60 Diamonds No 31 Alex Moginly

La cérémonie d’intronisation au Temple de la renommée 2025 aura lieu lundi. La cuvée de cette année est composée de Jennifer Botterill, Zdeno Chara, Brianna Decker, Duncan Keith, Alexander Mogilny et Joe Thornton dans la catégorie des joueurs, et de Jack Parker et Danièle Sauvageau dans la catégorie des bâtisseurs. Le journaliste principal NHL.com Dan Rosen dresse ici le portrait de Mogilny.

L’histoire de la défection d’Alexander Mogilny de l’Union soviétique en 1989 pour pouvoir jouer dans la LNH est en soi digne du Temple de la renommée du hockey.

Une fuite lors d’une journée de congé à Stockholm durant le Championnat du monde de la FIHG 1989. Une course vers une voiture. Échapper au KGB en changeant d’hôtel et d’identité. Quitter sa famille sans aucune garantie de la revoir un jour.

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« C’est à la fois une histoire et un film », a lancé le membre du Temple de la renommée du hockey Pat LaFontaine. « Alex a eu tellement de courage de faire ce qu’il a fait. Il a été un pionnier. Il a contribué à créer les changements nécessaires qui ont permis aux joueurs russes de s’amener dans la LNH. C’est une histoire exceptionnelle. Et avec le joueur qu’il est devenu, il s’agit d’un scénario de film. »

Un film qui, au final, se termine bien.

Cette courageuse fuite pour atteindre la LNH n’était que le début pour Mogilny. Avec ce qu’il a accompli lors des 17 années suivantes, plusieurs croyaient qu’il aurait dû avoir sa place au Temple de la renommée bien plus rapidement.

Mogilny sera enfin intronisé au Temple au sein de la cuvée 2025 le 10 novembre. Il s’agit d’un honneur bien mérité pour un joueur qui est admissible à être intronisé depuis 2009 et qui a terminé sa carrière de 16 saisons avec 1032 points, incluant 473 buts, en 990 matchs.

Il a gagné la Coupe Stanley avec les Devils du New Jersey en 2000. Sur la scène internationale avec l’Union soviétique, il a gagné la médaille d’or en 1988 ainsi que l’or au Championnat mondial junior de la FIHG et au Championnat du monde sénior en 1989.

Mogilny a été le premier joueur né en Russie à être nommé capitaine dans la LNH et le premier à participer à un match des étoiles, et il détient le record de la LNH pour le plus de buts en une saison marqués par un joueur russe avec 76 en 1992-93.

« Tout ce que ce joueur pouvait accomplir », a dit Scott Gomez, qui a joué avec Mogilny au New Jersey. « Je me souviens de ma première fois sur la glace avec lui. Je n’arrivais pas à croire que c’était Alexander Mogilny. »

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Les Sabres de Buffalo ont repêché Mogilny en cinquième ronde (89e au total) en 1988.

« C’était un coup de dés », a raconté l’ancien dirigeant des Sabres Don Luce à WGRZ à Buffalo en 2014. « Nous devions espérer qu’il allait vouloir venir. »

Mogilny a fait le saut à Buffalo un an plus tard, arrivant en secret pour finalement être accueilli en grande pompe, après avoir passé les trois saisons précédentes avec l’équipe de l’Armée rouge soviétique.

« Peu de joueurs ont des mains aussi rapides que leurs pieds, a affirmé LaFontaine. Il y a les Connor McDavid, Pavel Bure et Nathan MacKinnon. Et il y a Alex. Ce ne sont que quelques noms, mais il n’y en a probablement pas beaucoup qui peuvent faire des jeux avec leurs mains à la même vitesse que leurs pieds. Tout est en symbiose au plus haut niveau. C’est très rare. »

Mogilny a mis du temps à s’adapter à la LNH.

Il a récolté 43 points (15 buts, 28 passes) en 65 matchs en 1989-90. Il a inscrit 30 buts et 64 points en 62 rencontres en 1990-91.

LaFontaine est arrivé à Buffalo trois semaines après le début de la saison 1991-92 dans une transaction avec les Islanders de New York le 25 octobre 1991. La production de Mogilny a explosé au même moment, avec 39 buts et 84 points en 67 rencontres en 1991-92.

Puis, alors que leur chimie se développait, Mogilny a connu l’une des plus grandes saisons dans l’histoire de la LNH, marquant 76 buts et cumulant 127 points en 77 parties en 1992-93.

Seul Wayne Gretzky (deux fois), Brett Hull et Mario Lemieux ont marqué plus de buts en une seule saison que les 76 filets de Mogilny en 1992-93.

« J’ai joué avec de grands joueurs, a mentionné LaFontaine. Je n’avais jamais joué avec un joueur qui avait autant de talent et de vitesse jusqu’à ce que je joue avec lui. »

Un refrain qu’on a également entendu à Vancouver, à Toronto et au New Jersey.

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Après avoir cumulé un impressionnant total de 444 points (233 buts, 211 passes) en 381 matchs répartis sur six saisons à Buffalo, Mogilny a été échangé aux Canucks de Vancouver le 8 juillet 1995, ce qui lui a permis d’aller jouer avec Bure, son ancien coéquipier de l’Armée rouge.

« L’été où nous avons acquis Alex, nous déménagions au Rogers Arena, et notre marché était emballé de voir ces deux-là ensemble », a dit l’ancien joueur de centre des Canucks Trevor Linden.

Bure a été limité à 15 matchs en 1995-96, mais Mogilny a tout de même marqué 55 buts et amassé 107 points en 79 rencontres. Il a même inscrit cinq buts en infériorité numérique, après en avoir cumulé trois en six saisons à Buffalo.

« On me demande souvent qui est le joueur le plus talentueux avec lequel j’ai joué, a ajouté Linden. J’ai joué au sein de l’équipe olympique canadienne en 1998, j’ai joué à la Coupe du monde en 1996, j’ai pris part à des matchs des étoiles, mais je peux dire qu’Alex Mogilny est le joueur le plus talentueux avec lequel j’ai évolué. Des habiletés et un talent naturels. Les gens sont un peu surpris quand je dis ça, mais je pense vraiment que ses habiletés naturelles étaient aussi bonnes que quiconque. Il était un magicien. »

Linden a même souligné que Mogilny avait parfois l’air de s’ennuyer parce que personne n’avait le même niveau de talent que lui.

« Je dis toujours ceci : les grands joueurs – les véritables grands joueurs – ont tous quelque chose d’unique, a renchéri Linden. C’est un compliment. S’ils pensaient tous comme moi, ils seraient comme moi. Ils tireraient le maximum de leur talent et seraient de bons joueurs. Mais les grands joueurs voient toujours les choses différemment. Alex était comme ça. »

Mogilny a cumulé 308 points (139 buts, 169 mentions d’aide) en 312 matchs avec les Canucks, avant qu’ils l’échangent aux Devils le 14 mars 2000.

« Nous ne gagnons pas la Coupe si nous n’obtenons pas Alex Mogilny », a affirmé l’ancien directeur général des Devils Lou Lamoriello.

alexander mogilny Canucks 1985

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Mogilny s’est joint à une formation des Devils bourrée de talent qui mettait en vedette Martin Brodeur devant le filet, Scott Stevens et Scott Niedermayer en défensive et la "A Line" de Patrik Elias, Petr Sykora et Jason Arnott, en plus de Gomez, Claude Lemieux et Bobby Holik en attaque.

Ils avaient un dossier de 40-17-5 (huit verdicts nuls) quand Mogilny est arrivé le 14 mars.

Il a joué sur un trio avec Gomez et Lemieux.

« Je ne sais pas si c’est parce que je n’étais qu’une recrue, mais je lui ai demandé : "Où veux-tu avoir la rondelle?", s’est remémoré Gomez. "Où veux-tu que je te l’envoie?" Il m’a regardé – il était tellement décontracté – et il m’a dit : "Envoie-la où tu veux". Il voyait bien que j’étais un peu nerveux de simplement lui parler. Je lui ai redit : "Non, sérieusement. Si nous avons un 2-contre-1, où veux-tu avoir la rondelle?" C’est toute la fierté que je tirais d’être un passeur. Il m’a regardé de nouveau et il m’a répondu : "Non, sérieusement. Envoie-la ou tu veux."

« L’entraînement s’est amorcé, et j’ai commencé à lui envoyer des rondelles pour des tirs sur réception, et il continuait de me dire : "Envoie-la où tu veux." Je la lui envoyais derrière lui, devant lui, et chaque tir était parfait. Par la suite, il m’a dit : "Tu vois, je te l’avais dit. Envoie-la n’importe où." Je trouvais ça extraordinaire. Et j’ai récolté beaucoup de passes en donnant la rondelle à "Almo." »

Selon Lamoriello, Mogilny savait comment des joueurs russes comme Slava Fetisov et Alexei Kasatonov avaient été traités par les Devils, ce qui a représenté un avantage. Sergei Brylin et Sergei Nemchinov étaient avec les Devils quand Mogilny s’est amené au New Jersey.

La transition a donc été facilitée.

« Il a cadré parfaitement ici, mais c’était difficile de ne pas bien t’intégrer à cette équipe, a poursuivi Lamoriello. Nous n’aurions pas pu lui en demander plus. Ç’a été un plaisir de l’avoir au sein de cette équipe et de l’organisation. Et il avait un don pour marquer des buts. »

Les Devils ont gagné la Coupe Stanley en 2000. Mogilny n’a pas dominé, avec six points (trois buts, trois passes) en 12 matchs de saison régulière et sept points (quatre buts, trois aides) en 23 rencontres des séries éliminatoires. Mais il était tellement dangereux qu’il rendait les autres meilleurs autour de lui.

La saison suivante, en jouant avec Gomez et Brylin, il a obtenu 83 points (43 buts, 40 mentions d’aide) en 75 parties. Le New Jersey a de nouveau atteint la finale, mais s’est incliné contre l’Avalanche du Colorado en sept matchs.

« Il est l’un des joueurs les plus talentueux avec lesquels j’ai joué », a affirmé Stevens au sujet de Mogilny.

alexander mogilny devils 2001

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Mogilny a quitté le New Jersey pour s’entendre avec les Maple Leafs de Toronto le 3 juillet 2001, retrouvant le directeur général Pat Quinn, qui occupait le même rôle à Vancouver quand Mogilny avait été acquis par les Canucks en 1995.

Il a marqué son 400e but dans la LNH contre les Mighty Ducks d’Anaheim le 8 octobre 2001.

Il a amassé 57 points (23 buts, 33 passes) en 66 rencontres en 2001-02. La saison suivante, Mogilny a été jumelé au joueur de centre Mats Sundin, et la chimie a été instantanée.

Mogilny a mené les Maple Leafs avec 79 points (33 buts, 46 aides) en 73 parties. Ses 79 points l’ont placé à égalité au 15e rang de la Ligue à ce chapitre. Sundin a amassé 72 points (37 buts, 35 passes).

« De tous les joueurs avec qui j’ai joué, incluant l’équipe nationale avec Peter Forsberg et Nicklas Lidstrom, et Joe Sakic (à Québec), Alex était de loin, ou presque, le plus talentueux, a mentionné Sundin. Je ris quand je pense à Alex. S’il jouait à l’époque actuelle, il marquerait 60 ou 70 buts par saison.

alexander mogilny maple leafs 2002

Des problèmes à une hanche ont ralenti Mogilny après 2002-03.

Il a joué 37 matchs avec Toronto en 2003-04, amassant huit buts et 30 points.

Il est retourné au New Jersey après l’arrêt de travail qui a annulé la saison 2004-05, mais il a amassé 25 points (12 buts, 13 aides) en 34 matchs. Il a terminé sa dernière saison chez les professionnels dans la Ligue américaine de hockey avec les River Rats d’Albany.

Mogilny a raté le plateau des 1000 matchs par 10 rencontres, terminant à 990. Il était à 27 buts des 500 en carrière. Il lui a fallu 16 ans pour entrer au Temple de la renommée du hockey.

Mais à partir du moment où il a fait défection et à chacun de ses arrêts dans la LNH, ses coéquipiers avaient la même chose à dire à son sujet.

« Il est le meilleur joueur avec qui j’ai joué », a dit LaFontaine.

*Avec la contribution du journaliste principal NHL.com Tom Gulitti et du journaliste NHL.com Mike Zeisberger.