76 Gainey

MONTRÉAL – Bob Gainey sera devant sa télévision dans le confort de sa demeure au nord de Peterborough, en Ontario, cette semaine, pour regarder la Confrontation des 4 nations.

« Il y a tellement de bons joueurs avec le Canada, les États-Unis, la Finlande et la Suède. Quand ils sont là pour représenter le drapeau de leur pays, c’est très spécial », a lancé Gainey, qui a fièrement représenté sa nation à la Coupe Canada 1976.

L’Unifolié de Gainey renouvellera ses connaissances internationales avec la Suède, mercredi, lorsque s’entamera la Confrontation des 4 nations au Centre Bell (20 h HE, MAX, truTV, TNT, SN, TVAS).

Le Canada montre une fiche de 8-1 contre la Suède dans les matchs impliquant les meilleurs joueurs – sa seule défaite étant survenue à la Coupe Canada 1984 au Pacific Coliseum de Vancouver. Historiquement, le Canada a dominé la Suède 37-20 au cumulatif du score et a gagné deux fois par blanchissage – Rogatien Vachon en 1976 et Bill Ranford à la Coupe Canada 1991 au Maple Leaf Gardens.

Les deux équipes se sont rencontrées deux fois sur une glace à Montréal, des matchs de 4-3 et 5-2 au Forum en 1981 et 1987, chaque fois dans le cadre de la Coupe Canada.

Leur neuvième affrontement, à l’occasion de la Coupe du monde 1996, a donné lieu au plus long match d’un tournoi international de la LNH. Le Canada l’a emporté 3-2 grâce à un but de Theo Fleury à 19:47 de la deuxième prolongation.

La rondelle sera déposée mercredi presque 49 ans après que Gainey, âgé de 22 ans à l’époque après trois saisons dans la LNH avec les Canadiens de Montréal, eut fait ses débuts internationaux au niveau professionnel à la Coupe Canada 1976. C’était alors la première fois que les deux pays croisaient le fer dans un tournoi international de la LNH.

76 Gainey clip

Couverture du journal Ottawa Citizen sur le rôle principal joué par Bob Gainey dans la victoire 4-0 du Canada contre la Suède lors de la Coupe Canada 1976.

Contre la Suède le 7 septembre au Maple Leaf Gardens de Toronto, dans le troisième match du Canada, Gainey marquait deux buts et était nommé joueur par excellence de la partie dans un gain de 4-0.

C’était un signe de ce que réservait l'avenir à l’attaquant quasi indestructible de 6 pieds 2 pouces et 200 livres. Gainey allait plus tard remporter la Coupe Stanley cinq fois avec les Canadiens, agir à titre de capitaine de l’équipe de 1981 à 1989 et mettre la main sur le trophée Selke, remis au meilleur attaquant défensif de la LNH, pendant quatre saisons consécutives de 1978 à 1981. Il a été intronisé au Temple de la renommée du hockey en 1992.

Le Canada a conservé un dossier de 4-1 pendant la ronde préliminaire, battant la Finlande, les États-Unis, la Suède et l’Union soviétique, mais s’inclinant contre la Tchécoslovaquie. Les représentants de la feuille d’érable ont obtenu leur revanche contre les Tchécoslovaques en s’imposant en deux rencontres en finale, dans une série deux de trois, pour remporter le championnat.

76 action 1

Le gardien suédois Hardy Astrom regarde la rondelle tandis que son coéquipier Thommie Bergman aide à défendre contre les Canadiens Darryl Sittler (27 ans) et Guy Lapointe lors d'un match de la Coupe Canada 1976 aux Maple Leaf Gardens.

Gainey a été ajouté tardivement à la liste des 32 joueurs qui avaient été invités au camp d’entraînement. Vingt-cinq ont survécu à la coupure, un chiffre qui a été révisé à 29, officiellement.

« J’ai passé l’été en ne m’attendant pas à faire partie de ce groupe », s’est-il souvenu, n’ayant jamais su s’il avait reçu l’appel parce qu’un autre joueur était malade ou blessé. « Je me battais pour un poste, il n’y avait aucune garantie que je jouerais avec d’autres qui avaient plus d’expérience et qui étaient plus talentueux que moi offensivement. J’étais simplement heureux de faire partie du groupe et d’avoir évité le couperet. »

Gainey a été laissé de côté pour le premier match du Canada, une victoire de 11-2 contre la Finlande à Ottawa, et pour la victoire suivante de 4-2 contre les États-Unis à Montréal. Il pense s’être fait dire à un certain point après le deuxième match, probablement par l’entraîneur Scotty Bowman, qu’il serait en uniforme pour le prochain duel de l’équipe contre la Suède. Il avait eu suffisamment de temps, se souvient-il, pour obtenir des billets pour ses parents et quelques autres personnes de son entourage.

76 action 2

Le gardien suédois Hardy Astrom suit la rondelle tandis que Stig Salming défend contre le Canadien Bill Barber lors de la Coupe Canada 1976 au Maple Leaf Gardens.

Bowman connaissait bien les forces défensives de Gainey, puisqu’il le dirigeait avec les Canadiens. Il l’a donc déployé sur un trio avec les puissants joueurs offensifs des Maple Leafs, Darryl Sittler et Lanny McDonald. Les trois ont étouffé le trio principal de la Suède composé d’Ulf Nilsson, Anders Hedberg et Roland Eriksson, et ont également apporté du punch en attaque avec les deux buts de Gainey.

« J’en étais vraiment à mes débuts dans la LNH, alors le fait d’obtenir une invitation pour ce camp d’entraînement, puis de faire l’équipe, c’était vraiment spécial, a dit Gainey. À peine quelques années plus tôt, j’étais encore à Peterborough (à jouer au niveau junior). C’était un grand pas en avant pour moi.

« Nous avions des trios offensifs et un trio défensif. Même si Darryl et Lanny étaient prolifiques en attaque, nous étions le trio qui appliquait de la pression et qui était caractérisé par son jeu dans les trois zones. Nous avions toute une équipe, sans faiblesse. L’attaque pouvait venir de partout. »

87 Gainey

Bob Gainey regarde l’action du banc lors du match des Canadiens de Montréal contre les Devils du New Jersey le 16 octobre 1987, au Brendan Byrne Arena d’East Rutherford.

Et c’est ce qui est arrivé ce soir-là. Bobby Hull et Marcel Dionne ont chacun réussi à déjouer le gardien suédois Hardy Astrom. Idem pour Gainey, avec son doublé.

Si vous tendez une oreille, vous entendrez probablement encore le son de la sévère mise en échec de Brett Hull à l’endroit du défenseur vedette suédois Borje Salming.

Hull, connu sous le nom de « Comète blonde », s’est surtout fait connaître pour sa grande vitesse et son tir dévastateur; même à 37 ans, au sein de l’Association mondiale de hockey (AMH) avec les Jets de Winnipeg, près de 20 ans après ses débuts chez les professionnels, son accélération inspirait les plus jeunes et son tir frappé faisait craindre les gardiens.

Il était aussi l’un des joueurs les plus costauds de son époque, mais Hull ne distribuait que très rarement des mises en échec, mettant plutôt en valeur ses aptitudes offensives.

« Maintenant, nous savons qu’il avait un coup d’épaule dévastateur tout ce temps, et qu’il aurait pu l’utiliser davantage, écrivait le chroniqueur Jim Proudfoot dans les pages du Toronto Star le lendemain. Il a distribué deux mises en échec percutantes en première période du match de la Coupe Canada, hier, les deux fois à l’endroit de Borje Salming. Le Maple Leaf Gardens ne s’est pas encore remis de l’impact du contact. »

76 Hull

Bobby Hull, d’Équipe Canada, patine près du gardien tchécoslovaque Vladimir Dzurilla et du défenseur Milan Chalupa lors d’un match de la finale de la Coupe Canada de 1976, au Forum de Montréal.

Le capitaine d’Équipe Canada, Bobby Clarke, était de ceux qui venaient de comprendre, à ce moment, que ces mises en échec étaient les deux gouttes qui allaient faire déborder le vase chez les Suédois.

« Rien de nouveau, eh, avait-t-il lancé. C’est comme lorsqu’on joue contre les Leafs dans la LNH. Tout le monde sait que tu dois neutraliser Salming, ou il va te faire payer. Les Suédois ont bâti leur plan de match offensif autour de lui. Il est le gars qui amène la rondelle d’un territoire à l’autre, et il est le cœur de leur avantage numérique. »

Bill Barber, coéquipier de Clarke avec Équipe Canada et chez les Flyers de Philadelphie, avait mis la table quelques minutes plus tôt avec une autre bonne mise en échec à l’endroit de Salming.

La vedette suédoise a ensuite offert la réplique en offrant une chance de marquer aux siens, un lancer de la pointe qui a donné du fil à retordre à Vachon.

Puis, vint un train nommé Hull.

« Salming n’était ensuite plus le même joueur que lors des deux premiers matchs », avait observé Gerry Cheevers, qui assistait au match du banc du Canada à titre de gardien auxiliaire. « On peut remercier Hull pour ça. Ses mises en échec auraient arrêté un cheval. »

Le Canada avait amorcé le match sur les talons, ayant tout donné lors du tour précédent face aux États-Unis après une victoire facile contre la Finlande d’emblée.

SWE-Borje

Borje Salming fait visiter le Hockey SENSE du Temple de la renommée du hockey à des joueurs suédois lors de la Coupe du monde de 2016, en collaboration avec la LNH, l’AJLNH et Beyond Sport.

Un but rapide de Hull et sa cinglante mise en échec contre Salming ont laissé les partisans torontois partagés entre la frustration de voir le défenseur vedette des Maple Leafs ébranlé et la joie de voir Équipe Canada obtenir l’étincelle désirée.

Salming aura quand même fini par jouer pendant 26:16 lors de cette rencontre.

Tout en lançant des fleurs à ses compagnons de trio, Gainey confiait aux journalistes de l’époque que l’intensité de cette partie était comparable à l’intensité des matchs de séries éliminatoires de la Coupe Stanley. Il s’est fait discret sur sa prestation de deux buts, soulignant tout de même qu’il avait réalisé ce fait d’armes seulement deux ou trois fois auparavant.

« Ça fait changement, je n’y suis pas habitué », a-t-il dit à la blague.

Vérification faite, Gainey avait réussi quatre doublés en 224 matchs de saison dans la LNH avant de croiser le chemin des Suédois à la Coupe Canada.

24 Gainey

Bob Gainey salue la foule du Centre Bell lors d’une cérémonie d’avant-match le 22 octobre 2024.

Il terminera le tournoi avec deux buts et un championnat. Il a remis le chandail unifolié à la Coupe Canada de 1981, récoltant quatre points (un but, trois aides) au sein de l’équipe qui a subi un humiliant revers de 8-1 face à l’Union soviétique (URSS) en grande finale.

Près d’un demi-siècle après le match mémorable contre la Suède, Gainey est impatient de voir son pays natal croiser le fer à nouveau avec les Suédois en lever de rideau de la Confrontation des 4 nations.

« Les quatre pays donneront un bon spectacle, a-t-il conclu. Chaque équipe a des joueurs dynamiques. Ce sera un bon tournoi. »

Photo d’en-tête : Bob Gainey, d’Équipe Canada, patine près du gardien tchécoslovaque Vladimir Dzurilla et du défenseur Milan Kajkl lors du premier match de la finale de la Coupe Canada de 1976, au Maple Leaf Gardens.