NASHVILLE - Ce n'est pas le Shea Weber que nous avons l'habitude de voir.
Ses partisans ici, ses partisans à Montréal, ses partisans un peu partout dans le monde du hockey voient Weber comme un homme stoïque, un homme qui a un sens de la compétition hors du commun et qui affiche beaucoup de sérieux quand il se trouve sur la patinoire, qui fera tout ce qu'il est nécessaire de faire pour gagner.
Weber brille sous les projecteurs qu'il redoute tant
Le défenseur des Canadiens marque le filet égalisateur lors d'un retour empreint d'émotions à Nashville

© John Russell/Getty Images
par
Arpon Basu @ArponBasu / Directeur de la rédaction LNH.com
Ils ne voient pas un Weber qui peine à maîtriser ses émotions, et qui semble retenir des larmes.
Weber connaît sûrement des moments comme ceux-là dans la vie, mais nous n'avons pas l'occasion d'en être les témoins. Nous le voyons quand il dispute des matchs de hockey, que ce soit pendant les 11 premières saisons de sa carrière avec les Predators de Nashville ou durant la présente campagne avec les Canadiens de Montréal.
Weber était de retour à Nashville, mardi, pour la première fois depuis que les Predators l'ont échangé aux Canadiens, le 29 juin dernier, en retour du défenseur P.K. Subban. C'était donc la première occasion qu'avaient les partisans d'ici pour remercier un joueur qui a agi comme capitaine pendant six ans et qui a laissé une profonde empreinte au sein de la communauté.
Durant la première pause publicitaire, les Predators ont présenté sur l'écran géant une vidéo rendant hommage à Weber, et les 17 113 spectateurs présents lui ont alors accordé une ovation debout.
Tout le monde au banc des Canadiens s'est également levé, les joueurs frappant la bande de leurs bâtons tout en levant les yeux vers l'écran géant pour regarder la vidéo.
Tout le monde sauf Weber.
Il était debout et regardait droit devant lui, prenant de longues et profondes respirations dans l'espoir de garder la tête froide. De temps à autre, il jetait un coup d'oeil vers la vidéo, mais jamais très longtemps.
Il y avait un match à jouer. Il y avait une victoire à aller chercher. Et c'est là-dessus qu'il voulait se concentrer.
La vidéo et l'atmosphère dans le bâtiment lui rendaient la tâche difficile.
« Je ne voulais pas regarder la vidéo, pour être honnête, a dit Weber. Je craignais de me laisser envahir par les émotions. Ça signifiait beaucoup pour moi, c'était vraiment spécial.
« C'était spécial d'être de retour dans ce bâtiment où j'ai passé tant d'années. Et mieux encore, nous l'avons emporté. »
Weber était visiblement plus détendu après le match qu'il l'avait été dans les jours précédant la rencontre, alors que toute l'attention était tournée vers lui, et que les membres de son ancienne équipe et de son club actuel n'ont pas cessé de l'encenser. Ce genre de situation rend Weber mal à l'aise; il préfère parler de ses coéquipiers, ou bien de son équipe, ou bien de baseball, ou encore de son pool de football.
N'importe quoi, sauf de lui-même.
Mais Weber s'est ensuite présenté sur la patinoire et il a donné raison à tout le monde qui l'avait louangé, alors qu'il a disputé un de ses meilleurs matchs dans l'uniforme des Canadiens, aidant le club montréalais à s'imposer 2-1 en prolongation.
Weber a marqué le but égalisateur en troisième période grâce à une passe parfaite d'un autre ancien ancien joueur des Predators qui a donné une performance étincelante - dans son cas, malgré le fait qu'il ait été hué de façon impitoyable par la foule toute la soirée durant -, Alexander Radulov.
Pendant que Weber se trouvait sur la glace à cinq contre cinq, les Predators ont tenté huit tirs vers le filet montréalais. Les Canadiens en ont tenté 25.
Plus tôt dans la journée, l'entraîneur des Canadiens Michel Therrien a parlé du fait que la simple présence de Weber rendait tout le monde autour de lui meilleur, du fait que lorsqu'il entre dans une pièce tout le monde sait que c'est le temps d'être sérieux, du fait que l'influence de Weber au sein de l'équipe rend son travail d'entraîneur beaucoup plus facile.
Il était donc de circonstance qu'au cours d'une soirée qui était à ce point importante pour Weber, les Canadiens aient livré une performance quasi parfaite à l'étranger, dominant les Predators 43-23 au chapitre des tirs au but et s'imposant au niveau du contrôle de la rondelle.
« La façon dont les gars ont joué, c'est signe du respect qu'ils ont à son endroit », a souligné Therrien après la rencontre.
La principale raison pour laquelle ce match était aussi attendu à travers la LNH n'avait pas seulement à voir avec le retour de Weber à Nashville. C'était aussi une occasion de voir les résultats de la transaction qui l'a amené à Montréal dans le cadre d'une confrontation directe.
Ce scénario ne s'est pas réalisé parce que Subban est blessé, et, d'une certaine façon, c'était là une bonne chose parce que cela permettait à Weber d'être à l'avant-scène, même s'il n'aime pas se retrouver dans une telle situation.
Reste que plus tôt dans la journée, Subban et Weber ont tous deux rencontré les représentants des médias. Pendant cet exercice, on a pu voir à quel point ils sont différents l'un de l'autre, et peut-être pourquoi les Canadiens ont décidé de conclure l'échange à proprement parler.
Quand Subban est entré dans la salle et a vu l'imposant groupe de journalistes, dont plusieurs de Montréal, il a écarquillé les yeux, a souri et a lancé, « Ça, c'est différent. »
Il portait un veston de cuir noir clouté d'argent sur les manches, fait par le fabricant de vêtements montréalais Mackage, ainsi que des espadrilles Yeezy conçues par Kanye West. C'est avec plaisir qu'il a parlé pendant 15 minutes, prolongeant même son point de presse quand les Predators ont tenté d'y mettre fin.
On le mitraillait de questions sur la blessure au haut du corps qui le gardera à l'écart de l'alignement des Predators pour encore deux semaines au moins, sur son adaptation à la ville de Nashville, pour savoir si Montréal lui manquait ou non, et il était dans son élément.
Une heure plus tard ou à peu près, Weber s'est présenté après l'entraînement matinal des siens. Il portait un short et un chandail à capuchon des Canadiens, il avait les mains dans les poches et il était visiblement mal à l'aise. On l'a mitraillé de questions pendant cinq minutes et, en fin de compte, il n'a répondu à aucune d'entre elles.
On le forçait à parler de lui-même et il n'aimait pas ça. Il n'était pas dans son élément.
« Je fais partie d'une nouvelle équipe et je veux juste aller de l'avant, a dit Weber en guise de conclusion. Je veux juste jouer au hockey. »
À en juger par la façon dont sa nouvelle équipe a joué pour lui, mardi au Bridgestone Arena, les Canadiens ont clairement démontré à quel point ils apprécient le fait qu'il fasse partie de leur organisation. Et à en juger par la façon dont les Predators et leurs partisans lui ont rendu hommage, ils ont clairement démontré à quel point le séjour de Weber à Nashville laissera des souvenirs impérissables.
Mais maintenant c'est fini, et Weber peut redevenir le Weber que nous avons appris à connaître. L'homme qui est un compétiteur féroce, l'homme qui intimide, l'homme stoïque.
Il peut recommencer à tout simplement jouer au hockey.