Verhaeghe badge Lepage

EDMONTON – Le visage de Carter Verhaeghe s’illumine lorsqu’il entend le nom de son ancien entraîneur Benoit Groulx. Puis, l’attaquant des Panthers de la Floride se met à rire lorsqu’on lui demande ce dont il se souvient de ses années sous la gouverne du pilote québécois.

« Eh bien, je me souviens qu’il m’a laissé de côté plusieurs fois », répond-il du tac au tac.

À LIRE AUSSI : Panthers : Un revirement inhabituel | Analyse: Draisaitl, le maître des prolongations | « J’étais à 24 heures de lâcher le hockey » - A.J. Greer

Le patineur de 29 ans le dit en rigolant et sans la moindre rancune. C’est simplement ainsi que s’est amorcée la relation entre les deux hommes quand Verhaeghe s’est joint au Crunch de Syracuse en 2017-18, après avoir joué un total de 36 matchs dans l'ECHL lors des deux saisons précédentes.

N’étant pas pleinement convaincu de ce que le nouveau venu pouvait apporter à son équipe, Groulx l’a laissé de côté pour les dix premiers matchs de la saison, même quand son poulain a été rétabli d’une blessure.

« À un moment donné, il est venu cogner à ma porte pour savoir quand il allait avoir une chance », se souvient Groulx, qui dirige maintenant dans la KHL. « Il était dans mes plans, mais je ne le connaissais pas beaucoup. Pour moi, il était important qu’il améliore d’abord ses habitudes de travail à l’entraînement. »

« Je lui ai dit que je pouvais aider son équipe à gagner, a raconté Verhaeghe. Je lui ai demandé de me donner une chance. Quand il l’a fait, il a simplement continué de me donner des occasions. »

Verhaeghe lui a aussi prouvé qu’il ne parlait pas à travers son chapeau. À son premier match de la saison, il a inscrit un but et une aide contre le Rocket de Laval. Il n’a ensuite raté que huit des 65 rencontres subséquentes, y compris certaines pour soigner des bobos.

C’est à ce moment que le ciel de sa carrière s’est dégagé.

Il a récolté 17 buts et 48 points en 58 matchs cette saison-là, avant d’exploser avec une campagne de 82 points, dont 34 buts, en 76 rencontres. L’année suivante, Verhaeghe était promu chez le Lightning de Tampa Bay et l’aidait à remporter la Coupe Stanley dans un rôle de soutien.

Il n’a plus jamais rejoué dans la Ligue américaine.

Depuis ce temps, il a notamment atteint le plateau des 42 buts dans l’uniforme des Panthers et a remporté la Coupe une deuxième fois l’an dernier. Il participe ces jours-ci à sa quatrième finale – les Panthers tirent de l’arrière 1-0 face aux Oilers d’Edmonton.

« Ben m’a aidé énormément, a expliqué Verhaeghe. Je suis arrivé à Syracuse en ne sachant pas exactement qui j’étais. Je venais d’être échangé, j’étais le nouveau gars, et ça m’a pris du temps à trouver mes repères. Mais l’organisation a cru en moi et m’a donné une chance.

« La culture de l’équipe m’a poussé à m’améliorer. Benoit faisait jouer les joueurs qui le méritaient, alors on se poussait en tout temps. J’ai vraiment apprécié ça. Il a été incroyable pour moi. »

À l’inverse, Verhaeghe a aussi appris des choses à son ancien entraîneur. Encore à ce jour, Groulx l’utilise comme exemple chaque fois qu’il est temps d’inculquer une leçon à ses ouailles.

« Comme Yanni Gourde, il m’a appris une chose, a amorcé l’homme de hockey. Ce sont deux gars qui sont passés par l’ECHL, qui ont joué sur un quatrième trio, qui ont été laissés de côté et auxquels on n’a pas toujours fait confiance. Mais eux, ils n’ont jamais perdu confiance en leur talent.

« Dans leur tête, ils savaient qu’ils étaient meilleurs que ce que les gens voyaient. Ils n’avaient besoin que d’un peu de patience et d’un petit coup de pouce. À un moment donné, la porte s’est ouverte et bang! »

Une question de mentalité

Six ans se sont écoulés depuis que Verhaeghe a disputé son dernier match sous les ordres de Groulx, et sa réputation n’est désormais plus à faire. Il est devenu le joueur des grandes occasions, celui qui se plait à faire mal à l’adversaire quand ça compte le plus.

De ses 32 buts en 87 matchs de séries, cinq ont été inscrits en prolongation et sept autres ont fait la différence en temps réglementaire. Ça représente près de 40% de sa production.

« Il a toujours eu un grand calme, et l’enjeu n’est jamais trop grand pour lui, a raconté Groulx. Il a toujours le sentiment qu’il va réussir à faire la différence. Pour un coach, c’est de l’or en barre. Tu l’envoies sur la patinoire quand il reste deux minutes et tu lui dis que c’est le temps de faire une présence de deux minutes. »

Cette mentalité n’est sûrement pas étrangère au parcours sinueux qu’il a emprunté pour se rendre là où il est présentement. C’est exactement à l’image de sa carrière : il n’a jamais paniqué, jamais abandonné, même quand il s’est retrouvé au plus bas dans les rangs professionnels.

« C’est sûr que ce n’était pas l’idéal de jouer dans l'ECHL, mais je me demandais tous les jours ce que je pouvais faire de mieux pour me rendre à la LNH, a assuré Verhaeghe. Il y a des moments de doutes, des moments où tu te demandes si tu vas avoir la chance d’y arriver. Mais tu dois toujours croire en toi. »

« Tout ce dont il avait besoin, c’est d’une opportunité, a conclu Groulx. Je savais qu’il ferait son chemin, de la même manière qu’il l’a fait à Syracuse. Rien de ce qu’il a ne lui a été donné. Il est allé le chercher. »