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Ce texte a été publié le 5 mars. Au moment de l'annulation du reste de la saison de la LHJMQ en raison du coronavirus, Thimo Nickl totalisait 10 buts et 29 aides pour un total de 39 points en 58 matchs.
BOISBRIAND, Québec - Imaginez avoir la lourde tâche d'évaluer le potentiel d'un joueur grâce à des clips vidéo d'une trentaine de minutes et à quelques discussions avec des observateurs, et d'ensuite devoir trancher à savoir si le joueur en question a le talent nécessaire afin de poursuivre sa carrière en Amérique du Nord.

Ajoutez à cela le fait que le patineur n'a que 18 ans, qu'il est originaire de l'Autriche - un pays qui n'a produit qu'une poignée de joueurs de la LNH - et qu'il évolue dans la Ligue de hockey des Alpes, un circuit professionnel qui regroupe des équipes de l'Autriche, de la Slovénie et de l'Italie.
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Les chances de se tromper sont plutôt élevées. Mais quand Philippe Boucher a vu Thimo Nickl à l'œuvre en compagnie de son personnel hockey, le directeur général des Voltigeurs de Drummondville n'a pas hésité bien longtemps avant de prendre sa décision.
« C'est sûr qu'il fallait faire nos devoirs, a déclaré l'ancien défenseur de la LNH. On a récolté toute l'information que nous pouvions, et avec les clips que son agent nous avait fournies, il est devenu assez clair que Thimo avait le potentiel de devenir un défenseur d'impact pour nous et dans le junior majeur.
« Il joue vraiment avec un style nord-américain, ce qui est plutôt surprenant pour un jeune qui arrive d'Europe. En regardant les clips, je pensais qu'il pouvait jouer ici, mais il y a toujours des impondérables. On ne connaît pas le calibre de jeu là-bas ni la manière avec laquelle il a été dirigé, mais il s'est ajusté dès son arrivée. »
Nickl est devenu un élément-clé de la jeune brigade drummondvilloise à sa première saison au Québec. Grâce à sa récolte de 38 points, dont 10 buts, en 55 matchs, l'Autrichien figure au troisième rang des pointeurs chez les défenseurs recrues de la LHJMQ.
Son brio lui a d'ailleurs valu une invitation au Match des meilleurs espoirs de la LCH/LNH en janvier, et son nom apparait désormais au 51e rang sur la liste de mi-saison du Bureau central de dépistage de la LNH.
« Ma saison se déroule plutôt bien, j'occupe une place importante dans la formation, a dit l'arrière de 6 pieds 2 pouces et 176 livres. On me confie des responsabilités dans mon territoire, mais je dois aussi contribuer offensivement. Je joue dans tous les types de situations et c'est assez gros pour moi. »
Même s'il a amassé 24 de ses 38 points (six buts, 18 aides) avec l'avantage d'un homme, Nickl ne se dévoile pas uniquement comme un défenseur à caractère offensif. Il peut être l'homme de confiance de l'entraîneur Steve Hartley et a même été utilisé pendant près d'une trentaine de minutes lors de certains matchs en début de saison.
S'il n'a pas eu besoin d'une période d'adaptation en débarquant chez les Voltigeurs, il doit maintenant apprendre à gérer les rudiments du calendrier nord-américain. C'est que Nickl n'a pas disputé plus de 25 matchs en saison régulière lors des trois dernières saisons… Il approche maintenant du plateau des 60.
« Tout ça fait partie de son apprentissage, a fait valoir Hartley. Ce sont des choses qu'il n'a pas nécessairement vécues en Europe. Ça devient donc un peu plus difficile pour lui au niveau de l'aspect physique et il doit travailler là-dessus. Quand il joue de manière robuste, c'est là qu'il connaît du succès et qu'il a eu ses meilleurs moments.
« Il doit améliorer sa constance de ce côté-là, et c'est tout à fait normal. Il est jeune et il a encore des choses à travailler. »
Un rêve lointain
En prenant la décision de s'exiler au Centre-du-Québec pour espérer atteindre la LNH un jour, Nickl a choisi une avenue que bien peu d'Autrichiens décident d'explorer. Le hockey n'est pas le sport principal là-bas, et les exemples de réussite sont plutôt rares.
Michael Grabner et Andreas Nodl sont les derniers Autrichiens à avoir été repêchés dans la LNH, en 2006. Si Nodl a connu une courte carrière, Grabner, lui, fait partie des cinq joueurs originaires de ce pays à avoir joué plus de 100 matchs dans la grande ligue - Thomas Vanek étant le plus prolifique avec 1029 rencontres au compteur.
« C'est certain que chaque jeune qui joue au hockey rêve de la LNH, a expliqué Nickl. Le problème, c'est que ce rêve semble tellement hors de portée que ce n'est vraiment pas une décision qui se prend facilement. Il faut quitter notre pays parce que c'est pratiquement impossible de se faire remarquer en Autriche. »
Cette situation pourrait éventuellement changer. Le pays vient d'être promu dans le groupe mondial du Championnat mondial junior de la FIHG (CMJ) grâce à son triomphe en division 1 - une conquête à laquelle Nickl a d'ailleurs participé - et le hockey autrichien comptera très bientôt sur de nouveaux modèles.
Il y a Nickl, certes, mais il y a aussi Marco Rossi, un attaquant considéré comme le cinquième meilleur espoir nord-américain et qui aspire sérieusement à une sélection dans le top-10, si ce n'est pas dans le top-5.
« Je crois que le hockey fait des progrès en Autriche, les jeunes y portent plus attention, a-t-il argué. Ils sortent de leur zone de confort. Tout le monde se pousse à être meilleur et ça cause un effet d'entraînement.
« C'est bien pour le hockey autrichien d'avoir des exemples qui évoluent dans la LNH présentement - Michael Grabner et Michael Raffl. Et j'espère que Marco et moi pourrons montrer à la prochaine génération que tout est possible. »