P-C Labrie Crunch badge Marcotte

Notre chroniqueur Anthony Marcotte nous parle de l'actualité chez le Rocket de Laval, ainsi que dans l'ensemble de la Ligue américaine de hockey (LAH). Il permettra aux partisans de suivre assidûment ce qui se passe dans l'antichambre de la meilleure ligue de hockey au monde.
La carrière de Pierre-Cédric Labrie était déjà parsemée d'histoires toutes plus étonnantes les unes que les autres avant que le Crunch de Syracuse ne lui accorde un contrat de deux saisons le 7 janvier dernier.

Le voilà donc de retour dans l'organisation du Lightning de Tampa Bay, celle qui lui a donné sa première chance de disputer 46 matchs dans la LNH de 2011 à 2014 et aussi celle lui ayant permis de gagner la coupe Calder en 2012. Le parcours inspirant d'un robuste attaquant natif de Baie-Comeau à qui rien n'a été donné, mais qui s'est façonné au fil du temps la réputation du « coéquipier ultime ».
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Il ne faut pas chercher bien loin pour trouver des gens capables de vanter les mérites de Labrie. Clairement, le Québécois en a impressionné plus d'un à chaque étape de sa carrière. En consultant sa fiche sur le réputé site web EliteProspects, on compte 18 équipes différentes en 19 ans de carrière! Uniquement dans le hockey professionnel, Labrie a enfilé le chandail de 12 équipes. Le Thunder de Wichita dans l'ECHL lui a même accordé le statut d'entraîneur adjoint alors qu'il évoluait pour l'équipe. Ça en dit long sur le respect qu'on lui accorde dans le monde du hockey.
« C'est la première fois depuis 12 ans que je signe un contrat de plus d'une saison », a laissé entendre Labrie lors d'une longue discussion dans les corridors de la Place Bell de Laval, la semaine dernière. « J'aime le hockey. Je suis un passionné de mon métier et tant qu'on voudra bien de moi, je vais poursuivre ma carrière. »
Labrie racontait en octobre 2020 à la baladodiffusion La Poche Bleue de Guillaume Latendresse et Maxim Lapierre ses débuts rocambolesques dans le hockey junior. Il peinturait les murs du Centre Henry-Leonard de Baie-Comeau et demandait à tous les jours aux membres de l'organisation s'il pouvait obtenir sa chance d'enfiler l'uniforme du Drakkar, ne serait-ce que pour un match. Ce n'est qu'à l'âge de 20 ans qu'il a finalement fait ses débuts dans le hockey junior; un phénomène rare. Son entraîneur adjoint à l'époque, Éric Messier, s'en souvient très bien.
« Ce n'était pas facile pour nous de lui faire une place dans l'équipe parce que personne ne le connaissait, se rappelle Messier. Il jouait dans une ligue senior à Forestville, un endroit plus réputé pour son jeu robuste que pour tout le reste. Il avait un bon gabarit, n'avait pas peur de personne, et il avait énormément de vouloir. Il y a aussi le fait qu'il appartenait aux Remparts de Québec qui ne voulaient pas le libérer pour rien. Il s'est donc présenté au camp chez nous à 20 ans et on a tout de suite été impressionné par son physique, son coup de patin et son excellent tir. C'était aussi le gars le plus en forme du club. Il s'est vraiment fait beaucoup de partisans lors de sa seule saison passée chez nous. »
Depuis, Labrie a traîné son baluchon un peu partout en Amérique du Nord, que ce soit dans l'ECHL ou bien dans la LAH. Il a même profité de la pandémie pour vivre une nouvelle aventure européenne dans la DEL à Berlin pendant deux saisons avant de revenir de ce côté de l'Atlantique sur les bases d'un simple contrat d'essai professionnel avec le Wolf Pack de Hartford, le club-école des Rangers de New York. Celui qui forme un couple avec Jana Roy, la fille de Patrick, souhaitait plus de stabilité pour toute la famille. Les priorités changent quand on devient papa deux fois plutôt qu'une.
« Je connaissais une bonne saison à Hartford et il y a quelques équipes en Europe qui me faisaient de l'œil, a expliqué Labrie. Plusieurs équipes sont prêtes à t'offrir un contrat pour l'année suivante à condition que tu t'entendes à venir compléter la présente saison avant le 1er février. Hartford était prêt à me garantir une place pour terminer la saison, sans plus. C'est là que Syracuse est arrivé dans le décor. »
Le sympathique gaillard avait laissé une impression très favorable à Syracuse lors de son premier passage avec l'équipe, au tout début de l'association avec le Lightning en 2012. Il connaissait très bien les environs et c'est aussi l'équipe qui voyage le moins dans une saison en raison de sa situation géographique. Un aspect non négligeable quand les vieilles jambes ont besoin d'un peu plus de repos!
On assiste d'ailleurs à un nouveau phénomène cette année dans la Ligue américaine. Plusieurs équipes ont cherché pendant la saison morte à ajouter un peu plus d'expérience dans leur formation. À Laval, par exemple, le Rocket a accordé une entente de la LAH à Gabriel Bourque, un vétéran de plus de 400 parties dans la LNH et vient aussi de donner une période d'essai à Devante Smith-Pelly. L'histoire n'est pas différente à Syracuse alors que Groulx pourra miser sur Labrie, mais aussi sur le vétéran défenseur de 37 ans Jason Garrison, qui compte 555 matchs d'expérience dans la grande ligue.
« Il a tellement laissé une belle impression dans l'organisation du Lightning qu'on m'en a parlé tous les ans depuis que je suis ici, a mentionné Groulx, l'entraîneur du Crunch depuis six saisons. Pierre-Cédric, c'est le coéquipier ultime. Pour vous donner un exemple, quand je l'ai rencontré dans mon bureau pour la première fois, il m'a lui-même demandé ce qu'il pouvait faire pour aider l'équipe. Il ne pense jamais à lui en premier, c'est toujours en fonction de l'équipe et du logo sur son chandail. C'est rafraîchissant de voir un gars de 35 ans, avec une barbe grisonnante, qui est prêt à tout faire pour t'aider. »
Auprès de ses coéquipiers, Labrie n'a pas tardé à laisser son empreinte en inscrivant son premier but dans son nouvel uniforme dès son premier match, tout en laissant tomber les gants à ses deux premières sorties.
« C'est drôle à dire, mais P.-C. nous fait gagner quelques pouces et nous fait prendre 25 livres de plus sur la glace, a candidement avoué Charles Hudon. En plus, c'est un gars qui a tellement une énergie positive. Lui, une journée grise, ça n'existe pas. On a une équipe relativement petite et sans expérience en attaque et je pense que ça nous prenait exactement un gars comme ça. »
Ce parcours inspirant n'est pas passé inaperçu chez les entraîneurs qui l'ont dirigé. Même si Labrie insiste pour dire qu'il doit beaucoup au Drakkar de Baie-Comeau et à ses entraîneurs Éric Dubois et Éric Messier pour lui avoir donné sa première vraie chance de se faire valoir, le compliment ne tarde pas à lui revenir.
« Tout le mérite lui revient entièrement, insiste Messier, un gagnant de la coupe Stanley avec l'Avalanche du Colorado en 1996. La porte s'est légèrement entrouverte et il a mis les deux pieds dedans. C'était un gars tellement facile à coacher, extrêmement apprécié de ses coéquipiers. Je ne suis pas surpris qu'il joue encore dans le hockey professionnel parce que c'est un grand passionné de son sport. Plusieurs joueurs pensent que c'est fini s'ils ne font pas l'équipe à 15 ans dans le Midget AAA et pourtant... Je n'hésiterais pas à utiliser l'histoire inspirante de Pierre-Cédric Labrie. C'est la preuve vivante que dans la vie, on n'abandonne pas. »