BOSTON – Ils sont tous partis, désormais.
Au fil des ans, les vétérans de l’édition championne de 2011 ont tourné la page. Ils ont été échangés, ils ont pris leur retraite et certains ont même été intronisés au Temple de la renommée. Ils ont quitté la LNH, un par un, pour joindre la direction d’une équipe ou travailler derrière un banc ou à la télévision.
Mais dans tout ça, Brad Marchand a survécu à Boston. Il a vu ses anciens compagnons de trio et coéquipiers accrocher leurs patins et il est devenu le dernier morceau restant d’une décennie de succès chez les Bruins de Boston. Il a gagné en maturité, est devenu un marqueur de 100 points et il a fait partie du meilleur trio au hockey avec Patrice Bergeron et David Pastrnak. Il a obtenu le rôle de capitaine.
Mais vendredi, tout ça a pris fin. Marchand, qui avait passé ses 16 saisons dans la LNH avec les Bruins et espérait rester dans sa ville adoptive pour le reste de sa carrière, a été échangé aux Panthers de la Floride. Il a plié bagage dans une journée où l’équipe a liquidé le plus d'actifs possible, elle qui semble se diriger vers une réinitialisation sans vouloir se lancer dans une reconstruction complète.
« Nous avons vu l’occasion qui se présentait à nous d’aller dans une autre direction, sans tout démolir », a dit le directeur général Don Sweeney. « Ça ne fait pas partie de l’ADN de cette organisation et ce ne sera jamais le cas. »
Marchand a été échangé en retour d’un choix conditionnel de deuxième ronde au repêchage 2027 qui pourrait devenir un choix de premier tour en 2027 ou 2028 si la Floride gagne deux rondes lors des séries éliminatoires de la Coupe Stanley 2025 et si Marchand joue 50% des matchs de l’équipe. Les Bruins ont retenu 50% de son salaire.
Les Bruins ont également échangé le joueur de centre Charlie Coyle à l’Avalanche du Colorado et le défenseur Brandon Carlo aux Maple Leafs de Toronto vendredi, après avoir échangé les attaquants Trent Frederic aux Oilers d’Edmonton, mardi, et Justin Brazeau au Wild du Minnesota, jeudi. L’équipe a liquidé à peu près tous ses actifs dans le but de se relancer, et ce, deux saisons après avoir établi les records de la LNH pour les victoires (65) et les points (135) en 2022-23.
Maintenant, seulement six joueurs de cette édition demeurent : David Pastrnak, Jeremy Swayman, Charlie McAvoy, Hampus Lindholm, Pavel Zacha et Jakub Lauko, ramené à Boston dans la transaction de Brazeau.
La chute a été brutale.
Pour aller loin pendant toutes ces années, notamment en 2019 quand les Bruins ont atteint le match no 7 de la finale de la Coupe Stanley avant de s’incliner contre les Blues de St. Louis et lors de la saison 2022-23, les Bruins ont dû sacrifier plusieurs choix au repêchage. La relève était mince.
Aujourd’hui, ils doivent essayer de se rattraper.
« Les effets commencent à se faire sentir, a admis Sweeney. Tu dois être capable de prendre un pas de recul par moments. Savions-nous ce matin que nous allions faire toutes ces transactions? Non. Mais nous étions prêts si on nous offrait quelque chose que nous aimions.
« Malgré tout, c’est une chose difficile à faire. Mais le message est clair : nous n’avons pas démoli l’équipe. »
Marchand, qui va rater trois à quatre semaines d’activités en raison d’une blessure au haut du corps, selon Sweeney, pourrait devenir joueur autonome sans compensation après la saison. Si les deux camps étaient en discussion pour un contrat depuis juillet dernier, les Bruins ont conclu que l’écart était trop grand dans les négociations pour en venir à une entente. Marchand, qui aura 37 ans le 11 mai, a dit qu’il aimerait jouer jusqu’à l’âge de 40 ans, au minimum.
« Il y avait un écart dans nos négociations, et ce, dès le jour 2 de l’ouverture du marché des joueurs autonomes en ce qui a trait à ses intentions et à la durée (du contrat). Il y a toujours eu un désaccord au sujet de la durée. Nous pensions que nous avions été capables de nous rejoindre, mais encore une fois, un joueur a tout à fait le droit d’aller voir ce que le marché peut lui offrir et ce qui est le mieux pour lui. Je dois toujours respecter ça. »
Ç’a conduit Sweeney à « prendre la très, très difficile décision d’offrir une autre chance à Brad avec une très bonne équipe. Il pourra ensuite prendre une décision sur ce qui est le mieux pour lui pour la suite. »
Il a ajouté que la porte n’est pas fermée pour un retour cet été.
L’attaquant a terminé sa carrière à Boston avec 976 points (422 buts, 554 passes) en 1090 matchs, après avoir été repêché en troisième ronde (71e au total) en 2006. Il a pris le quatrième rang de l’histoire des Bruins pour les rencontres jouées et les buts, le sixième rang pour les aides, le cinquième échelon pour les points, le deuxième rang pour les buts vainqueurs (82) et le premier rang pour les buts en infériorité numérique (36).
« Ça remonte à loin pour moi et ça me touche plus profondément que n'importe quel joueur, a affirmé Sweeney. « J'ai eu le privilège de le connaître et de le voir s'épanouir et devenir un membre du Temple de la renommée et l'un des plus grands joueurs des Bruins de tous les temps. C’est une journée difficile sur les plans personnel et professionnel. J’ai dû prendre des décisions très difficiles. »
Avec les choix au repêchage et les espoirs qu’ils ont obtenus vendredi, les Bruins espèrent mettre la main sur une nouvelle vague de talent qui pourra les conduire en séries éliminatoires, ce qui est improbable cette saison. Avant les matchs de vendredi, les Bruins avaient trois points de retard sur la deuxième place de quatrième as, avec trois équipes entre eux et les Sénateurs d’Ottawa.
Ces décisions difficiles sont venues avec des doutes, vendredi. On s’est demandé s’il fallait donner un aussi grand coup.
« Ce sont des questions que tu te poses comme gestionnaire pour tracer le bon chemin, a expliqué Sweeney. Si nous revenons avec le même groupe, est-ce que nous risquons de répéter les mêmes erreurs? Nous sommes-nous suffisamment améliorés? Pouvons-nous continuer à nous améliorer? Tu atteins le point de bascule quand tu prends cette décision et que tu acceptes que tu as eu un bon parcours, mais que tu n’as pas atteint l’objectif ultime.
« Nous étions proches, presque aussi proches que si nous avions joué en prolongation dans ce match no 7 (en 2019 contre les Blues). Ces joueurs sont extraordinaires et ils ont été de vrais Bruins. Maintenant, nous devons trouver une autre vague de joueurs pour voir si on peut revenir à ce niveau. Et je ne pense pas que nous serons très loin de l’équipe compétitive que nous aurions dû être cette année. »
Ce sera une nouvelle version des Bruins qui se retrouvera sur la patinoire samedi pour affronter le Lightning de Tampa Bay au Amalie Arena (15 h HE; ABC, ESPN+, SN1, TVAS). Les Bruins seront une équipe de moindre calibre, une équipe qui va tenter de se rendre jusqu’au bout de la saison, et qui devra affronter un club qui a fait le plein de munitions pour se préparer à un long parcours en séries éliminatoires.
Pendant longtemps, c'est ce que les Bruins ont été. Ce n'est plus le cas aujourd'hui.
Cette époque est révolue.
« Nous allons être jaloux des équipes que nous allons affronter, a imagé Sweeney. Nous avons déjà été dans cette situation où nous ajoutions des éléments. Si nous avions fait notre travail, si j'avais fait mon travail correctement, en ce moment, nous serions en train d'ajouter des joueurs comme ce fut le cas dans les dernières années. »
C'est tout le contraire, et Sweeney a dû téléphoner à ses deux adjoints au capitaine, Pastrnak et McAvoy, vendredi, pour leur annoncer que leurs coéquipiers et amis allaient partir, que l'équipe n'était pas assez bonne et que l'avenir n'était pas reluisant.
Sweeney n'a pas voulu divulguer le contenu de ces conversations, mais il serait facile de croire que McAvoy, qui avait exprimé lors de la dernière saison morte qu'il était temps pour cette génération de joueurs des Bruins de gagner la Coupe, ne doit pas être très heureux de cette nouvelle direction. Il a d'ailleurs publié un message sur Instagram avec des coeurs brisés à la suite des nombreux départs de l’après-midi.
« Nous savons qu’il s’agit en quelque sorte d’un pas en arrière parce que nous n'avons pas été à la hauteur de ce que nous devions être cette saison », a dit Sweeney. « Mais l'objectif est de bien faire les choses et de prendre les bonnes décisions pour notre avenir. La journée d'aujourd'hui en fait partie. Nous essayons de faire en sorte que nous soyons de nouveau compétitifs dans un futur rapproché. »