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MONTRÉAL – Demandez à Jeff Gorton ce qui l’impressionne le plus chez les Canadiens de Montréal, et le vice-président exécutif des opérations hockey nommera une chose en particulier.

« La progression », a répondu Gorton à LNH.com lors d’une entrevue téléphonique samedi.

Gorton ne disait certainement pas ça le 14 décembre dernier, après une défaite de 4-2 contre les Jets de Winnipeg qui a conféré aux Canadiens un dossier de 11-16-3, un pourcentage de points de ,417 et le 29e rang de la LNH.

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Noël approchait, la Confrontation des 4 nations aussi, et la saison des Canadiens semblait déjà à l’eau.

« Quand tu rebâtis et que la saison commence, tu espères que l’équipe va aller en s’améliorant et pourra rivaliser pour une place en séries, a dit Gorton. Nous avons connu un départ tellement difficile qu’on ne savait pas dans quelle direction ça irait. L’équipe a trouvé une façon de revenir dans le coup en décembre et de bien jouer dans la dernière ligne droite de la saison lors de plusieurs matchs importants. Ç’a été vraiment plaisant de voir le groupe s’améliorer sans cesse. À un certain point de la saison, on dirait que les gars sont devenus tannés de perdre et qu’ils se sont ralliés. C’était beau à voir. Marty (St-Louis, l’entraîneur) a fait tout un travail pour confier un rôle à chaque joueur dans cette équipe. Les gars ont vraiment acheté ce qu’il proposait, et on voit aujourd’hui comment toutes les pièces du casse-tête s’assemblent. Ç’a été une bonne saison. »

Elle se poursuit pour les Canadiens, qui joueront dimanche le match no 4 de leur série de première ronde contre les Capitals de Washington au Centre Bell (18 h 30 HE; TVAS, CBC, SN, TBS, truTV, MNMT, MAX).

Ils viennent de signer une victoire de 6-3 dans le match no 3, vendredi, et ils ont réduit l’écart à 2-1 dans la série. Ils n’ont pas perdu en temps réglementaire à la maison depuis le 9 février, terminant la saison régulière avec un dossier de 10-0-2 à domicile.

Mais les Canadiens n’ont pas seulement gagné le match no 3. Ils ont pratiquement dominé du début à la fin, ayant l’avantage 40-21 au chapitre des tirs et 81-45 pour les tentatives de tir.

Chaque membre du premier trio des Canadiens – Nick Suzuki, Juraj Slafkovsky et Cole Caufield – a marqué. Le trio a décoché 19 lancers, dont 11 par Caufield.

L’ambiance était électrique dans le Centre Bell. Les Canadiens ont frappé, dominant 45-26 au chapitre des mises en échec, et les « Olé! Olé! Olé! » ont accompagné l’équipe dans cette autre victoire à domicile.

Gorton et le directeur général Kent Hughes ont été témoins de tout ça avec bonheur, tout en se demandant quelle est la suite pour cette équipe qu’ils ont bâtie. Jusqu’où peuvent-ils aller? Quel bilan fera-t-on de cette saison?

Ça fait partie des sujets dont Gorton a discuté avec LNH.com lors d’une entrevue téléphonique de 15 minutes samedi après-midi. Voici une série de questions-réponses avec l’une des deux têtes dirigeantes des Canadiens.

L’embauche de St-Louis aurait pu être risquée puisqu’il n’avait pas d’expérience dans la LNH. Qu’est-ce qui t’a fait croire qu’il était l’homme de la situation et qu’observes-tu chez lui actuellement?

« C’est quelque chose d’assez unique parce que Kent et moi avions un historique avec lui et nous le connaissions. Nous l’avons eu comme joueur à New York, où nous avons appris à le connaître et à comprendre sa vision du hockey et sa passion. On a pu voir qu’en peu de temps, ses coéquipiers se sont ralliés autour de lui. On sentait le respect à son endroit. Il a connu tout un parcours avec nous à New York. Kent a vécu une expérience différente en le côtoyant lui aussi. Leurs enfants ont joué ensemble, et ils ont passé beaucoup de temps à discuter de hockey. Nous connaissions donc très bien la personne qu’il était. »

« Mais ça ne me surprend pas. C’est un gars qui est ''all-in'' dans tout ce qu’il fait. Sa façon de voir le hockey s’agençait bien avec ce que nous voulions faire. Nous devions reconstruire l’équipe. Nous devions créer cet environnement différent dans le développement des joueurs, miser sur la jeunesse, reconnaître que nous ne serions pas excellents dès le début. Son niveau d’énergie allait certainement nous aider. Il a vécu toutes les situations.

« Nous racontons toujours l’histoire. La première fois qu’il a parlé à l’équipe après que nous l’ayons embauché, il a beaucoup parlé du fait qu’il "n’y a personne dans ce vestiaire avec qui je ne peux pas m’identifier. J’ai été laissé de côté. J’ai joué dans les mineures. Puis j’ai été un bon joueur. J’ai été un joueur de quatrième trio. J’ai été un joueur de troisième trio. Puis je suis devenu un très bon joueur. Puis je suis devenu un MVP (joueur le plus utile à son équipe). J’ai gagné la Coupe Stanley." Il possède cet atout de pouvoir s’identifier à tout le monde. C’est unique de voir un entraîneur qui peut comprendre ses joueurs sur autant de facettes différentes. »

Quand on commence une reconstruction, on ne sait jamais combien de temps ça va prendre. Ce passage à la prochaine étape, celle d’être une équipe de séries, est-il survenu au moment où vous l’aviez anticipé ou survient-il plus rapidement que vous l’aviez imaginé quand vous avez entamé le processus il y a trois ans?

« Je pense que ç’a été plus vite que prévu. Quand tu entames ce genre de chose, qu’on l’appelle reconstruction ou réinitialisation, tu t’attends à ce que ça prenne beaucoup de temps, mais tu espères le contraire. Publiquement, tu vas toujours dire que la patience est de mise, mais dans les réunions et dans tout ce que nous analysons, nous espérons être en mesure de devancer les échéanciers. Il faut vraiment donner du crédit à Marty pour avoir été en mesure de faire en sorte que son équipe joue aussi bien dans cet environnement aussi rapidement, pour avoir été rassembleur et pour avoir continué d’y croire. Il a été incroyable avec ces gars-là, il les a guidés et les a suivis chaque jour. C’est génial à voir. »

Vous avez nommé Nick Suzuki capitaine le 12 septembre 2022. Il avait alors 23 ans. Que voyiez-vous en Nick à ce moment et qu’avez-vous vu depuis?

« Pour moi, le meilleur aspect dans le cas de Nick est que nous pouvons le voir s’améliorer au quotidien. Depuis que je suis ici, il est meilleur à chaque saison, et je ne parle pas d’une amélioration marginale. Il s’améliore dans toutes les facettes du jeu. On le voit avec les points, mais récemment, alors que nous devions gagner tous nos matchs après les 4 nations pour espérer nous qualifier, il a été le principal acteur. Il a été l’un des meilleurs joueurs de la ligue et il a transporté l’équipe sur son dos.

« Mais maintenant on voit aussi son évolution en dehors de la glace. On le voit par sa relation avec ses coéquipiers. Il parle davantage et il fait toutes ces petites choses. C’est vraiment difficile de s’améliorer chaque jour dans cette ligue et il le fait dans un environnement où il y a énormément de pression. »

Parlant du retour de la pause des 4 nations, corrigez-moi si je me trompe, mais il y aurait eu un défi présenté par l’état-major aux joueurs, selon lequel ils devaient gagner des matchs s’ils voulaient que l’équipe ne s’affiche pas dans le camp des vendeurs avant la date limite des transactions. N’était-ce pas un moment déterminant où les joueurs ont su faire leurs preuves?

« Je pense que oui. Nous avons eu plusieurs conversations avant la pause en ce qui concerne ce que nous allions faire. Quelles sont nos attentes? Quelle est la valeur de nos joueurs? Et nos joueurs se sont tenus et ont dit : "Nous pensons avoir une bonne équipe, nous ne voulons pas être dans le camp des vendeurs chaque année. Devons-nous encore nous retrouver dans cette situation? Donnez-nous une chance." Évidemment, Marty voyait les choses de la même façon. Quand nous sommes revenus des 4 nations, nous avons aligné des victoires et les gars ont vraiment commencé à se serrer les coudes. Nous voyions où ça pourrait nous mener, alors la décision a été beaucoup plus facile à prendre.

« C’était déjà formidable d’être dans le 'mix', mais maintenant nous avons la chance de jouer des matchs de séries. C’est important de nous retrouver dans cet environnement pour nous rendre à destination. »

Ces séries sont-elles la cerise sur le gâteau, ou les attentes envers cette équipe sont encore plus élevées?

« Nos joueurs rehaussent la barre chaque jour, donc je ne veux pas fixer de limite quant à leurs capacités. Présentement, nous y allons un jour à la fois. Nous voulons voir de l’amélioration et c’est le cas présentement. C’est réellement plaisant. »

Qu’est-ce que l’équipe peut tirer de ce parcours, qu’importe sa durée?

« Jouer dans un tel environnement revêt une grande valeur pour notre équipe. Y avoir goûté ne peut que nous aider à l’avenir. Et qui sait ce que se trouve derrière les portes qu’ils défoncent jour après jour? Nous approchons chaque chose en son temps, en pensant au prochain match, mais lorsque nos séries seront terminées, nous pourrons prendre le temps d’apprécier ce que nous aurons vécu et peser l’importance de cette expérience dans le développement de notre équipe. »

Le succès que vous avez connu cette saison change-t-il vos plans en vue de la prochaine saison morte?

« Oui, à certains égards. Plusieurs joueurs nous ont montré, par leur niveau de jeu, qu’ils veulent demeurer ici, faire partie de ce projet, et nous les comprenons. Nous devons aussi comprendre la volonté de nos jeunes vedettes d’évoluer pour une équipe de séries. Au bout du compte, nous voulons bâtir une équipe qui va se battre pour la Coupe Stanley année après année. L’objectif au bout de notre plan demeure le même, et les succès actuels de l’équipe aident la cause. »

Pensiez-vous que Lane Hutson allait être aussi bon?

Je dois donner tout le crédit du monde à nos dépisteurs car non seulement ils pensaient qu’il allait être bon, mais aussi car ils ont calculé que nous avions une réelle chance de pouvoir le choisir au 62e échelon et en tant qu’ancien dépisteur, je respecte ça. Avec le recul, nous aurions pu le choisir avant, mais quoi qu’il en soit, ç’a fonctionné et depuis son arrivée à Montréal, il ne montre que du positif. C’est plaisant de le voir se développer. Il est très humble et très talentueux, en plus de s’être bien intégré au reste du groupe. »

Depuis votre arrivée à Montréal, on vous a posé beaucoup de questions sur le repêchage, le développement et le futur. À l’exception de quelques espoirs, les fondations de votre plan sont-elles déjà à Montréal? Sont-elles arrivées? Est-ce le groupe avec lequel les Canadiens croient aller loin?

« Oui, je crois. Je vois un noyau qui sera ensemble pour longtemps. (Vendredi) soir, tous les membres de notre première unité d’avantage numérique avaient 25 ans ou moins. C’est emballant. Est-ce que ce sera exactement notre équipe? Ça reste à voir. Un jeune noyau qui a connu une bonne saison et qui devrait encore en avoir pour plusieurs bonnes années, c’est encourageant, mais le plus grand défi dans cette ligue est de récidiver.

« C’est difficile de célébrer lorsque tu sais que tu dois recommencer la saison suivante. Dans la LNH, tu ne peux pas t’asseoir sur tes succès, car demain est un autre jour. »