Choix de premier tour des Nordiques de Québec au repêchage de 1993, Jocelyn Thibault a disputé 586 matchs au cours de sa carrière de 15 saisons dans la LNH. Il a porté l'uniforme des Nordiques, de l'Avalanche du Colorado, des Canadiens de Montréal, des Blackhawks de Chicago, des Penguins de Pittsburgh et des Sabres de Buffalo, signant 238 victoires. Il a été entraîneur des gardiens de l'Avalanche pendant deux saisons et il est aujourd’hui actionnaire du Phoenix de Sherbrooke dans la LHJMQ. Il collabore depuis plusieurs années avec l'équipe de LNH.com pour traiter des dossiers chauds devant les 32 filets de la Ligue.
Si l’absence de Connor Hellebuyck nous a prouvé une chose, c’est que les Jets de Winnipeg sont une équipe complètement différente lorsque leur gardien numéro un n’est pas dans la formation.
Et les statistiques à cet égard sont assez fracassantes.
Avant que Hellebuyck ne s’absente pendant un peu plus de trois semaines en raison d’une opération à un genou entre le 16 novembre et le 12 décembre, les Jets montraient la neuvième meilleure fiche de la LNH (11-7-0). Ils marquaient aussi en moyenne plus de trois buts par match (3,22), tout en n’en accordant que 2,78.
La chute a été brutale par la suite. Pendant que Hellebuyck était à l’infirmerie, les Jets ont signé seulement trois victoires en 12 rencontres (3-8-1), soit la deuxième pire fiche de la Ligue. Sans surprise, la moyenne de buts accordés est passée de 2,78 à 3,67. Mais ce qui peut étonner, c’est que même l’offensive a piqué du nez, avec seulement 2,67 filets par rencontre.
De quoi refroidir les ardeurs de ceux qui affirmaient que Hellebuyck ne méritait pas de gagner le trophée Hart, remis au joueur le plus utile à son équipe, la saison dernière.
Pour comprendre pourquoi l’absence d’un gardien peut avoir un impact aussi important, y compris offensivement, il faut voir une équipe comme un écosystème. Si tu enlèves un pilier comme Hellebuyck, tout se déséquilibre.
Malgré la présence de vedettes comme Mark Scheifele, Kyle Connor et Josh Morrissey, Hellebuyck demeure le joueur qui personnifie l’identité des Jets. Il est la colonne vertébrale de l’équipe, au même titre qu’un Sidney Crosby chez les Penguins de Pittsburgh ou un Andrei Vasilevskiy chez Lightning de Tampa Bay. Son absence a de toute évidence ébranlé le reste du groupe.
Sans lui, les Jets étaient beaucoup plus fragiles défensivement, ce qui a affecté leur rendement offensif.
Je m’explique : j’accorde une grande importance au moment où un but est accordé dans un match. Ça dicte souvent la façon dont une équipe va jouer pour le reste de la rencontre.
Une équipe ne se comporte pas de la même manière lorsqu’elle accorde un ou plusieurs buts tôt dans le match que lorsqu’elle mène 5-0, par exemple. Tu te retrouves à jouer du hockey de rattrapage, et la dynamique de la rencontre change complètement.
C’est exactement ce qui est arrivé aux Jets, alors qu’Eric Comrie a été propulsé dans la chaise de numéro un. Sur les 11 départs qu’il a obtenus en l’absence de Hellebuyck, Comrie a accordé le premier but à six reprises. Au cours de ces six parties, les Jets ont inscrit en moyenne deux buts par match, montrant un dossier de 0-6-0.
Comrie n’est pas un mauvais gardien, loin de là, mais l’écart avec Hellebuyck est tout de même énorme. Avant les matchs de vendredi, Hellebuyck était à égalité au huitième rang de la LNH avec un pourcentage d’arrêts de ,856 sur les chances de marquer de grande qualité. Comrie, lui, se classait 56e à ,816.
Ce n’est pas donné à tous d’être l’homme de confiance devant le filet au plus haut niveau. Au-delà des habiletés, il faut la bonne approche et le bon état d’esprit. Tu dois être capable d’offrir de la constance et de jouer à un haut niveau dans huit ou neuf matchs sur dix. C’est extrêmement exigeant, et il y a une façon de se préparer pour ça. Les rôles de numéro un et d’auxiliaire sont deux réalités distinctes.
Dans ce contexte, il n’est pas surprenant que Comrie ait connu des difficultés. En l’absence de Hellebuyck, il a conservé un dossier de 3-7-1, une moyenne de buts alloués de 3,53 et un pourcentage d’arrêts de ,877.
Les prochaines semaines seront intéressantes à suivre à Winnipeg. Les Jets se sont creusé un trou sans Hellebuyck et se trouvent à cinq points d’une place en séries éliminatoires. Je crois tout de même qu’ils peuvent revenir dans le coup. Hellebuyck est de retour depuis quatre matchs, et l’équipe a le leadership et l’expérience pour y arriver.
Il faudra toutefois renverser la vapeur rapidement. Le top-3 de la section Centrale semble déjà établi avec les puissances que sont l’Avalanche du Colorado, les Stars de Dallas et le Wild du Minnesota. Winnipeg risque donc de se battre pour l’une des deux places de quatrième as dans l’Association de l’Ouest afin d’obtenir son billet pour le tournoi printanier.


















