TORONTO – Chaque fois que Sidney Crosby est questionné sur l'héritage qu'il laissera dans le monde du hockey, en particulier sur la scène internationale, il contourne habilement le sujet comme s'il voulait éviter ses adversaires sur la glace.
En réalité, l'attaquant de 37 ans est l'un des joueurs les plus décorés de l'histoire du hockey canadien. Le natif de Cole Harbour, en Nouvelle-Écosse, a remporté des médailles d'or avec le Canada lors du Championnat mondial junior de 2005 au Dakota du Nord, des Jeux olympiques d'hiver 2010 à Vancouver, des Jeux olympiques d'hiver 2014 à Sotchi, en Russie, et a mené son pays à titre de capitaine lors de la Coupe du monde de hockey de 2016.
Mais ne vous attendez pas à ce qu'il commence à se gonfler la poitrine et à parler de tous ses accomplissements personnels. Ça n'arrivera pas. Ce n'est pas son genre.
« Je pense que lorsque vous portez ce chandail, vous pensez d'abord à l'équipe », a affirmé Crosby vendredi, 24 heures après avoir été nommé capitaine pour la Confrontation des 4 Nations. « On veut représenter son pays. »
Pour Crosby, ça signifie qu'il faut penser à l'histoire et à la tradition d'Équipe Canada.
Ça signifie de penser aux moments inoubliables comme le but de Paul Henderson inscrit à 34 secondes de la fin du huitième match de la Série du siècle de 1972 contre l'Union soviétique, qui permettait au Canada de l'emporter 6 à 5, et d'avoir le dessus 4-3-1 dans la série.
Il y a aussi le but magique de Mario Lemieux sur une passe de Wayne Gretzky à 1:26 de la fin du troisième match décisif pour donner au Canada une victoire de 6-5 sur les Soviétiques et remporter la finale de la Coupe Canada de 1987.
Des souvenirs légendaires.
Mais pour lui, il y a plus.
« Les buts que vous avez mentionnés sont parmi les choses qui me viennent à l'esprit, a-t-il déclaré. Il y a aussi les équipes que vous avez regardées en grandissant et les grands joueurs qui ont joué pour Équipe Canada.
« Mais je pense que la plus grande force du Canada a toujours été la capacité des joueurs de jouer en groupe. Lorsque vous rassemblez plusieurs grands joueurs et que vous les mettez ensemble, vous devez trouver un moyen de vous unir. Je pense que les équipes canadiennes ont montré que c'était l'une de leurs forces et que si une équipe veut réussir, elle doit le faire.
« Quand on pense à jouer pour le Canada, on pense à l'aspect collectif, puis à la capacité de jouer en groupe et de trouver un moyen de gagner. »
L'insistance de Crosby à toujours faire passer l'équipe en premier est l'une des raisons pour lesquelles il a été choisi d'emblée pour porter le « C » du Canada à la Confrontation des 4 Nations, le tournoi qui opposera le Canada, les États-Unis, la Suède et la Finlande à Montréal et Boston du 12 au 20 février.
Sans parler du fait qu'il se lève dans les moments les plus importants lorsqu'il porte l'uniforme canadien, notamment quand il a marqué en prolongation pour donner au Canada une victoire de 3-2 sur les États-Unis en finale des Jeux olympiques de 2010, un moment emblématique de l'histoire du Canada qui restera à jamais connu sous le nom du « but en or ».
« Il a réussi un but grandiose, mais vous ne l'entendrez jamais en parler », a souligné l'entraîneur adjoint de l'équipe canadienne, Rick Tocchet. « C'est ça, Sid. C'est ce qui fait de lui un si grand leader. C'est ce qui fait de lui le choix évident pour nous guider dans ce tournoi des 4 nations. »
Tocchet était attaquant avec le Canada lors de la Coupe du Canada 1987, une équipe qui comptait dans ses rangs deux des plus grands joueurs de l'histoire en Lemieux et Gretzky. Près de trois décennies plus tard, il a été adjoint derrière le banc des Penguins de Pittsburgh de 2014 à 2017 et il a pu voir de l'intérieur comment Crosby a aidé l'équipe à remporter deux fois de suite la Coupe Stanley.
Est-ce qu'il existe un joueur plus méritant de porter le surnom de « Capitaine Canada »?
« Il se retrouve au haut de la liste », a affirmé Tocchet. « Je ne veux pas mettre Sid dans l'embarras. Mais pour avoir été assis dans le vestiaire à côté de Wayne Gretzky, le comportement de Wayne, la façon dont il se comportait avec ses coéquipiers, la façon dont il se comportait devant le public, Sid fait la même chose.
« Et puis il y a le type Mark Messier, qui n'a pas peur de dire des choses à ses coéquipiers si c'est nécessaire au bon moment. Et j'ai vu Sid faire cela aussi, utiliser sa voix pour leur faire savoir que quelque chose est inacceptable. Il est prêt à le faire. Pour moi, c'est ça un grand leader.
« Ce qui compte, c'est que lorsqu'il enfile ce chandail, on peut sentir le calme s'installer au Canada. C'est un peu comme un enfant et sa doudou. »
Jamais ébranlé face à la pression
Patrice Bergeron a lui aussi été témoin de ce calme et de cette assurance de Crosby. Il était lui aussi à Vancouver en 2010 quand les Américains ont forcé la prolongation avec 25 secondes à faire en troisième période de la finale pour la médaille d’or olympique.
Lorsqu’il a regardé son bon ami dans les yeux, Bergeron a vu que la pression du moment n’atteignait pas Crosby.
« Nous avions beaucoup de leaders dans ce vestiaire, se souvient Bergeron. Mais quand on regardait Sid en particulier, il n'était pas ébranlé. Pour lui, c'était tout simplement le temps de se remettre au travail et trouver un moyen de gagner. »
C'est exactement ce qu'a fait Crosby en battant le gardien américain Ryan Miller pour marquer le but en or à 7:40 de la prolongation, donnant au Canada une victoire de 3-2 et le titre.
« C'est tout à fait normal que ce soit lui qui ait marqué le but en or dans son propre pays et tout ce qu'il représente », a ajouté Bergeron. « C'est comme ça qu'il est.
« Par-dessus tout, c'est son sang-froid. Ses coéquipiers s'en nourrissent. C'est du vrai leadership. Il ne se laisse jamais ébranler, surtout dans les grands moments. »