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ANN ARBOR, Michigan – Brandon Naurato a été bien clair avec Michael Hage à l’aube des matchs du week-end contre les ennemis jurés de l'Université Michigan State – deux affrontements en deux jours contre la meilleure équipe au pays qui marquaient officiellement le passage à la deuxième moitié de saison.

« Je lui ai dit un peu à la blague qu’il n’est plus un joueur de première année désormais », lance l’entraîneur des Wolverines de l’Université du Michigan dans les bureaux du mythique Yost Arena. « Il a appris à gérer son temps, à bâtir une routine, à suivre ses cours et à bien gérer les exigences du programme de hockey.

« On veut qu’il joue son meilleur hockey en deuxième moitié. Il a été bon, mais on a besoin qu’il élève son niveau de jeu d’un cran. Si on lui en demande beaucoup, c’est parce qu’on sait qu’il peut en prendre. C’est dans des affrontements comme ceux-là qu’on va vraiment voir de quel bois il se chauffe. »

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Dans un environnement où sont placardés sur les murs les noms de la centaine d’anciens qui ont fait leur chemin jusqu’à la grande ligue, il ne faut pas se surprendre d’entendre un entraîneur en demander plus de la part d’un attaquant de première année qui mène l’équipe offensivement.

Avec sa récolte de 11 buts et 24 points en 21 matchs, l’espoir des Canadiens de Montréal a fait sa part. Mais il a eu un avant-goût de ce qui l’attend dans les prochains mois lors des matchs contre Michigan State.

Yost Arena

Surveillé étroitement, Hage a été blanchi lors des deux affrontements – sa plus longue disette de la saison. Il a tout de même aidé les siens à partager les honneurs de la série grâce à une victoire en prolongation devant les Children of Yost, groupe autoproclamé des « meilleurs fans du hockey universitaire », vendredi.

Cela survient alors qu’il commence enfin à être « à cent pour cent » pour la première fois de la saison, a révélé le pilote. Le jeune homme traîne un bobo depuis le début du calendrier.

« C’est vraiment quelque chose d’impressionnant pour un joueur de son âge », souligne Rob Ramage, le directeur du développement des joueurs du CH, croisé dans les gradins. « Il réussit à faire ça contre des joueurs plus vieux à ce niveau, dans une section très compétitive. Il a été à la hauteur. »

Mais ce n’est pas tout à fait assez. D’un point de vue collectif, du moins.

C’est que les Wolverines ont vu quatre de leurs cinq attaquants les plus productifs faire le saut chez les professionnels au terme de la dernière campagne – Gavin Brindley, Rutger McGroarty, Dylan Duke et Frank Nazar. Un signe des succès du programme, auquel on a soutiré un peu du soutien qu’Hage devait obtenir.

« Quand je suis arrivé ici, Brandon m’a dit que ce serait une occasion pour certains gars d’en prendre plus », raconte Hage, encore dans son équipement, après l’entraînement des siens. « Il voulait que je sois l’un de ces gars. Il m’a dit que si on voulait connaître du succès, il faudrait que je joue un grand rôle.

« C’est juste un défi pour moi. Ça m’a motivé et ça m’a permis d’avoir un impact encore plus gros. C’est une bonne situation quand tu arrives quelque part et que tu es utilisé à presque toutes les sauces. »

Il s’agit cependant d’une situation assez inhabituelle au sein de ce prestigieux programme : « On est habitués à avoir quatre ou cinq gars comme Michael », avoue Naurato qui en est à sa deuxième saison complète comme entraîneur-chef. C’est toutefois la main qui lui a été donnée, cette année.

Dans le camp montréalais, on est loin de se plaindre de ce coup du sort.

« Les meilleurs joueurs deviennent souvent l’homme de confiance assez rapidement, fait remarquer Ramage. Ils apprennent à vivre avec cette étiquette. Ce n’est pas du tout un désavantage. J’ai soupé avec Michael, hier. C’est un jeune homme très solide, très motivé. Tout le monde le voit.

« On le voit dans son sens de la compétition. Il est amusant à voir jouer. Il est talentueux et il a ce sens du jeu que plusieurs auraient voulu avoir à mon époque! »

Sur ses épaules

C’est entre autres choses ce qui a permis au choix de premier tour du Tricolore au dernier encan de rapidement franchir la marche entre la USHL et la NCAA. La transition aurait pu être plus ardue, mais l’Ontarien de 18 ans a poursuivi sur les succès qu’il avait connus avec le Steel de Chicago la saison dernière.

« Chaque fois que je vais passer d’un niveau à un autre, les gars seront plus gros, plus forts et plus rapides, souligne le principal intéressé. Mais une chose qui reste la même, c’est ma vitesse d’esprit. Le gros de l’adaptation, c’est la vitesse à laquelle tu peux comprendre le jeu qui est devant toi. Je le fais assez bien. »

Hage

Hage n’a laissé aucun doute là-dessus en terminant son premier week-end d’activités avec un but et trois mentions d’aides en deux matchs contre l'Université Minnesota State.

« Ce qui m’a sauté aux yeux dès le départ, c’est son niveau de compétition, répond l’entraîneur. Puis quand il a la rondelle sur son bâton, il a la capacité de créer à partir de rien, un peu comme Lane Hutson. Ce sont des joueurs différents, mais quand il n’y a rien qui se passe, ils sont capables de générer l’étincelle. »

Ramage était sur place pour voir son poulain à l’œuvre à ses débuts dans la NCAA.

« Je ne l’avais vu qu’au camp de développement avant ça, se souvient-il. Après ces matchs, je me suis dit : ‘’OK, on a probablement quelque chose de bon ici.’’ Il a joué avec beaucoup de confiance dès le départ. »

Trois mois plus tard, le jeune Hage n’a rien perdu de cette confiance. Il n’a fait qu’en gagner. Et son entraîneur espère que sa progression atteindra un autre niveau puisque les Wolverines (14-9-1) espèrent toujours se hisser parmi l’élite du pays, eux qui se tiennent en milieu de peloton au classement général.

« Il a plus d’un point par match en jouant contre les meilleurs trios adverses tous les soirs, vante Naurato. Il gère bien ça, et je suis convaincu qu’il peut en prendre plus. En deuxième moitié, il sera marqué encore davantage parce que nous n’avons pas deux ou trois gros trios. C’est lui. Et c’est une bonne chose pour lui.

« Notre équipe ira aussi loin qu’il nous mènera, avec et sans la rondelle. »

Un joueur de « 150 points »

Avec tout ce qu’il a vu de la part de Hage depuis qu’il est débarqué à Ann Arbor, Naurato se gratte encore la tête quand on lui demande s’il a été surpris que le jeune homme ne reçoive même pas d’invitation pour le camp de sélection d’Équipe Canada junior, en décembre.

« Très surpris. Très, très surpris, rétorque-t-il. C’est extrêmement difficile de faire ce qu’il fait en ce moment contre des joueurs de 22, 23 et 24 ans. Je ne veux pas exagérer, mais s’il jouait dans la Ligue canadienne, il amasserait probablement 150 points. Je suis biaisé, certes, mais il aurait dû faire partie de cette équipe.

« Je pense qu’il y a plusieurs bons joueurs qui ont été laissés de côté. »

L’état-major de la formation canadienne a d’ailleurs vivement été critiqué après un tournoi catastrophique, qui s’est conclu par une élimination en quarts de finale. Le principal intéressé, lui, esquisse un petit sourire quand on lui demande s’il pense qu’il aurait eu sa place au sein de cette équipe.

Il reste toutefois diplomate puisqu’il aura une autre occasion d’y participer, l’an prochain.

« Chaque fois que tu as une chance de représenter ton pays, tu espères recevoir l’appel, philosophe-t-il. Ils ont choisi de prendre une autre direction et ils pensaient avoir les gars qui leur donneraient la meilleure chance de gagner. Ce serait cool d’y être l’an prochain, ce serait un privilège.

« Tout ça, c’était hors de mon contrôle. Je croyais avoir eu un assez bon début de saison, alors ç’a été un peu décevant. J’ai réussi à tourner la page rapidement. Ça peut être un facteur de motivation, mais quand j’enfile ce chandail et que je saute sur la patinoire du Yost Arena, je n’en ai pas besoin de plus. »