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Les performances des gardiens de but demeurent à ce jour l'élément le plus difficile à aborder sous l'angle de l'analyse statistique. Le problème trouve sa source dans le fait que les données cueillies par la LNH n'offrent, au bout du compte, que peu de détails permettant d'évaluer le travail des cerbères. Heureusement, le problème ne laisse personne indifférent et de nombreux amateurs se sont attelés à la tâche de faire parler ces données parcellaires en produisant des modèles poussés permettant de lier les événements les uns aux autres pour tracer un portrait un peu plus précis de la situation.

Lorsque vient le temps d'utiliser ces modèles pour décrire les performances des gardiens de but, j'aime bien me référer à celui développé par Emmanuel Perry. D'une part, les résultats sont disponibles sur son site, Corsica.hockey et, d'autre part, Perry explique en détail sa démarche dans deux articles publiés sur son blogue. La transparence de la démarche est un facteur à ne pas négliger; il y a, dans l'analyse statistique du hockey comme dans quantité d'autres domaines s'appuyant sur l'analyse de données, trop de boîtes noires.
Les données publiées par Perry permettent de distinguer deux éléments dans le total de buts accordés par une équipe : d'une part, la contribution attribuable aux performances des gardiens et, d'autre part, celle attribuable au type et à la quantité de tirs accordés par l'équipe.
Le graphique ci-dessous représente le total des buts accordés pour chaque équipe en 2016-17, en y distinguant la contribution des gardiens. En gris, le total de buts accordés attendu par le modèle à partir de la qualité et de la fréquence des tirs donnés à l'adversaire. En vert, les buts économisés par les gardiens de l'équipe et, en rouge, les buts perdus par les gardiens. Les équipes sont classées en fonction du nombre réel de buts accordés.

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Le Wild du Minnesota ne fait pas que bénéficier d'une saison exceptionnelle de Devan Dubnyk (18 buts « sauvés » depuis le début de la saison, en 25 matchs joués!). L'équipe de Bruce Boudreau est aussi la plus étanche en défensive selon le modèle de Perry, avec le plus bas total attendu de buts accordés, soit 72.
Vient ensuite un trio d'équipes ayant des défensives dans la bonne moyenne, dont les résultats sont dopés par un gardien dominant : Sergei Bobrovsky (14 buts sauvés) chez les Blue Jackets de Columbus, Braden Holtby (13 buts sauvés) avec les Capitals de Washington et Carey Price avec les Canadiens de Montréal (13 buts sauvés).
Trois autres équipes retiennent mon attention, mais pour des raisons plus embêtantes : elles semblent plus faibles en défensive et surnagent présentement grâce à d'excellentes performances de leurs gardiens. Les Rangers de New York nous ont habitués à ce genre de situation, la différence étant cette fois-ci qu'on semble vouloir diminuer la charge de travail d'Henrik Lundqvist (six buts sauvés en 24 matchs) en donnant plus de place au surprenant Antti Raanta (près de huit buts sauvés en seulement 14 apparitions). Ce dernier va probablement redescendre sur terre rapidement, mais il aura donné au Roi Henrik la chance de garder ses forces pour la deuxième moitié de la saison.
Les Blackhawks de Chicago, avec Corey Crawford (neuf buts sauvés) et les Oilers d'Edmonton avec Cam Talbot (12 buts économisés) sont dans une position plus classique et aussi plus précaire. Sans la contribution de leurs gardiens, leurs défensives sont franchement vacillantes et seul Scott Darling (six buts sauvés en 17 participations) a performé au-delà des espérances. Contrairement à Lundqvist, qui a gardé les buts plus de 60 matchs dans 8 de ses 11 saisons jouées dans la LNH, ni Talbot ni Crawford n'ont réussi à atteindre ce plateau au cours de leurs carrières. Si les blessures frappent…
Et, en terminant, un mot sur les Penguins de Pittsburgh. Ceux-ci ont eu droit à des performances douteuses de la part de Marc-André Fleury (quatre buts perdus en 19 apparitions) et Mike Condon n'a gardé les buts qu'une période pour eux. En plus, l'équipe a un score des plus ordinaires quant au total attendu de buts accordés, soit 94 buts, ce qui indique que la défensive manque présentement d'étanchéité. Mais si Matt Murray peut rester en santé, les Penguins vont recevoir tout un coup de piston : le cerbère de 22 ans a repris là où il avait laissé en séries éliminatoires au printemps dernier, sauvant pas moins de 11 buts en 17 matchs joués.
En terminant, on voit à quel point Jonathan Quick manque aux Kings de Los Angeles. Celui-ci n'est pas dominant, mais il sauve bon an mal an de 5 à 10 buts à son équipe en jouant près de 70 matchs. En son absence, on se dépatouille comme on peut, mais il faut souligner que l'équipe n'a pas perdu sa structure en perdant son gardien de confiance : avec un total attendu de 74 buts accordés, les Kings sont la deuxième équipe la plus efficace selon ce modèle. La troupe de Darryl Sutter n'a pas dit son dernier mot.