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Avec la saison 2019-20 de la LNH interrompue depuis le 12 mars en raison de la propagation du coronavirus, LNH.com vous offre un retour dans le temps en revisitant six matchs ultimes de la Finale de la Coupe Stanley - de 1987 à 2006 - d'un point de vue actuel et plutôt léger.
Aujourd'hui, le match no 7 de la Finale de 1994 opposant les Canucks de Vancouver aux Rangers de New York.

En quête d'une première Coupe Stanley depuis 1940, les Rangers avaient bousillé deux chances de mettre un terme à la série en laissant les Canucks combler un déficit de 1-3. Imaginez donc la tension qui régnait au Madison Square Garden quand les deux équipes ont remis les pieds dans la Grosse Pomme, le 14 juin 1994.
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Il n'y avait pas lieu d'être trop optimistes pour les partisans des Blue Shirts puisque leurs favoris avaient perdu les deux matchs précédents par un score combiné de 10-4. Mais ils avaient visiblement tout oublié et se sont rangés derrière les Rangers dès les premières secondes des hymnes nationaux.
Ce n'est pas mêlant, le chanteur John Amirante aurait pu reprendre une chanson de Madonna que personne ne l'aurait remarqué. Les amateurs ont d'abord enterré l'« Ô Canada » avec des « Let's Go Rangers! » avant de faire un puissant vacarme pendant l'hymne américain.
Les descripteurs de MSG Network, Sam Rosen et John Davidson, le font remarquer aussitôt : Ils n'ont jamais rien entendu d'aussi bruyant au mythique amphithéâtre. On imagine que les joueurs des Canucks étaient petits dans leurs patins.

Une belle façon d'amorcer les célébrations qui se sont probablement poursuivies jusqu'à tard dans la nuit. Après tout, on dit que New York est la ville qui ne dort jamais…
Le sommaire du match est ici
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Voici donc trois éléments marquants de cette rencontre:
Leetch dans une classe à part
Ce sous-titre peut paraître une évidence pour ceux qui ont suivi les prouesses du défenseur tout au long de sa carrière. Mais pour quelqu'un qui n'a été un témoin conscient de ses exploits que lors des quelques dernières années de son parcours et qui n'avait que trois ans quand cette rencontre a été disputée - lire ici l'auteur de ces lignes - sa façon de jouer et de voir le jeu saute aux yeux dès le début du match.

On parle souvent, ces dernières années, de l'arrivée massive de « défenseurs modernes » dans la LNH - des arrières moins imposants qui compensent par leur mobilité et leur flair offensif - et force est d'admettre que Leetch était un précurseur à cette époque. À 6 pieds 1 pouce et 190 livres, il ne laissait pas sa place, mais ça n'avait absolument rien à voir avec le gabarit de son partenaire Jeff Beukeboom (6-5, 230).
Leetch est tout simplement de tous les combats dans cette rencontre. C'est d'ailleurs lui qui inscrit le premier but de la rencontre, son 11e des séries et son 34e point en 23 matchs (!). Sur cette séquence, il amorce la sortie de zone en refilant le disque à Mark Messier et fonce directement vers le filet adverse, où il reçoit la rondelle et n'a qu'à tirer dans une cage béante puisqu'il s'est fait oublier. Un jeu d'enfants.

Meilleur pointeur et deuxième buteur de l'équipe - un but derrière Messier - lors de ces séries Leetch devient le premier joueur américain à remporter le trophée Conn-Smythe, remis au joueur le plus utile des séries. À 26 ans, il ajoutait ce trophée ainsi que la Coupe Stanley à son palmarès qui comptait déjà le trophée Calder (recrue de l'année) et le trophée Norris (meilleur défenseur).
Deux systèmes différents
Il est plutôt cocasse de réécouter les analyses de l'époque avec le recul et la panoplie de systèmes de jeu dont les équipes disposent aujourd'hui. On comprend d'ailleurs rapidement que le pilote des Rangers, Mike Keenan, est l'un des premiers à insister sur la notion de « cycling » en zone adverse - cette stratégie qui consiste à garder la possession de la rondelle et à faire circuler la rondelle rapidement en fond de territoire.
John Davidson tente d'ailleurs de l'illustrer en donnant l'exemple d'une roue de bicyclette et rappelle que Keenan n'était pas du tout satisfait du rendement de ses ouailles à cet égard lors des deux matchs précédents. Cette fois, le plan de match est appliqué à la lettre.

Les Rangers réussissent à embouteiller les Canucks de Pat Quinn pendant de longues minutes dans leur territoire. Et même si l'accrochage et l'obstruction sont des infractions largement tolérées, les Canucks sont punis à quelques occasions puisqu'ils sont débordés. Sur la séquence ci-haut, Jirky Lumme est éventuellement puni pour double-échec, ce qui ouvre la porte aux Rangers qui marquent par l'entremise de Leetch.
De l'autre côté, les Canucks optent d'abord et avant tout pour le bon vieux « dump and chase », qui vise à rejeter la rondelle en fond de territoire et à appliquer de la pression pour la récupérer. La troupe de Quinn ne ménage pas les efforts pour y arriver, mais les Rangers parviennent à la contrer la majorité du temps.

Il est d'ailleurs intéressant de noter que la majorité des entrées de zone en possession de la rondelle des Canucks sont effectuées par Pavel Bure, clairement influencé par le style de jeu soviétique et propulsé par sa vitesse sans égal. Finalement, Keenan aura eu le dessus sur Quinn pour finalement remporter la Coupe Stanley à sa quatrième présence en Finale.
Les Dieux avec les Rangers
Il faut croire que l'occasion qu'avaient les Rangers de mettre un terme à une disette de 40 ans devant leurs partisans a charmé les Dieux du hockey. Ce n'est pas tant que les Canucks ont dominé ce match et qu'ils méritaient la victoire davantage que les locaux, c'est surtout qu'ils ont raté de nombreuses chances de marquer tout au long de la rencontre.

Il y a eu cette chance de Bure, qui aurait fait 2-1 en deuxième période, mais les Canucks ont surtout eu deux occasions en or de créer l'égalité en fin de match. Martin Gélinas a d'abord frappé le côté du filet alors qu'il avait battu Mike Richter avec moins de 10 minutes à écouler.

Puis le tir de Nathan LaFayette a abouti sur le poteau à la gauche du gardien alors qu'il n'y avait que cinq minutes à faire - jetant tout un froid dans les gradins du MSG et rappelant à tout le monde qu'il ne fallait pas enterrer la peau de l'ours avant de l'avoir tué.

En plus de ça, les Canucks ont tout donné dans les dernières secondes du match et les Rangers en avaient plein les bras. Dans les 37 dernières secondes de jeu, il y a eu pas moins de trois mises en jeu en territoire à la suite de dégagements refusés - de quoi faire monter le niveau de stress collectif.
Pensées en bref
- Les Rangers ont souffert de la perte du défenseur Jeff Beukeboom en deuxième période. L'imposant arrière était l'un des éléments physiques importants de la brigade new-yorkaise et on a senti que son absence avait permis aux Canucks de prendre le dessus en échec avant.

  • Mark Messier en était à sa sixième et dernière conquête de la Coupe Stanley à ce moment, sa première depuis 1990, et surtout sa seule dans un autre uniforme que celui des Oilers d'Edmonton. Même si on lui a attribué le but gagnant de ce match, il a déclaré à Sportsnet en 2017 que le but avait été marqué par Brian Noonan. À vous de juger!
  • La position de gardien était en pleine révolution dans ces années. Après avoir visionné le match ultime de la Finale de 1987 et celui-là, on peut affirmer que la différence est flagrante. Les gardiens n'hésitent pas à se jeter au sol et utilisent désormais la glissade à deux jambières. Spectaculaire.
  • Ce match avait toutes les allures d'un derby de démolition. Les coups d'épaules - et de hanche - ont été distribués à outrance. Les statistiques ne sont pas accessibles, mais il y a fort à parier que le total des mises en échec encaissées ce soir-là avoisine ou dépasse même la centaine.