John Tavares

John Tavares et Matt Moulson se connaissent depuis le secondaire 2, quand le premier jouait à la crosse avec le frère du deuxième.
Ils sont devenus des colocs quand Tavares a fait son arrivée dans la LNH, habitant sous le toit de la résidence secondaire de Doug Weight. Quand l'heure du souper était arrivée, ils avaient un système bien établi : un cuisinait, l'autre lavait la vaisselle. Par la suite, ils jouaient à des jeux vidéo, tout en discutant de comment devenir meilleur au hockey.

En 2012, Moulson a demandé à Tavares de devenir le parrain de son premier enfant, Mila, une petite fille.
« Je pense qu'il n'y a que quelques personnes dans ta vie à qui tu peux téléphoner peu importe la raison ou le moment. Il fait partie de ces gens, a indiqué Moulson. S'il y a quelque chose qui cloche ou que tu as besoin d'aide, tu peux l'appeler. Il mettrait tout de côté pour te venir en aide. Il est toujours là pour parler. Il est honnête, loyal et notre amitié existera toujours, peu importe ce qui arrivera dans nos vies respectives parce qu'il est une vraiment bonne personne. »
Alors que Tavares s'apprête à prendre la décision la plus importante de sa carrière, on pourrait penser que Moulson aurait une bonne idée de ce qu'elle sera. Ce n'est pas le cas.
« Pour être honnête, je lui ai en ai parlé quelques fois l'été dernier et je ne lui en ai pas reparlé depuis, a dit Moulson. Johnny, dans sa manière de prendre des décisions et sa vision de la vie, va analyser les pour et les contres de tout, prendre son temps et s'assurer que ce sera la meilleure décision pour lui et sa famille. S'il me demandait conseil, je lui donnerais une réponse honnête. Mais je ne l'embête pas avec cela. Je pense qu'il a bien géré le fait que les médias lui en parlent depuis le début de l'année. »

Tavares Moulson

Tavares a été le premier choix du repêchage de 2009 et a joué toute sa carrière avec les Islanders de New York. Son compteur affiche 621 points (272 buts, 349 passes) en 669 matchs et il s'apprête à parapher le contrat le plus lucratif de sa carrière, que ce soir avec New York ou non.
S'il refuse de signer avec les Islanders, Tavares deviendra, le 1er juillet, le joueur autonome sans compensation le plus désiré de l'histoire de la LNH.
Son jeu a permis à certins de ses coéquipiers d'être l'aise financièrement pour le reste de leur vie. C'est le cas de Moulson, qui a connu trois saisons de 30 buts à la gauche de Tavares, ce qui lui a permis de signer un contrat de cinq ans, d'une valeur de 25 millions $, avec les Sabres de Buffalo. Pierre-Alexandre Parenteau a disputé la majorité de ses sept premières saisons professionnelles dans la Ligue américaine avant d'enregistrer 120 points en deux campagnes sur le trio que Tavares. Il s'est par la suite entendu avec l'Avalanche du Colorado pour un contrat de quatre ans et une somme de 16 millions $.
« Ç'a complètement changé ma vie, a indiqué Parenteau à propos de son passage sur le trio de Tavares. Je peux maintenant prendre ma retraite en paix grâce à ces deux saisons.
« C'est fou! J'avais 27 ans, il avait 19 ans et j'apprenais de lui. J'apprenais à me comporter comme un pro. C'est une attitude que je n'avais pas en moi. C'est peut-être pourquoi j'ai passé autant de temps dans les mineures, mais j'ai appris grâce à lui, pendant que je lui enseignais le côté social du hockey. Je pense qu'on a été un bon duo. Je lui permettais de rester calme, il me poussait.
« Sa vie, c'est le hockey. Il est très sérieux, très dédié, plus que n'importe qui avec qui j'ai joué… et j'ai joué avec beaucoup de gars, beaucoup d'espoirs de haut calibre et d'excellents joueurs. Il est le joueur le plus dédié de tous. »

Parenteau Tavares

L'attaquant Mathew Barzal a été aux premières loges pour constater à quel point Tavares est motivé. Barzal, qui a mené le classement des recrues avec 85 points en 82 parties, a été époustouflé par l'éthique de travail quotidienne de son capitaine.
« Il pousse toute l'organisation et ses joueurs en étant aussi dédié et il nous force à être meilleur chaque jour, a indiqué Barzal en avril. Je pense que c'est ce que j'ai le plus assimilé, son niveau de compétition lors des entraînements. J'attendais de voir le jour où il allait être sur la glace et ne pas donner tout ce qu'il a, mais ce n'est jamais arrivé. Pour un jeune joueur comme moi, ça me donne une raison de travailler fort chaque jour.
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Steven Stamkos, qui est un ami de longue date de Tavares, a fait face à une situation similaire il y a deux ans. Le visage de la concession du Lightning de Tampa Bay avait écoulé la dernière année de son contrat et il avait discuté avec d'autres équipes avant de finalement signer un contrat de huit ans d'une valeur de 68 millions $ pour rester à Tampa Bay, deux jours avant qu'il ne devienne joueur autonome sans compensation.
Tavares venait de terminer sa troisième saison junior avec Oshawa dans la Ligue de hockey de l'Ontario (OHL) quand Stamkos a été repêché au premier rang en 2008 par le Lightning. À sa deuxième saison (2006-2007), Tavares a marqué 72 buts en 67 parties. Avec son compagnon de trio Brett MacLean, ils ont enregistré 234 points cette saison et 237 la suivante.
« Il n'a jamais dit publiquement qu'il voulait être le tout premier choix, a affirmé MacLean. Mais je pense qu'on savait tous qu'il se mettait beaucoup de pression parce qu'il voulait être le premier choix. Lorsqu'il jouait dans la OHL, il y avait une rivalité avec Stamkos puisque les deux voulaient être le meilleur. C'est pareil pour Stamkos et c'est pourquoi ils sont de si bons joueurs. Ils tentent chaque jour d'être le meilleur.
Tavares a toujours fait face à de la pression, lui qui est devenu le premier joueur à obtenir le statut de joueur exceptionnel par la OHL en 2005. Le 17 mars 2007, il a marqué ses 70 et 71e buts de la saison pour battre le record de Wayne Gretzky comme joueur de 16 ans.
« En étant près de lui chaque jour, je pense qu'il a très bien géré la situation, a dit MacLean. Plusieurs personnes n'auraient pas été en mesure de faire face à la pression, surtout qu'il était toujours sous le microscope. On pouvait connaître un excellent week-end et il y avait quand même des gens qui doutaient de son jeu, qui disaient qu'il ne patinait pas assez bien ou qu'il n'était pas assez bon défensivement. On parle d'un jeune qui venait de marquer 72 buts à 16 ans et 134 points. Un des meilleurs joueurs de la ligue.
« Il a toujours voulu s'améliorer. Il a la force de trouver quelque chose à travailler, et je pense que ç'a aidé mon propre jeu. On sautait sur la glace durant les entraînements et on travaillait certaines choses, que ce soit sur le jeu de puissance, divers jeux, améliorer notre tir. Il a toujours essayé de peaufiner son coup de patin. Il reconnaissait que de l'améliorer lui permettrait d'avoir un impact dans la LNH. »
Scott Gordon a été le premier entraîneur de Tavares dans la LNH avant d'être congédié après 17 matchs lors de la saison 2010-2011. Gordon a été nommé adjoint chez les Maple Leafs de Toronto la saison suivante et il se souvient de son premier affrontement contre Tavares à titre d'adversaire.
« Ça faisait un bout que je ne l'avais pas vu, a dit Gordon, qui dirige maintenant l'équipe de Lehigh Valley dans la Ligue américaine. À notre premier match, il a aisément contourné un de nos défenseurs. Je me suis dit : ''Wow!'' Je n'avais rien vu venir. C'était bizarre de penser qu'il était maintenant capable d'être à ce point rapide pour battre un vétéran défenseur de la LNH. On doit saluer son désir de s'entraîner et d'améliorer une facette de son jeu qui n'était pas une de ses forces.
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Moulson se souvient à quel point Tavares était mature comme recrue. La plupart des jeunes, surtout ceux qui sont en moyens financièrement, préfèreraient ne pas avoir à cuisiner. Mais ce n'était pas le cas de Tavares, qui désirait prendre soin de son corps.
« Il n'était pas mauvais en cuisine, même à l'époque. Maintenant, il est vraiment bon. Il prend tout au sérieux. L'alimentation est une des choses les plus importantes pour lui. »
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Moulson a rapidement constaté le poids qu'avait Tavares sur ses épaules à 19 ans, celui de rendre les Islanders crédibles comme ils l'avaient déjà été. Tavares a marqué 24 buts et ajouté 30 passes comme recrue en 2009-2010, mais les Islanders ont terminé la saison avec une fiche de 34-37-11, derniers dans la section Atlantique. Plusieurs soirs, Tavares prenait une part du blâme bien plus importante qu'il n'aurait dû le faire, se rappelle Moulson.
« Johnny se mettait beaucoup de pression, comme tous les grands joueurs. Dès sa première saison, je pense que l'objectif qu'il s'était fixé, c'était d'être le meilleur joueur au monde. Je pense qu'il a beaucoup appris depuis, hors de la glace, qu'il faut parfois s'éloigner de cet objectif, relaxer tout en restant concentré sur le hockey. Lors de cette première année, on se parlait beaucoup en se disant qu'il ne fallait pas s'en faire, qu'il y aurait un autre match. Surtout qu'en jouant sur le même trio, on se disait qu'on devait être meilleurs. On parle de Johnny comme un excellent joueur et leader, et je ne pense pas qu'il m'ait déjà dit que j'avais mal joué. On terminait des matchs et je m'excusais en disant que j'avais été pourri. Il me répondait que non, qu'il aurait dû être meilleur.
« Pour être un grand leader, tu dois prendre l'équipe sur ton dos. Il n'a jamais pointé ses coéquipiers. Il cherchait toujours des façons de faire mieux. C'est la même chose dans sa vie. Il est l'athlète le plus à son affaire, concentré, dédié, discipliné et déterminé que j'ai connu.
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Travis Hamonic a été le coéquipier de Tavares lorsque les Islanders ont obtenu leur première (et seule) victoire en séries éliminatoires depuis 1993. C'était le 24 avril 2016, lors du match no 6 de la première ronde face aux Panthers de la Floride au Barclays Center.
Tavares, qui avait égalé la marque avec 54 secondes à faire en troisième période, a donné aux Islanders leur laissez-passer pour la deuxième ronde en battant Roberto Luongo en deuxième prolongation pour donner la victoire 2-1 aux siens. Un moment qui reste dans la mémoire d'une génération de partisans des Islanders qui n'ont pas connu la gloire des quatre Coupes Stanley gagnées par l'organisation de 1980 à 1983.

« On sentait toute la pression des partisans des Islanders, a rappelé Hamonic, qui a été échangé aux Flames de Calgary il y a un an. Quand JT a marqué le but, les émotions que nous avons senties, c'était vraiment le plus beau moment de ma carrière avec les Islanders.
« Je n'ai rien à dire sur son jeu, tout le monde à New York, dans le pays, dans la Ligue, sur la planète a vu ce qu'il est capable de faire sur la glace. Ça dit tout. Il peut parfois avoir l'air d'une personne réservée, mais quand tu le connais depuis longtemps, tu sais que c'est quelqu'un de spécial. »
« C'est vraiment un bon ami. Pour lui, les gens et leur entourage sont importants, et pas seulement parce qu'il est capitaine. Qu'il quitte ou non New York, l'équipe qui va l'avoir obtiendra un joueur de calibre mondial. John est un excellent joueur, mais une personne encore meilleure. Ça en dit beaucoup parce qu'on sait ce qu'il peut faire sur la glace.
« Techniquement, il est plus jeune que moi de quelques mois, mais c'est quelqu'un dont je me suis toujours inspiré dans ma carrière par sa manière de se conduire sur et hors de la patinoire. Avec ce qu'il peut apporter dans un vestiaire ainsi que dans une communauté, tu n'as la chance d'obtenir un joueur de la sorte qu'une fois dans une génération. »
Dans l'ère moderne de la période des joueurs autonomes, qui s'est amorcée en 1995, le premier choix d'un repêchage n'a jamais pris la décision de quitter son équipe pour signer avec une autre.
Parenteau a indiqué qu'il n'est pas certain si Tavares va rester ou non à New York, mais il espère que oui. Les Islanders ont embauché Lou Lamoriello le 22 mai après avoir raté les séries pour une deuxième saison, et le DG Garth Snow et l'entraîneur-chef Doug Weight ont été congédiés le 5 juin.
« Ils n'ont pas eu une bonne année et ils ont fait beaucoup de changements, a rappelé Parenteau. Je pense qu'il savait que ça s'en venait, mais je ne sais pas… je ne suis pas surpris qu'il n'ait pas encore signé de contrat.
« Il y a un côté de moi qui espère qu'il restera. Le chandail lui fait bien. C'est son équipe après tout. »