laperriere badge marcotte

Notre chroniqueur Anthony Marcotte nous parle de l’actualité chez le Rocket de Laval ainsi que dans l’ensemble de la Ligue américaine de hockey (LAH). Il permettra aux partisans de suivre assidûment ce qui se passe dans l’antichambre de la meilleure ligue de hockey au monde.

Le chemin emprunté par Ian Laperrière dans sa carrière d'entraîneur est à contre-courant de ce que l'on voit habituellement. Après huit saisons comme entraîneur adjoint avec les Flyers de Philadelphie, il a accepté le poste d'entraîneur-chef du club-école de Lehigh Valley, avec qui il amorce sa troisième saison.

Les amateurs de hockey de la Belle Province ont pu constater vendredi dernier lors du passage des Phantoms à la Place Bell que la fougue qui habitait l'attaquant québécois au cours de sa carrière de plus de 1000 matchs dans la LNH n'a pas disparu lors de son passage derrière le banc. Le sympathique entraîneur âgé de 49 ans a écopé d'une inconduite de partie à la fin du match, alors que son équipe était passée à un cheveu d'échapper une avance de trois buts dans les trois dernières minutes du match en raison d’une pénalité majeure appelée par les officiels. Joel Armia est venu bien près de marquer le but égalisateur à la toute dernière seconde après que le Rocket eut marqué deux buts rapides pour tenir les spectateurs sur le bout de leur siège jusqu’à la fin. Dans tous ses états, Laperrière ne s’est pas gêné pour faire savoir son mécontentement aux arbitres en quittant la patinoire, ce qui lui a valu d'être pénalisé.

« Je suis un gars émotif. Je l’étais comme joueur, et je le suis tout autant comme entraîneur», a prophétiquement confié Laperrière, à quelques heures du duel entre les Phantoms et le Rocket. «Je pense que mes joueurs apprécient cette facette de ma personnalité. Le hockey, c’est ma vie et je prends ça à cœur. »

Ian Laperrière a accepté de se confier à LNH.com en cinq questions.

Ian, tu nous rejoins pour une entrevue après avoir couru chacun des gradins de la Place Bell pendant que ton équipe prenait part à son entraînement matinal d’avant-match. C’est quelque chose que tu fais souvent?

J’essaie de prêcher par l’exemple, un peu comme un papa avec ses joueurs. On parle beaucoup de préparation mentale aujourd’hui et c’est un peu pour ça que je le fais. Ça me garde sain (d’esprit). Quand je sais que j’ai fait mon entraînement et que j’ai sué dans ma journée, je suis pas mal plus calme sur le banc. Les gars sont contents quand je le fais parce qu’ils savent qu’ils vont avoir le Lappy plus calme pour les diriger.

J’apprends tous les ans. C’est ma troisième comme entraîneur-chef et j’essaie de mieux me contrôler. L’important est d’apprendre de ses erreurs. Je demeure un gars émotif et ce n’est pas à mes 50 ans en janvier que ça risque de changer! (rires)

Parlant d’émotions, le Rocket tient une soirée spéciale ce soir pour sa thématique « Le hockey contre le cancer », une cause qui te tient à cœur.

Ça replace les idées au bon endroit. Souvent, on pense que c’est la fin du monde quand on perd un match. Quand tu prends part à une journée comme ça, ça te ramène à la réalité. 

Tout le monde est touché par le cancer. J’ai moi-même perdu mon papa à l’âge de 55 ans d’un cancer du pancréas. Il est toujours avec moi, surtout quand je suis à Montréal, que ce soit comme joueur ou comme entraîneur. On était très proches. C’était un vrai mordu de hockey. Il a travaillé au Forum dans le temps et mes grands-parents ont eu des billets de saison des Canadiens pendant 25 ans. C’est beaucoup pour moi de revenir à Montréal, mais malheureusement mon père n’est pas là pour assister à ça. Au moins, je le sais qu’il est avec moi.

Tout ça pour dire que si la grande famille du hockey peut faire sa part pour conscientiser les gens à ne pas hésiter à consulter pour tenter de prévenir la maladie, ce sera déjà ça de gagné. C’est une soirée spéciale qui ne peut pas tomber à un meilleur moment quelques jours après le décès d’un grand de la chanson au Québec, Karl Tremblay.

Tu es ami avec Daniel Brière depuis de nombreuses années. Vous gravitez dans l’organisation depuis longtemps et plusieurs le voyaient un jour obtenir le rôle qu’il occupe aujourd’hui comme directeur général. Qu’est-ce que ça a changé à votre relation qu’il devienne ton patron?

C’est spécial, sauf qu’on le voyait venir. Comcast l’a vraiment pris sous son aile en l’envoyant étudier dans l’une des plus prestigieuses universités de Philadelphie. Il a ensuite eu la chance de diriger l’équipe de Portland (dans l'ECHL). Il a davantage gravité autour de mon équipe dans les deux dernières années qu’il ne le fait aujourd’hui dans ses nouvelles fonctions. 

On se parle toutes les semaines, Danny et moi. Je savais qu’un jour il obtiendrait le job qu’il convoitait. C’est tellement la bonne personne dans cette chaise-là. On n’a même pas besoin de parler de son CV comme joueur. C’est d’abord avant tout un gars extrêmement calme et c’est une qualité très précieuse quand tu deviens directeur général. 

Je dis souvent aux gens qui m’entourent que je ne me verrais pas directeur général parce que je suis beaucoup trop émotif. Tu sens qu’il a un plan et il ne changera pas de direction. Présentement, l’équipe va bien, mais tu peux être certain que son plan ne changera pas. 

Danny, c’est mon chum. Je ne vous cacherai pas qu’on est très proches. On voyage ensemble, on joue au golf ensemble, et on ne parle pas toujours de hockey entre nous deux. Mais un point demeure, on a tous les deux un job à faire et si je ne fais pas la mienne, il n’aura pas le choix de me mettre dehors un jour, qu’on soit des chums ou pas. Un coup que tu sais ça, ça va bien aller.

Il a tout de même toute une commande de bâtir un club champion à Philadelphie, d’autant plus que les autres clubs majeurs en ville ont connu du succès récemment. Les Eagles ont gagné le Super Bowl en 2018 et viennent de perdre en finale, les Phillies ont gagné la Série mondiale en 2008 et ont perdu la finale en 2022, les 76ers ne se sont pas rendus jusqu’au bout, mais sont passés relativement proche eux aussi. Pendant ce temps, les Flyers ont connu beaucoup de difficultés dans un marché presque sans pitié pour ses équipes sportives.

Tu as raison, à Philadelphie il y a beaucoup de compétition dans le sport. On a les quatre sports majeurs. À Montréal, tu as les Canadiens et sans vouloir manquer de respect aux Alouettes et au CF Montréal, ils ne font pas partie des plus grosses ligues au monde.

C’est certain que Daniel a cette pression-là de faire sa place dans un marché aussi compétitif. S’il y a une chose que les gens de la place apprécient, c’est une équipe qui travaille. Il faut que je lève mon chapeau à John Tortorella là-dessus, parce que ses équipes travaillent très fort depuis deux ans. Ce n’est jamais facile de venir jouer contre les Flyers. Avec les retours de Sean Couturier et Cam Atkinson cette année, ils ont continué de bâtir leur éthique de travail. On avait eu des bons signes l’année passée. Tout part de l’entraîneur, qui a poussé ses joueurs dès le camp d’entraînement et qui continue de le faire tous les jours.

Elliot Desnoyers a écrit une belle histoire dans l’organisation l’an dernier en parvenant à disputer ses premiers matchs dans la LNH après avoir été un modeste choix de cinquième tour en 2020. Malheureusement, il a dû manquer la seule visite de ton club à Laval en raison d'une blessure. Qu’est-ce que tu peux nous dire sur lui?

C’est vraiment décevant pour lui. J’ai été joueur, et je sais ce que c’est de revenir à Montréal et jouer devant ta famille et tes amis. Au moins, il est du voyage et a pu passer un peu de temps avec sa famille. Heureusement, ce n’est rien de grave et il patine tous les jours. On devrait le revoir sous peu.

Il faut qu’on soit prudent dans tout ça. La saison est encore jeune et il nous encore 59 matchs à jouer. C’est sûr qu’il veut jouer, et je le sais. C’est un petit compétiteur et il veut faire partie de la solution. J’ai pris le temps de m’asseoir avec lui pour lui faire comprendre qu’il serait plus sage d’attendre un peu. Je sais ce que c’est, car je suis passé par là. Son futur est notre priorité, c’est ça qui compte.