Egor Shilov badge Lepage

Derrière le banc des Tigres de Victoriaville, Simon Olivier a vu le jeu se dessiner au ralenti : la manœuvre d’Alexei Vlasov en entrée de zone, la remise derrière à Egor Shilov, la passe transversale à Korney Korneyev et le tir sur réception de Vlasov, qui mettait la touche finale à ce tic-tac-toe exécuté à la perfection.

« Quand tu vois ça, tu te revires et tu te dis : "Ouf, ça, c’est un vrai jeu de hockey" », raconte l’entraîneur dès les premières minutes de cette entrevue téléphonique avec LNH.com.

Olivier n’est pas insensible à la magie qu’est en mesure de créer Shilov, mais il commence lentement à s’y habituer. Avec ses sept buts et 21 points en 12 matchs, l’attaquant russe figure au quatrième rang des pointeurs de la LHJMQ, à égalité avec son compatriote Vlasov – un autre espoir pour le prochain encan.

Pas besoin de regarder plus loin pour comprendre la raison pour laquelle le jeune centre est l’un des deux joueurs de la LHJMQ, avec Xavier Villeneuve, à être considéré comme un potentiel espoir de premier tour par le Bureau central de dépistage de la LNH.

« Je savais qu’on avait un excellent joueur qui arrivait, mais je ne m’étais pas fait d’idée », a dit celui qui en est à sa première saison comme entraîneur-chef derrière le banc des Tigres. « Il n’a que 17 ans, il apprend à jouer dans une nouvelle ligue… On ne s’attendait pas à ce genre de début de saison.

« En étant avec lui tous les jours, on devient peut-être moins éblouis par ce qu’il fait. Mais il réussit à faire des jeux où il n’y en a pas. Ça prend un joueur spécial pour faire ça. »

Le plus impressionnant dans tout ça, c’est que Shilov parvient à faire tout ça alors qu’il est toujours en train de s’adapter au style de jeu du circuit junior québécois, et à un nouveau pays. À l’instar de Vlasov, avec qui il a joué en Russie dans sa jeunesse, il arrive des États-Unis après une saison dans la USHL.

« Ce changement est bon pour moi, a dit le Russe dans un anglais qu’il a appris de zéro, l’année dernière. L’an dernier, ce n’était pas parfait et je sais que cette saison sera meilleure. Elle l’est déjà. […] Toute l’équipe m’a aidé à m’adapter, les entraîneurs, ma famille de pension et mes coéquipiers. »

Signe que rien ne semble trop le déranger dans sa transition – et qu’il n’est pas très au courant des grands débats que la question a suscités – il pointe vers l’interdiction des bagarres quand on lui demande quelle est la plus grande différence entre la USHL et la LHJMQ.

« Sinon, rien ne change, souligne-t-il, un peu timide. Je joue et j’ai du plaisir. Il faut toujours avoir du plaisir. »

On se tourne donc vers Olivier pour creuser davantage la question.

« On compare des pommes avec des oranges, rectifie l’entraîneur. C’est une ligue différente, un pays différent et une mentalité différente. Il y a toutes sortes de facteurs qui entrent en ligne de compte. Mais il ne s’en fait pas énormément avec ça. Il est très décontracté, cérébral et calme. »

Un beau projet

Cérébral. C’est un mot qui revient souvent pendant notre entretien avec le pilote, et il l’utilise dans plusieurs contextes – autant pour parler du joueur que de l’individu. Olivier et ses adjoints tentent, depuis le début de la saison, d’amener Shilov à prendre des décisions plus rapidement.

Avec un succès mitigé, de l’aveu même de l’entraîneur. Ce n’est pas que le jeune homme est réfractaire au changement, au contraire, mais son côté cérébral prend souvent le dessus.

« Dans toutes ses actions, j’aimerais qu’il essaie d’être plus rapide, a expliqué Olivier. En même temps, je ne pense pas qu’on peut penser comme lui. Les joueurs comme lui réussissent à faire des jeux à leur vitesse à eux, et ils s’adaptent bien en passant au niveau suivant.

« On dit souvent que les bons joueurs ralentissent la game. Parfois, on pense qu’il pourrait faire un jeu rapide, mais il en trouve un autre qui tourne aussi bien ou même mieux que celui que tout le monde avait vu. »

C’est probablement ce qui s’est passé quand il a contribué à dessiner le brillant échange dont on parlait d’entrée de jeu. Pour le reste, l’accent sera mis sur la qualité de son jeu défensif pour ajouter des cordes à son arc tout en lui « laissant son identité ». La bonne chose, c’est que Shilov a de grandes ambitions.

« J’aime la façon de jouer d’Aleksander Barkov, mais je sais que je dois changer quelques trucs pour être comme lui », a-t-il conclu avec un petit sourire en coin.