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Après 21 saisons passées dans la LNH, le capitaine des Coyotes de l'Arizona, Shane Doan, tire sa révérence. Après que les Coyotes eurent annoncé qu'ils ne lui offriraient pas de nouveau contrat, semble-t-il, sans offre concrète d'autre équipe à deux semaines de l'ouverture des camps d'entraînement, Doan s'est en quelque sorte retrouvé poussé vers la sortie.
« Il faut savoir… », chantait Aznavour. Vu la suite des événements, il serait tentant de conclure qu'à l'image du personnage de la chanson, Doan n'a pas su tirer sa révérence en pleine gloire, qu'il a trop attendu. Ce serait compréhensible, mais ce jugement m'apparaît injuste. Doan a été extraordinairement durable et, jusqu'à la toute fin, a su apporter une contribution significative. À tel point qu'on peut croire qu'il aurait encore été en mesure d'aider bien des équipes.

Doan a disputé 39 parties dans la Ligue américaine en 1997-98, un fait important, parce qu'il explique qu'il n'ait joué, cette saison-là, que 39 matchs dans la LNH. La saison précédente, il n'avait disputé « que » 63 matchs. Par la suite, on ne l'y reprendra plus : il ne manquera la marque des 70 matchs qu'à deux reprises,
si on en croit Hockey-Reference
, en 2012-13, pour cause de saison écourtée par le lock-out, et la saison suivante, qu'il termine avec 69 matchs au compteur. Sur 21 saisons, donc, Doan affiche 1540 parties jouées, une exceptionnelle moyenne de 73 matchs par année. On ne le dit pas assez : la santé est, au même titre que le coup de patin ou le maniement de rondelle, une habileté que certains savent développer mieux que d'autres. Doan fait ici partie de l'élite.
On ne dispose pas de beaucoup de données pour bien évaluer les meilleures années de sa carrière. La ligue ne commence à publier des données plus raffinées qu'en 2007-08, alors que Doan a déjà atteint le cap des 31 ans. À cet âge, l'immense majorité des joueurs de la LNH, s'ils sont encore dans le grand circuit, voient habituellement leur contribution chuter dramatiquement. Mais Doan, lui, va persister, à l'image d'autres grands joueurs de sa génération. Parmi les repêchés des années 1990, seuls Jaromir Jagr et Jarome Iginla ont, comme lui, franchi le cap des 1500 matchs. Patrick Marleau et Joe Thornton devraient franchir cette barrière en cours de saison.
Doan n'a jamais eu le profil offensif de son compagnon de repêchage, Iginla. Mais sa constance offensive (13 saisons de 20 buts ou plus en 16 ans, de 1999 à 2016) ne rend pas tout à fait justice à la qualité de son travail. Deux éléments me semblent dignes de mention, surtout si l'on garde à l'esprit que ces données ne concernent que ce que Doan a fait à l'âge ou la plupart des joueurs prennent leur retraite.
Tout d'abord, sa production de tirs vers le filet est demeurée, jusqu'à la toute fin, d'une remarquable constance. Le seuil des 13 tirs tentés par heure jouée représente généralement la ligne de démarcation des ailiers de top-6. Doan flirte avec cette ligne tout au long de la dernière décennie.

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Mais la production individuelle n'est qu'une partie de l'histoire. Lorsqu'on compare le débit offensif de l'équipe en présence de Doan et ce qu'elle accomplit en son absence, on constate qu'il n'a eu un impact négatif qu'à une seule reprise, au cours des dix dernières années, sur la production de tirs vers le filet adverse, en 2013-14. Lors de cette saison, Doan joue principalement avec un autre récent retraité, Mike Ribeiro, une association catastrophique qui n'a pas duré. L'an dernier encore, il aide son équipe à mieux performer offensivement et défensivement.

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Je vois des équipes donner des essais à des joueurs comme Brandon Prust et Ryan Malone et c'est, me semble-t-il, une évidence : Doan aurait pu décrocher un rôle important dans la LNH l'an prochain, quitte à passer par un essai dans un camp d'entraînement. Mais, après 21 saisons jouées pour la même franchise, le jeu en valait-il pour lui la chandelle? Il y a quelque chose de symboliquement fort dans le fait d'avoir passé tout ce temps avec une seule organisation, plus encore une franchise aussi souvent prise dans la tempête. S'il ne se retire pas en pleine gloire, Doan aura été jusqu'à la toute fin un contributeur significatif, un rare point fixe du hockey en Arizona.