Il ne s’est pas arrêté là. Il a enfoncé le dernier clou dans le cercueil des Maple Leafs en bataillant ferme pour enfiler l’aiguille dans un filet désert avec 36 secondes à écouler.

« C’est le genre d’accomplissement dont je serai fier dans quelques années, a-t-il laissé tomber. Pour l’instant, j’espère que j’en ai plein d’autres en banque. C’est bien d’avoir ce genre de compagnie dans les livres. (Cam) est l’un des marqueurs les plus doués de l’histoire de cette équipe. »

Du travail bien fait

Il n’y a pas que dans les livres que le nom de Marchand sera imprimé. Il est aussi placardé mur à mur dans la tête de ses adversaires – les apprentis Bertuzzi et Max Domi au sommet de la liste.

Tel un vieux routier, Marchand est en train de leur donner une véritable leçon. Il a amorcé son travail dès le premier match en y allant de petits coups derrière le jeu, en se postant dans les endroits payants et en se faisant aller le mâche-patate. Trois matchs plus tard, il a ses deux jeunes adversaires dans sa poche arrière.

« Il faut être capables de jouer à notre façon malgré ça, a lancé l’entraîneur des Maple Leafs, Sheldon Keefe. Il n’y a pas un joueur dans cette série qui s’en tire mieux que lui au chapitre des pénalités. Il réussit à le faire. C’est un art, et il est au sommet de son art. »

Marchand n’a toujours pas visité le banc des punitions, et il fait constamment grimper la frustration dans le camp adverse. C’est flagrant. Ils sont plusieurs à le chercher et à tenter de le faire sauter les plombs. Ça n’arrive toutefois plus très souvent avec cette version plus mature de Marchand.

« Il joue dur en tout temps, a dit Charlie Coyle. Il est toujours engagé dans le jeu. Il ne prend pas congé, surtout à ce temps-ci de l’année. Avec son nouveau rôle de capitaine, il a été à la hauteur. C’est un joueur très émotif, mais il contrôle ses émotions à la perfection.

« Il représente un danger mortel quand il réussit à faire ça. »

EN PROLONGATION

Le chiffre du match : 133

C’est le nombre total de mises en échec distribuées dans ce match, les Leafs ayant eu l’avantage 68-65. Il s’agit du match le plus physique de la série après des totaux de 100 et de 97 dans les deux premières rencontres. À noter que les officiels mineurs avaient peut-être le doigt un peu lourd sur le piton à Toronto.

Swayman se donne des arguments

De retour devant le filet des Bruins après sa victoire dans le premier match, Jeremy Swayman a de nouveau été étincelant devant son filet. Il a repoussé 28 lancers et a été battu sur un jeu parfait – le but de Matthew Knies – et sur un tir dévié dans le filet par son propre défenseur Hampus Lindholm.

Le gardien a maintenant gagné ses cinq départs face aux Leafs, cette saison. C’était seulement la deuxième fois qu’il accordait plus d’un but contre eux. On sait que Montgomery aime bien la rotation entre ses deux gardiens, mais ça devient de plus en plus difficile de ne pas y aller avec Swayman.

« Il a été brillant, a commenté le pilote. J’aime son niveau de compétition, sa rapidité. On menait 2-1 quand il a frustré Bertuzzi à plusieurs reprises devant le filet. Il s’est montré solide et s’est bien battu pour trouver les rondelles. Il a inspiré notre banc. »

Jeu de puissance anémique

Les Maple Leafs n’ont qu’eux à blâmer pour cette défaite. Ils ont obtenu cinq avantages numériques au cours de ce match et n’ont pas été en mesure d’obtenir un but. Ils n’ont inscrit qu’un seul but en 11 déploiements depuis le début de la série.

« On a marqué deux fois à forces égales… L’avantage numérique doit aller en chercher au moins un, a reconnu Keefe. Nous devons trouver un moyen. J’ai trouvé que nous avons généré de bonnes chances autour du filet, mais nous n’en avons pas profité. »

À l’opposé, les Bruins ont marqué deux fois en trois occasions avec l’avantage d’un homme. Le deuxième a été marqué dans un filet désert, mais tout de même.

Le retour de Marner

Visé dans les médias torontois pour son manque de contribution offensive, l’attaquant Mitch Marner a répondu en connaissant son meilleur match de la série. Il a signé la mise en scène du but de Matthew Knies, son premier point ce printemps, et a été plus visible que dans les deux autres matchs.

On sent toutefois une certaine impatience à son endroit de la part des amateurs torontois. Il lui est arrivé de cafouiller avec le disque à certains moments, dont en avantage numérique, et des huées se sont fait entendre dans l’aréna. Sa marge d’erreur semble bien mince. 

Il ne faudrait quand même pas oublier que Marner et son trio ont réussi à limiter celui de David Pastrnak à un seul but depuis le lancement des hostilités.