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Un des gardiens mythiques dans l’histoire de la LNH, Ken Dryden, a rendu l’âme à l’âge de 78 ans, vendredi, après une bataille contre le cancer.

Avocat, écrivain et politicien, Dryden a connu du succès dans toutes ses entreprises. Il n’a peut-être pas connu une longue carrière de sportif, mais il a certes marqué l’imaginaire au cours des huit saisons – sept complètes – qu’il a passées chez les Canadiens de Montréal.

Dryden a pris part aux six conquêtes de la Coupe Stanley d’une des plus grandes dynasties du hockey dans les années 1970.

« Ken Dryden était un athlète exceptionnel mais aussi un homme d'exception », a déclaré le propriétaire des Canadiens Geoff Molson. « Derrière le masque, il était plus grand que nature. Nous pleurons aujourd'hui non seulement la perte d'un pilier d'une des plus grandes dynasties du hockey, mais également d'un homme de famille, d'un citoyen attentionné et d'un gentilhomme qui a profondément marqué nos vies et nos communautés à travers les générations. Il était de ces légendes qui ont façonné notre club pour en faire ce qu'il est aujourd'hui.

« Ken représentait tout ce que les Canadiens de Montréal se doivent d'être, et son legs au sein de notre société transcende notre sport. Au nom de la famille Molson et de tous les membres de l'organisation des Canadiens de Montréal, j'aimerais offrir mes plus sincères condoléances à la famille Dryden, à ses proches ainsi qu'à tous ceux et celles qui ont eu le privilège de croiser son chemin et de le connaître. »

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En 397 matchs en saison régulière, il a cumulé une fiche de 258 victoires, 57 défaites et 74 matchs nuls, avec une moyenne de buts alloués de 2,24 et 46 blanchissages. En 112 sorties en séries éliminatoires, il a signé 80 victoires, tout en conservant une moyenne de 2,40.

Il annonce sa retraite à l’âge de 31 ans au terme de la saison 1978-79, avec plusieurs honneurs individuels à son palmarès: le trophée Vézina, remis au meilleur gardien, à cinq reprises, le trophée Conn-Smythe, à titre de joueur par excellence en séries, une fois, et le trophée Calder de la recrue par excellence.

Il est le seul joueur dans l'histoire de la LNH qui a obtenu le Conn-Smythe en 1971, avant le Calder l’année suivante.

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Sur la scène internationale, il a été un des acteurs privilégiés de l’incontournable Série du siècle en 1972 contre l’Union soviétique, au sein de l’équipe canadienne.

« La Série du siècle 1972 est probablement mon souvenir le plus spécial lié au hockey, a-t-il déjà affirmé. Quand vous jumelez le pire sentiment qui soit, la défaite dans le premier match, au plus exaltant, la conquête au huitième match, ça donne un moment mémorable. »

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Tous se rappellent sa pose caractéristique devant le filet, le menton posé sur ses bras croisés au sommet de son bâton, même quand le jeu se déroulait!

Une statue en bronze grandeur nature immortalisant sa pose familière est dévoilée en 1985. L’œuvre de l’artiste Robin Bell est exhibée à la place Montréal Trust, au centre-ville de Montréal.

« Quand on repense aux grands joueurs du passé, on peut se fermer les yeux et revoir des images d’eux en action : Maurice Richard chargeant le filet adverse, Jean Béliveau patinant avec grâce, Guy Lafleur filant cheveux au vent », avait affirmé Dryden, au cours de la cérémonie du retrait de son chandail 29 au Centre Bell, le 29 janvier 2007.

« L’image qu’on a de moi, c’est celle où je suis debout en m’appuyant sur mon bâton en regardant ce qui se passe et en ne faisant rien », avait-il ajouté à la blague. « Ça résume pas mal mes années 1970. Ça, et plusieurs conquêtes de la Coupe Stanley. »

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Fulgurante ascension

Kenneth (Ken) Wayne Dryden naît le 8 août 1947 à Hamilton, en Ontario. Il grandit à Islington, puis à Etobikoke, dans la région de Toronto. C’est à ce dernier endroit que tout débute pour son frère aîné Dave et lui. Les enfants du quartier affluent dans la cour arrière du domicile familial, qui est le théâtre de nombreuses parties de hockey. Comme son grand frère, Ken choisit la position de gardien.

Dryden est sélectionné par les Bruins de Boston en 14e position du repêchage amateur de la LNH en 1964. Le directeur général des Canadiens Sam Pollock réalise un coup de maître en le subtilisant aux Bruins pour presque rien, dans un échange en 1966.

Le gaillard mesurant 6 pieds 4 pouces et pesant 205 livres fait flèche de tout bois dans les rangs universitaires américains, avec l’équipe de l’Université Cornell, dans l’état de New York, en remportant 76 des 81 matchs qu’il dispute.

Après avoir évolué dans la Ligue américaine de hockey, avec les Voyageurs de la Nouvelle-Écosse, il connaît une rentrée fracassante dans la LNH au printemps 1971. Peu de temps après ses débuts, le 20 mars 1971, Il se retrouve confronté à son frère Dave, alors porte-couleurs des Sabres de Buffalo dans le premier – et le seul encore à ce jour – duel de gardiens-frères dans l’histoire de la LNH.

Le duel a pu avoir lieu, en présence du paternel Murray, parce que Ken a dû s’amener en relève de Rogation Vachon, qui s’est blessé au moment où le Tricolore menait 2-0. Dave cède de loin devant Jacques Lemaire sur le premier tir qu’il reçoit, et Ken a le meilleur sur son grand frère, le CH l’emportant 5-2.

Les frangins croisent le fer à une autre reprise au Forum, le 28 octobre 1972 – un verdict nul 3-3 entre les Sabres et les Canadiens.

Le brio instantané de Ken élève les Canadiens au statut d’équipe cendrillon en 1971. Le CH sort les Bruins, les favoris, au premier tour, poursuivant sa route jusqu’à la conquête de la Coupe Stanley.

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Avec son nom gravé sur la Coupe et le trophée Conn-Smythe en poche, le grand gardien entreprend officiellement sa saison de recrue l’automne suivant. Il fait la preuve qu’il n’est pas qu’un simple coup de vent.

Il signe 39 victoires, ne subissant que huit revers en 64 matchs, avec une moyenne de 2,24. Il remporte le trophée Calder et il est invité à défendre le filet du Canada dans l’historique série contre l’URSS, avant le début de sa deuxième saison complète de la LNH.

La retraite?

Dryden poursuit ses études en droit parallèlement à sa carrière sportive et il mène la vie dure aux dirigeants des Canadiens sur le plan des négociations contractuelles. Incapable de s’entendre avec Sam Pollock, il annonce sa retraite avant le début de la saison 1973-74. Il en profite pour compléter son barreau à l’Université McGill de Montréal.

Désireux de renouer avec la compétition la saison suivante, il revient par la grande porte en ayant les mêmes réflexes aiguisés qui le distinguent de ses homologues.

La deuxième moitié des années 1970 est l’affaire des Canadiens. Le défilé de la Coupe Stanley prend un abonnement sur la rue Sainte-Catherine pour quatre printemps d’affilée entre 1976 et 1979 et Dryden remporte le trophée Vézina à chacune de ces saisons.

Il connaît sa meilleure saison en 1976-77, ne perdant que six des 56 matchs qu’il a joués, avec 10 jeux blancs. Cette saison-là, les « Glorieux » établissent un record de la LNH en ne subissant que huit défaites.

Il décide d’abdiquer pour de bon à la suite de la quatrième conquête d’affilée de l’équipe en 1979. Il est admis au Temple de la renommée du hockey quatre ans plus tard, en 1983.

À la retraite, il œuvre comme commentateur pour le réseau de télévision américain ABC aux Jeux olympiques entre 1980 et 1988, incluant le fameux « Miracle sur glace », lorsque les États-Unis surprennent l'Union soviétique en ronde finale du tournoi de 1980 à Lake Placid.

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Il revient au hockey à titre de président et directeur général des Maple Leafs de Toronto entre 1997 et 2004. Il met fin à son association avec les Maple Leafs afin d’entrer en politique comme candidat du Parti libéral du Canada, dans la circonscription de York-Centre, en banlieue de Toronto. Il est, de 2004 à 2011, député de la circonscription fédérale. Il est ministre du Développement social dans le cabinet de Paul Martin en 2004 et en 2005. Il est un des candidats à la succession de Martin en 2006, mais Stéphane Dion remporte la course à la chefferie.

L’érudit Dryden est un auteur prolifique. Son premier ouvrage sur le hockey, « The Game » ou L’Enjeu, publié en 1983 remporte un énorme succès littéraire. En 2019, il publie la biographie de l’illustre entraîneur Scotty Bowman intitulé : « Scotty, une vie de hockey d’exception ». En 2022, il lance un livre à l’occasion du 50e anniversaire de la Série du siècle qui a pour titre « La Série du siècle, telle que je l’ai vécue ».

En 2013, il est fait Officier de l’Ordre du Canada, en reconnaissance de sa contribution exceptionnelle à la société canadienne.

- Écrit en collaboration avec le journaliste Robert Laflamme