LalimePenguins041122

Une carrière dans la LNH est définie par plusieurs événements. Les joueurs actuels et les anciens chérissent un moment particulier, un match ou encore des exploits plus larges. Au cours de notre série hebdomadaire de huit articles « Savourez chaque moment » présentée par Olymel, huit joueurs vont partager une expérience de hockey qui occupe une place spéciale dans leur cœur. Aujourd'hui, l'ancien gardien de la LNH Patrick Lalime.
Jeune gardien d'avenir dans l'organisation des Penguins de Pittsburgh, Patrick Lalime ne devait que venir dépanner l'équipe au début de décembre 1996. Il allait toutefois faire en sorte d'étirer son séjour passablement, au gré des victoires qu'il engrangeait. La page d'histoire qu'il allait écrire figure toujours dans le livre des records de la LNH, 25 ans plus tard ! Retour sur un début de carrière retentissant.

« Ah oui, c'est bien à moi que c'est arrivé… Ce n'est pas un rêve », répond Lalime au bout du fil, sans fausse modestie, quand on lui explique l'objectif de l'entrevue.
« On me reparle à l'occasion de mes débuts dans la Ligue nationale », enchaîne l'analyste aux matchs des Canadiens de Montréal à TVA Sports. « Mon collègue à TVA Sports, Félix Séguin, m'a rappelé au début de l'année que ça faisait déjà 25 ans. Dernièrement à Tampa, pour un match des Canadiens, un partisan des Penguins est venu m'en parler. »
Amorcer sa carrière dans la LNH à l'âge de 22 ans en étant invaincu dans 16 matchs d'affilée, ce n'est pas un mince exploit. Entre le 6 décembre 1996 et le 21 janvier 1997, Lalime a savouré 14 victoires et deux verdicts nuls, en conservant une moyenne de 1,69 but accordé par match et un pourcentage d'arrêts de ,947. Ça demeure, un quart de siècle plus tard, la meilleure séquence de succès pour un gardien débutant dans la LNH.
SAVOUREZ CHAQUE MOMENT: La saison qui a forgé Chabot | Huberdeau revient sur son premier but
« Je ne devais rester avec les Penguins que pendant une semaine, le temps que le vétéran Tom Barrasso récupère d'une blessure, évoque le natif de Saint-Bonaventure. C'étaient mes premiers pas dans la LNH. C'était tout nouveau tout beau. Uniquement que de jouer avec Mario Lemieux, c'était la réalisation d'un très grand rêve pour moi. »
En plus de Lemieux, les Penguins alignaient les Jaromir Jagr, Ron Francis, Petr Nedved et Sergei Zubov.
« C'était une pas pire équipe », lance Lalime, en ajoutant du même souffle que l'entraîneur Eddie Johnston avait été incroyable avec lui.
« Eddie était un ancien gardien. Il me laissait aller. Il gardait l'atmosphère détendue, mentionne-t-il. Un jour, il m'a joué un tour en disant devant tout le monde qu'on me retournait dans les ligues mineures, mais c'était plutôt pour m'annoncer que j'avais remporté le pool de football hebdomadaire de l'équipe. »
Lalime prend également soin de souligner que les deux autres joueurs québécois des Penguins, les défenseurs Jean-Jacques Daigneault et François Leroux, ont grandement facilité son intégration dans le groupe.
Une première inoubliable
Lalime a pu se tremper les pieds dans le bain de la LNH, le 16 novembre, quelques semaines avant le début de sa séquence de succès.
« Je me rappellerai toujours mon premier match. C'était en relève de Ken Wregget, raconte-t-il. Nous perdions quelque chose comme 5-1 contre les Rangers de New York quand on m'a envoyé dans la mêlée.
« Mon premier arrêt a été contre Wayne Gretzky. Il a décoché un tir demi-frappé du haut du cercle pour aller changer au banc. C'était un arrêt de routine et je me suis dit : "Wow, c'est facile la Ligue nationale!" Le tir suivant est venu du bâton de Mark Messier, et beaucoup plus rapidement. Il s'est amené hors l'aile du côté droit, comme il le faisait souvent, avant de couper vers le centre et de dégainer. Ping, la rondelle frappe l'intérieur du poteau et rentre dans le but. J'ai alors pensé : "Ouin, c'est pas si facile que ça finalement". Messier m'avait refait le coup et nous avions perdu 8-3. La défaite a été portée à la fiche de Ken. »
Lalime s'est de nouveau amené en relève de Wregget à sa deuxième sortie, 20 jours plus tard. Les Penguins ont cette fois comblé le recul de 2-0 qu'ils accusaient pour défaire les Capitals de Washington 5-3 et ainsi lui procurer son premier gain dans la LNH.
C'était le début du conte de fées.
Le 13 décembre, à son troisième départ, il signe un premier blanchissage en carrière face aux Sharks de San Jose. À son grand désarroi, au son final de la sirène, il voit son coéquipier Darius Kasparaitis envoyer la rondelle dans les gradins du San Jose Arena.
« Les gars l'ont regardé en lui disant : "Mais qu'est-ce que tu fais là?" On a heureusement pu récupérer la rondelle, en échange d'un bâton autographié par tous les joueurs », relate Lalime, en s'amusant de l'anecdote.
Après cinq victoires, il a soutiré un premier verdict nul face aux Canadiens à Montréal, le 26 décembre, de nouveau en relève de Wregget. Il a obtenu le second au 13e match de la séquence contre les Sénateurs d'Ottawa, le 11 janvier.
Toute bonne chose…
Douze jours plus tard, le 23 janvier, il voyait son épopée prendre fin en prolongation face à l'Avalanche du Colorado.
« L'auteur du but en prolongation, Valeri Kamensky avait les deux patins dans mon demi-cercle avant l'arrivée de la rondelle. À l'époque, le règlement interdisait ça. En principe, le but n'aurait pas dû être bon », argue-t-il, sans aucune amertume.
« J'ai savouré chaque moment de la séquence. Quand elle prend fin, vous vous dites : "Wow! Je viens vraiment de vivre ça". C'était magique. »
La marque de 16 matchs sans défaite n'a réellement été menacée qu'à une reprise au cours des 25 dernières années. Andrew Hammond n'était qu'à un match de l'égaler au cours de l'irrésistible début de carrière qu'il a connue chez les Sénateurs d'Ottawa en 2014-15.
« Je travaillais déjà à la télé et on voulait que j'aille faire une entrevue avec lui à Ottawa. Moi j'étais réticent parce que je ne voulais pas lui porter malheur, mais ça ne dérangeait pas Hammond et les Sénateurs. J'ai donc été le rencontrer et tout s'était bien passé. Il avait toutefois perdu, le lendemain. »
Le « Hamburglar », comme on l'avait surnommé, n'a pas subi la défaite à ses sept sorties suivantes, terminant la saison avec un dossier de 20-1-2.
« Quand on regarde ça, Hammond a été plus dominant que moi après une vingtaine de matchs. Il est celui qui a connu le meilleur début de carrière de l'histoire. »
Le prochain gardien débutant qui s'attaquera à la marque devra profiter d'un alignement des astres parfait.
« J'ai profité de la force de frappe des Penguins à l'attaque, note-t-il. Il y a eu des matchs que Mario et Jagr ont marqué plusieurs buts, ce qui m'a aidé. Même si je montrais d'excellentes statistiques, il reste que tout doit tomber en place au bon moment. »