COURNOYER BADGE CHAUMONT

LOS ANGELES – Alexis Cournoyer s’apprêtait à partir pour l’aéroport de Montréal afin de sauter dans un vol en direction de Nashville. Les Canadiens de Montréal ont brisé ses plans en le repêchant au cinquième tour avec le 145e choix au total.

Cournoyer n’aura pas le bonheur de découvrir la célèbre rue Broadway à Nashville, mais ça ne l’empêchera pas de dormir.

« J’avais accepté une invitation pour le camp de développement des Predators si je ne me faisais pas repêcher, a-t-il expliqué lors d’une visioconférence samedi après-midi. J’avais un vol à 20 h ce soir. Il ne me restait plus beaucoup de temps. Ça devait s’en venir. Et c’est finalement tombé à l’eau avec le choix des Canadiens. J’ai annulé mon vol. Je ferai maintenant la route en char au lieu de la faire en avion (afin de participer au camp de développement du CH). »

Quelques minutes après sa sélection par le Tricolore, le gardien de 19 ans donnait encore le sentiment d’être sur un nuage.

« Je n’ai vraiment pas de mots, a-t-il dit en faisant son entrevue dans une pièce de la maison familiale où il y avait une lampe aux couleurs du CH. Comme vous pouvez le voir, je suis tatoué Canadiens de Montréal. Quand j’ai vu mon nom apparaître, c’était tout simplement irréel. Je rafraîchissais la page sur mon cellulaire. Je ne pouvais pas y croire. Mon cellulaire est tombé à terre. Je n’en revenais pas! J’ai donné un gros câlin à ma mère. »

Âgé de 19 ans et avec une expérience d’à peine une demi-saison avec les Eagles du Cap-Breton dans la LHJMQ, Cournoyer n’avait pas la certitude d’entendre son nom au repêchage. Son père, Louis, avait même écrit sur les réseaux sociaux avant le début de la deuxième journée du repêchage qu’il était prêt à courir dans les rues de son quartier en bobettes si jamais son garçon devait recevoir l’honneur d’être choisi par l’une des 32 équipes de la LNH.

Questionné au sujet de cette promesse audacieuse de son père, Cournoyer ne pouvait s’empêcher de sourire.

« Je n’espère pas (que son père tiendra sa promesse de courir en sous-vêtement), a-t-il répliqué. Mon père est un fan fini. Je lui en veux parfois. Quand il a écrit ça, j’ai juste ri, j’étais crampé. Mes amis riaient aussi. Il mouille à siaux dehors. J’espère qu’il ne me fera pas honte. »

Un parcours sinueux

Il n’y a jamais un chemin identique dans un parcours de hockeyeur. Cournoyer en est une autre illustration.

« De voir Alexis qui se fait repêcher aujourd’hui, c’est une belle histoire, c’est une belle histoire pour tous les Québécois », a dit Louis Robitaille, l’ancien entraîneur en chef des Eagles du Cap-Breton. « Quand on parle de persévérance, ç’en est un exemple. »

Les Eagles ont offert cette fameuse chance au gardien originaire du quartier de Saint-Louis-de-France à Trois-Rivières au mois de décembre 2024. Il n’a pas raté sa chance.

« Il venait de gagner deux fois le titre de joueur du mois à Truro dans le Junior A au Nouveau-Brunswick et nous cherchions un gardien puisque Jakub Milota, un choix de quatrième tour de Nashville, participait au Mondial junior avec la Tchéquie », a rappelé Robitaille, qui dirigera l’équipe-école de l’Avangard d’Omsk en Russie l’an prochain. « Je me souviens de mon appel avec Alexis pendant la pause de Noël. Je voulais qu’il prenne le filet. Il m’avait répondu qu’il était pour le prendre, le filet. On ne lui avait fait aucune promesse. Il n’est jamais reparti du Cap-Breton. Il a juste continué à s’améliorer. De Noël jusqu’à la fin de l’année, il a eu des chiffres incroyables. Il était l’un des meilleurs gardiens au pays, pas juste dans la LHJMQ. »

En 21 matchs avec les Eagles, le gardien de 6 pi 3 po a maintenu un dossier de 13-6-1 avec une moyenne de 1,82 et un taux d’efficacité de ,942. Avant ça, il n’avait joué que deux matchs dans la LHJMQ, les deux avec les Cataractes de Shawinigan en 2022-23.

À sa première rencontre avec les médias montréalais, Cournoyer a résumé son parcours. Il a eu besoin d’un bon souffle pour le faire.

Retranché à deux reprises par les Cataractes de Shawinigan, il est retourné jouer avec les Estacades de Trois-Rivières dans le M18 AAA pour ensuite être échangé au Drakkar de Baie-Comeau. Il n’était pas plus dans les plans du Drakkar. Il a roulé sa bosse en jouant pour le Collège Laflèche au niveau collégial avant de s’exiler dans les Maritimes, où il a porté le chandail des Bearcats de Truro pour près de deux ans.

Il a fini par attirer l’attention des dépisteurs de la LNH en jouant du hockey inspiré pendant quelques mois au Cap-Breton en cette fin de saison 2024-2025.

« J’ai attendu ça toute ma vie, d’avoir une chance, a mentionné Cournoyer. Je gardais toujours espoir. C’est la preuve que quand tu as la passion et que tu ne baisses pas les bras, tu peux y arriver. Moi, j’ai reçu ma chance dans le coin de Noël à l’âge de 19 ans. »

L’an prochain, Cournoyer poursuivra son apprentissage dans la NCAA à l’Université de Cornell. Le jeune homme a offert une description de son style comme gardien.

« Je dis toujours que je suis un gardien qui inspire la confiance pour mes coéquipiers. Je suis capable de sortir les gros arrêts lors des moments clés. Je suis calme, j’ai de bonnes mains et je lis bien les jeux. Je suis aussi un gars heureux dans le vestiaire, un gars heureux de jouer au hockey. »

Cette joie de vivre, elle se lisait dans son visage lors de la visioconférence. Et Robitaille a également insisté sur cette qualité.

« Il rentrait dans mon bureau à Sydney et on jasait pendant une heure, a-t-il dit. Il n’est pas un gardien réservé. Avant lui, je n’avais jamais vu un gardien qui donne des tapes à tous les joueurs dans le vestiaire entre deux périodes. Il encourageait tout le monde. Il ne restait pas dans sa bulle. Il changeait la dynamique de notre équipe en agaçant les joueurs. Il procurait du bonheur à notre équipe. »