Braden Holtby

Le choc Washington-Pittsburgh s'annonçait épique, mais à regarder les choses aller, il s'avère qu'« étrange » est un terme plus approprié. Les Capitals de Washington ont dû batailler ferme pour venir à bout des Maple Leafs de Toronto, alors que les Penguins de Pittsburgh ont traversé les Blue Jackets de Columbus avec une réelle facilité. Ce choc au sommet nous donne maintenant une série ou une équipe domine et où l'autre gagne. De quoi rendre fou Barry Trotz, qui cherche frénétiquement quels ajustements apporter.

Les Penguins dominent au score, et pas un peu : neud buts marqués contre quatre, un avantage de 7-3 à 5 contre 5. Mais le site NaturalStatsTrick.com, qui calcule les chances de marquer à partir de la provenance des tirs enregistrés sur le site de la LNH,
nous indique que les Capitals ont doublé les Penguins aux chances de marquer
, 82 contre 41, obtenant donc 66 pour cent des chances.
Les données de Corsica.Hockey traduisent elles aussi un avantage marqué, quoique moindre, pour les Capitals. Les calculs de chances de marquer donnent 54 pour cent et la formule de buts prévus du site donne 63 pour cent des buts à Washington. Toutes situations confondues, les Capitals ont donc dominé.
Et ça n'est pas un simple artifice de la part de la série jouée avec un retard au score. Peu importe que le pointage soit égal ou non, Washington a eu un net avantage aux tirs.

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La troupe de Barry Trotz n'est pas non plus dépendante des seules étoiles du club. Peu importe le trio, on a l'avantage en deuxième ronde, ce qui n'était pourtant pas le cas contre les Maple Leafs.

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Une partie de l'explication se trouve devant les filets. Braden Holtby et Philip Grubauer ont connu un début de ronde difficile et leur équipe en paye le prix. Trotz, de ce côté, ne peut qu'espérer que ses deux excellents cerbères retrouvent rapidement leurs repères. Par contre, il peut contribuer à donner un coup de piston supplémentaire à son attaque en utilisant à son tour du levier des confrontations.
Disputés à Pittsburgh, les deux premiers matchs ont permis à Mike Sullivan d'influer sur le cours du match en utilisant les mises en jeu pour favoriser certaines confrontations et en éviter certaines autres.
Normalement, une formation cherche à opposer son meilleur défenseur au meilleur attaquant adverse et va parfois accompagner celui-ci d'un bon trio défensif.
Parce que les défenseurs jouent beaucoup plus souvent que les attaquants, il est plus facile de laisser « trainer » un bon duo un peu plus longtemps, ou encore de le faire attendre un instant de plus sur le banc pour s'assurer que sa présence recouvre au maximum celles des meilleurs éléments adverses. On peut aussi plus rapidement envoyer un tandem de défenseurs sur la glace.
Un attaquant assigné à la surveillance d'un attaquant adverse doit souvent voir son temps de jeu réduit pour s'assurer qu'il soit disponible lorsque sa némésis saute sur la glace. Les confrontations systématiques sont donc rares, même entre défenseurs et attaquants. Mais on peut néanmoins rapidement identifier des tendances, surtout en série, là où les enjeux sont cruciaux.
On l'a bien vu dans mon dernier article, ou j'explique le jeu de chat et de souris auquel se livrent Vladimir Tarasenko et P.K. Subban.
Les Penguins, on l'a vu l'an dernier, ne travaillent pas sur ce plan comme les autres équipes, ce qui complique la tâche de leurs adversaires. Sullivan a donné 36 minutes de temps de jeu à 5 contre 5 à Brian Dumoulin, environ 29 minutes à Olli Maatta et Justin Schultz, ces trois défenseurs représentant respectivement les premières, deuxièmes et troisièmes paires des Penguins.
On a bien un surplus de temps consacré par Dumoulin au trio de Nicklas Backstrom, mais ça n'est pas exceptionnel. En fait, on ne semble pas trio chercher les confrontations en défensive du côté des Penguins.

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C'est là une clé importante pour Trotz, parce qu'il doit chercher à dynamiser au maximum son attaque lors des deux prochains matchs. J'ai montré plus haut que tous les joueurs affichent un bilan positif sur le différentiel de tirs, mais il faut savoir que ce bilan, dans le détail, change énormément selon la confrontation en place.
En gros, Evgeny Kuznetsov semble celui qui a présentement besoin d'aide.

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Kuznetsov a fait flèche de tout bois contre Dumoulin, mais a peiné contre les autres, alors que ses collègues ont tenu leur bout, peu importe la confrontation. Comment expliquer cette différence? C'est que les Penguins ont un groupe d'attaquants particulièrement difficile à gérer, et Kuznetsov n'est manifestement pas toujours à la hauteur de la tâche contre le top-6 des Penguins.

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Sachant que Backstrom et Lars Eller n'ont tous deux pas de difficultés à tenir leur bout contre le formidable top-6 des Penguins, j'ai l'impression que nous sommes en présence d'une de ces rares occasions où il serait intéressant pour un entraineur de gérer plus précisément les confrontations attaquants versus attaquants. En sortant le #92 des griffes de Crosby et Malkin, Trotz ne surexpose pas des éléments qui semblent fragiles, bien au contraire. Quitte à couper dans le temps de jeu de Kuznetsov pour s'assurer qu'il soit prêt à sauter sur la glace contre le troisième et le quatrième trio des Penguins. Sans Krsitopher Letang, Sullivan n'a pas de police d'assurance en défensive pour contrer ce genre de manœuvre.
On a tendance à voir ce genre de séries comme des confrontations à finir entre vedettes. Mais c'est souvent un peu plus bas dans l'alignement, à travers l'organisation plus subtile des duels qui s'y jouent, que les matchs se gagnent. Reste à voir si Trotz va choisir de prendre ce chemin.