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ELORA, Ontario – Tard jeudi soir, plusieurs des meilleurs espoirs du repêchage de la LNH se trouvaient sous les projecteurs de la très glamour ville de Los Angeles à la veille de la journée la plus importante de leur vie. Pendant ce temps, Brady Martin se trouvait dans l’obscurité et tentait de rassembler des vaches.

Ses vaches.

Sans trop qu’il sache comment, certaines des bêtes se sont échappées de la ferme familiale pour trouver refuge sur une route avoisinante, ce qui n’est pas optimal pour du bétail.

Ou pour les gens qui circulaient à voiture dans ce secteur du sud de l’Ontario ce soir-là.

« Ça fait partie du métier », a confié l’attaquant de 18 ans quelques instants après avoir été repêché par les Predators de Nashville. « Quand des problèmes comme celui-là surviennent à la ferme, il faut trouver des solutions.

« C’est ce que nous faisons. Ça montre qui nous sommes. Qui je suis. »

Au lendemain de son épopée pour retrouver son troupeau, Martin a appris qu’il allait prendre la direction du Tennessee.

« C’est difficile à croire », a-t-il admis en secouant la tête avec incrédulité. « Pour quelqu’un qui aime vivre sur une ferme, qui adore la campagne et la musique country, c’est super d’aller dans la capitale du country… »

On peut donc parler de mariage parfait.

Il a grandi sur la ferme familiale dans cette région rurale située à une trentaine de kilomètres au nord de Waterloo. Se lever à 6 heures du matin pour traire les vaches, nourrir les poulets et ramasser du fumier a toujours fait partie de sa vie. Il adorait le hockey, c’est certain, mais il admet ne pas avoir abordé ce sport avec sérieux avant l’âge de 15 ans. Peu importe ce qui se passait de son côté avec le hockey, il s’assurait de toujours revenir à la ferme.

Par conséquent, lorsque les invitations ont été envoyées aux meilleurs espoirs du repêchage 2025 afin qu’ils se présentent en personne au Peacock Theater de Los Angeles, les Martin ont décidé de célébrer la grande journée de Brady à la ferme avec sa famille et ses amis.

Le domicile des Martin avait été préparé avec une centaine de chaises pour leurs invités à l’extérieur, dont une réservée pour son agent, Cam Stewart, et une autre pour son gourou de condition physique, Matt Nichol. Du café était servi sur une table à l’arrière d’une camionnette. Des bouteilles d’eau froide pouvaient être récupérées dans la pelle d’un tracteur.

Le meilleur restait à venir.

Devant le parterre d’invités, rassemblés sur une pelouse parfaitement entretenue sur le côté de la maison, un écran géant était suspendu en hauteur dans la pelle d’un immense tracteur. Derrière l’écran, on pouvait distinguer un magnifique étang où des cygnes gonflables avaient été ajoutés, ainsi que des champs où les vaches pâtissaient, remises de leurs émotions liées à leur escapade de la veille.

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« C’est ici que je veux être, a affirmé Brady. Avec les gens qui ont été à mes côtés tout au long de mon parcours. »

Assis dans la première rangée entre ses parents, Sheryl et Terry, Brady a regardé avec attention les quatre premiers joueurs être sélectionnés. Chaque fois qu’un nom était annoncé, la foule réagissait avec des applaudissements.

Martin a récolté 72 points (33 buts, 39 passes), huit buts en avantage numérique et trois buts en infériorité numérique en 57 matchs cette saison avec Sault Ste. Marie dans la Ligue de hockey de l’Ontario. Il a aussi été élu Joueur le plus travaillant de l’Association de l’Ouest dans le cadre d’un scrutin mené auprès des entraîneurs de la OHL. Il s’agit de l’une des raisons pour lesquelles les observateurs avançaient que plusieurs équipes avaient en haute estime le joueur de centre, qui était répertorié au 11e rang du classement final du Bureau central de dépistage de la LNH parmi les patineurs nord-américains.

Dans leur dernier repêchage simulé pour LNH.com, les collègues Mike G. Morreale et Adam Kimelman le voyaient être sélectionné au neuvième rang par les Sabres de Buffalo. Certains membres de la famille et amis de Brady pensaient même qu’ils pouvaient être choisis aussi tôt qu’au sixième rang par les Flyers de Philadelphie.

Les Predators avaient d’autres plans.

Quand le tour de Nashville est arrivé au cinquième échelon, le ciel s’est assombri. Des nuages menaçants ont fait leur arrivée. Si Martin n’était pas sélectionné dans les prochains choix, Dame Nature aurait bien pu gâcher la fête.

Nashville s’est assuré que ça ne se produise pas.

Alors que la foule regardait l’écran, le défenseur du Temple de la renommée Shea Weber est apparu pour faire l’annonce du choix des Predators.

« En provenance de Soo… »

Les acclamations et les cris ont retenti avant même que Weber ne puisse finir son allocution. Brady retenait ses larmes alors que ses parents le prenaient dans leurs bras.

« À la seconde (que Weber) a dit Soo, je savais. C’était irréel, a dit Brady. Je me demandais ce qui se passait. »

Quelques instants plus tard, son téléphone a sonné. Le directeur général des Predators Barry Trotz était au bout du fil.

« Hey "Trotzie", que se passe-t-il? a lancé Brady à son nouveau patron. Merci de prendre un risque avec moi. »

« Nous ne prenons pas de risque, a répliqué Trotz. Nous savons que nous mettons la main sur une très bonne personne et sur un excellent joueur. »

Brady n’a jamais mis les pieds à Nashville. Il a soutenu qu’il possédait un chapeau de cowboy, mais qu’il ne l’avait pas avec lui présentement.

Pendant que ses proches formaient une ligne pour le féliciter, LNH.com a contacté l’attaquant des Predators Steven Stamkos, le futur coéquipier de Martin. Quand le téléphone lui a été passé et que Brady a découvert qui était au bout du fil, il a affiché un sourire semblable à celui qu’on peut voir sur le visage d’un enfant qui découvre la pile de cadeaux le matin de Noël.

« Bienvenue dans l’équipe et dans la LNH, lui a dit Stamkos. Tu vas adorer Nashville. J’ai entendu parler de ton éthique de travail. J’ai hâte de te rencontrer et de sauter sur la glace avec toi. »

Un sentiment partagé.

« Je veux dire, c’est "Stammer", a dit Brady. Qu’est-ce que je peux dire?

« Ça va être génial. »

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Le jeune homme a ensuite dû partir à la course pour participer à un Zoom avec les journalistes de Nashville. Juste à temps, car la pluie venait de s’inviter aux festivités.

Rien pour déranger les amis et la famille, qui se sont réfugiés dans une immense grange, où un festin les attendait pour regarder la fin de la première ronde.

En regardant la scène jubilatoire à l'intérieur, une chose était claire : on était loin de l'ambiance de Los Angeles.

En ce jour mémorable pour Brady et son entourage, ils n'auraient pas voulu qu'il en soit autrement. Et à juste titre.

Car cette ferme est un endroit joyeux.

Même lorsque ces satanées vaches s'échappent sur la route.