DAUPHIN BADGE LEPAGE

LAVAL – Laurent Dauphin aurait pu s’accrocher à l’espoir de rejouer un jour dans la LNH et tenter de se dénicher une entente à deux volets à l’une des 31 autres adresses du circuit.

Mais l’attaquant québécois en est à un stade de sa carrière où la stabilité, sous toutes ses formes, et le désir d’évoluer près de la maison ont plus de poids dans la balance décisionnelle. Il n’a donc pas hésité bien longtemps avant d’apposer sa signature au bas d’un contrat d’un an à un volet avec le Rocket de Laval, en juillet.

Il semble que c’était la bonne décision. Il vient de connaître la saison la plus productive de sa carrière – 26 buts et 56 points en 63 matchs – et il mène les siens avec six points en quatre matchs depuis le début des séries de la Ligue américaine.

« La stabilité a été une grosse partie de la saison que j’ai eue », a confié le Repentignois de 30 ans vendredi, au terme de l’entraînement du Rocket, qui se prépare pour la série finale de la section Nord face aux Americans de Rochester.

« Ça aide de ne pas te poser de questions, de ne pas avoir de doutes, de ne pas regarder les matchs des Canadiens en se demandant s’il y a des blessés, si tu as une chance d’être rappelé. Même de ne pas te comparer aux autres joueurs de l’équipe. De ne pas avoir tout ça dans la tête, c’est gros. »

Dauphin avait eu un avant-goût de ce sentiment de légèreté, l’an dernier, quand il a décidé d’aller jouer dans la Ligue nationale suisse pour une saison, pendant le congé de maternité de sa conjointe. Il a voulu recréer ça en revenant dans l’organisation pour laquelle il a évolué entre 2019 et 2022.

Pour s’y donner accès, il a fait une croix sur la grande ligue après y avoir disputé 38 matchs dans l’uniforme des Canadiens en 2021-22 et 21 autres avec les Coyotes de l’Arizona la saison suivante. Il a ainsi pu plonger à fond dans son nouveau rôle de grand frère et de « bon vétéran » à Laval.

« J’ai eu de longues conversations avec lui, a raconté l’entraîneur-chef Pascal Vincent. Je voulais savoir comment il approchait la saison avec un contrat à un volet, et ce qu’il voulait faire de sa carrière. On a discuté de comment il pouvait devenir un joueur qui aide à développer les jeunes pour l’organisation. »

« C’était ma mentalité à partir de l’été, a fait valoir Dauphin. Je voulais être un leader avec les jeunes de l’équipe et vraiment jouer mon rôle, pas seulement sur la glace. Je suis content de l’avoir accompli. »

De nature plus discrète, il a manifestement donné l’exemple avec son rendement sur la glace. Il a aussi conseillé les jeunes pousses de l’organisation grâce à toute l’expérience qu’il a emmagasinée au fil des années, et de ses escales aux quatre coins de la Ligue américaine.

« Il a été incroyable pour nous, a souligné l’attaquant Joshua Roy. Il est un vétéran très important en séries, et il démontre qu’il apporte beaucoup à l’équipe. […] Il a vécu beaucoup d’expériences. Dans une équipe aussi jeune, ça prend des gars comme lui qui savent ce que ça prend pour gagner dans cette ligue. »

« La constance dans ses performances, c’est l’aspect de son leadership qui a été le plus important pour moi, a affirmé Vincent. Les jeunes ont vu comment un plus vieux fait ça. »

La tête à la bonne place

Dauphin semble bien aimer son nouveau rôle, mais encore plus la mentalité qu’il lui permet d’adopter, désormais. Il n’a pas oublié la LNH – « pourquoi écarter la possibilité d’un retour? » – mais le fait que son cœur et sa tête soient au même endroit, au même moment, est visiblement bénéfique.

« Peut-être que ça l’a aidé, a réfléchi Vincent. Dans son cas, il a vécu la LNH, il y a joué des matchs. Ce n’est pas le cas d’un plus jeune qui est sur un contrat à deux volets ou qui espère l’obtenir. Pour Laurent, (la situation) était claire, et ça lui a permis de garder le focus à la bonne place. »

Alex Barré-Boulet, qui a joué les deux premiers matchs de la saison à Montréal avant d’être rétrogradé définitivement, peut imaginer les bienfaits de la situation contractuelle de son compatriote.

« C’est peut-être un peu plus facile mentalement dans le sens où tu ne te bats pas pour monter, a-t-il remarqué. Tu sais que tu vas être ici toute l’année. Tu en profites plus aussi. Tu n’as pas à te soucier des rappels, qui causent parfois des déceptions dans le vestiaire. »

Maintenant que les Canadiens sont éliminés, ce n’est plus un enjeu. À l’instar de Dauphin, tous les hommes de Vincent ont le cœur et la tête à Laval. Ils n’ont plus qu’un objectif collectif en tête : la Coupe Calder.

« Ce serait un bel accomplissement, a affirmé Dauphin. Avec l’équipe, les gars et la chimie qu’on a, ce serait vraiment le fun de tous accomplir ça ensemble et de finir notre saison pour une bonne note. »

S’il aide à guider cette jeune équipe vers la terre promise, de la même manière qu’il l’a menée au championnat de la saison régulière, Dauphin aura une liste de bons arguments qui pourraient l’aider à prolonger son association avec l’organisation au-delà de cette campagne.

« J’aimerais ça, c’est un jeu de négos », s’est-il limité à dire. Mais son sourire valait mille mots.