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MONTRÉAL – Il n’était pas le plus bavard, mais aux yeux de ses coéquipiers et de ses admirateurs, les prouesses d’Andrei Markov ont parlé d’elles-mêmes.

Dans une ville et un marché de hockey qui valorisent le talent brut et les sensations fortes, le caractère réservé de Markov était plutôt atypique pour un favori de la foule. Cela n’a pas empêché le défenseur, qui a été célébré le 3 décembre au Centre Bell lors d’une soirée hommage, de s'établir comme l'un des grands défenseurs parmi cette organisation dont l’histoire regorgeait déjà d’une multitude de légendes à la ligne bleue.

« Il était silencieux. Cela ne fait aucun doute; il apportait une présence silencieuse, mais Marky menait toujours par l’exemple », lance le gardien le plus victorieux de l’histoire de la franchise, Carey Price, qui a joué aux côtés de Markov pendant 10 saisons. « Il laissait ses actions parler d'elles-mêmes. »

Les partisans des Canadiens sont connus pour apprécier les joueurs qui brillent par leur prestance et qui se nourrissent de l’énergie du public tout en lui retournant la faveur. Bien que le joueur russe n’ait pas marqué les esprits par sa volubilité, il a su communiquer avec les plus fidèles partisans d’une manière qu’ils comprenaient très bien.

« Le monde à Montréal, les partisans, ils connaissent le hockey. Ils sont capables de reconnaître de bonnes performances des bons joueurs », décrit l’ancien gardien de but José Théodore, qui a été coéquipier de Markov pendant cinq saisons. « Il adorait Montréal, il adorait jouer ici. Puis, il n'y a rien à ne pas aimer d'Andrei Markov, tant sur la glace qu'en dehors. »

Choix tardif au Repêchage de la LNH en 1998 – sélectionné au sixième tour, 162e au total – il est rapidement devenu un pilier de la ligne bleue des Canadiens. Le défenseur de six pieds et 200 livres a cumulé 990 rencontres dans l’uniforme du Tricolore, incluant des campagnes de plus de 81 matchs à trois de ses quatre dernières saisons, et ce, malgré de nombreuses blessures au début de sa carrière.

Une endurance qui serait attribuée à son rigoureux régime de préparation, affirme un ancien coéquipier.

« Marky était un pilier à l’arrière pendant de nombreuses années, ici. C’était un joueur extrêmement intelligent. Année après année, il a subi des blessures, mais il a su revenir plus fort; [il avait une] incroyable éthique de travail », se remémore Brendan Gallagher au sujet de l’ancien numéro 79, qui a manqué 35 matchs en raison d’une déchirure à la cheville en 2009-2010, avant de déjouer les pronostics et de revenir au jeu deux mois plus tôt que prévu, inscrivant notamment un doublé à son retour dans la formation. « Et lorsqu’on pensait aux Canadiens de Montréal, honnêtement, il était souvent le visage auquel on pensait. Il a été un joueur très important pour l’organisation et pendant de très longues années, et je suis heureux d’avoir pu jouer avec lui. »

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Il n’existe pas meilleure personne pour évaluer la qualité d’un défenseur que celui qui se trouve devant le filet. Un de ces gardiens de but à avoir eu la chance de voir le Général de près est José Théodore, gagnant du trophée Hart et Vézina en 2001-2002, qui confirme que Markov était aussi bon qu’on le prétend.

« Moi, j'ai tout le temps dit qu’Andrei Markov, c'était l’un des défenseurs les plus complets qui soient. Extrêmement bonne vision. Bon patineur, fort physiquement, intelligent avec la rondelle, bon en attaque. Il pouvait jouer en avantage numérique, comme il pouvait jouer en désavantage. Je pense que c’était pas mal ça, Andrei Markov : un gars complet », exprime Théodore à propos de Markov, le meneur chez les défenseurs pour le plus de points (294) en avantage numérique dans l’histoire du Tricolore. « Et, en plus, il pouvait jouer beaucoup de minutes. Il jouait parfois des 25 à 27 minutes, toujours avec la même énergie, la même détermination. C'est l’un des grands défenseurs à être passés par les Canadiens. »

Price et Théodore incarnent différentes époques du Tricolore, mais comme le démontre la constance de Markov, les gardiens de but partagent tous deux une appréciation pour ce défenseur qui a facilité leur travail au fil des saisons.

« [Il était] un meneur de jeu. Marky était en mesure de trouver les gars partout sur la glace. Il était capable de prendre la rondelle à un coin de la patinoire et de la déposer pratiquement sur leur palette, peu importe où ils se trouvaient. Il était l’un des meilleurs passeurs avec qui je crois avoir joué », raconte Price à propos de Markov, qui a célébré la 500e rencontre de sa carrière en inscrivant cinq points. Il est le deuxième défenseur dans l’histoire des Canadiens à avoir accompli cet exploit lors d’un match à l’étranger. « C’était le genre de gars avec qui on ne passait pas vraiment beaucoup de temps dans notre propre zone [quand il était sur la glace], parce qu’on lui donnait la rondelle et il la redonnait à quelqu’un d’autre en se dirigeant vers l’autre bout de la patinoire. »

Aux yeux de son compatriote en défense P.K. Subban, il n’y avait tout simplement aucun joueur qui surpassait Markov à cette époque, au sein de l’équipe.

« C’est le meilleur joueur avec qui j’aie joué à Montréal. J’ai joué avec beaucoup d’excellents joueurs, mais je ne sais pas s’il y en avait un meilleur que lui. Carey Price était un gardien formidable, mais je crois vraiment qu’Andrei Markov est le meilleur joueur avec qui j’aie joué à Montréal – simplement par sa façon de voir la glace, sa façon d’avoir un impact sur le jeu », a louangé Subban, qui a été coéquipier de Markov avec les Canadiens lors de sept saisons. « Tu savais qu’il pouvait faire des jeux que d’autres gars ne pouvaient faire. Et il m’a poussé à être meilleur chaque jour. »

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Connu pour la puissance de son jeu et la timidité de sa voix, Markov était aussi connu pour son humour pince-sans-rire et astucieux – une fois qu’il vous avait apprivoisé. Price évoque qu’il aura fallu deux ans avant que son coéquipier s’ouvre à lui, mais que les histoires comiques n’ont ensuite pas tardé.

« Je me souviens qu’une fois, nous étions à une fête des recrues à Phoenix et il a sauté dans la piscine avec son complet, s’exclame Price. Je n'aurais pas pensé qu’il était le genre de gars capable de faire ça. »

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Au-delà de son côté festif, Markov n’entendait pas rire une fois à la ligne bleue – et il détient les records pour le prouver : le plus de points en avantage numérique par un défenseur dans l’histoire de la franchise, deuxième pour les mentions d’aide, à égalité au deuxième rang pour les buts gagnants, troisième tant pour les buts que pour les points, et à travers l'ensemble des joueurs, le plus de temps au total sur la patinoire [statistique comptabilisée depuis 1997-1998].

« C'était un grand talent. On s'entend. Andrei, c'est l’un des défenseurs les plus talentueux que j'aie vus. On ne l'appelait pas le Général pour rien », lance Théodore au sujet de Markov, qui a obtenu sa citoyenneté canadienne en 2010. « Quand il était devant moi, je ne dis pas que je baissais les gardes, mais c’est comme si je savais qu'il ne faisait pas d'erreurs. Je savais à quoi m'attendre. Tout le temps, 100 miles à l'heure, extrêmement intelligent sur la patinoire. Donc, j'étais privilégié de pouvoir dire qu'il était mon défenseur pendant cinq ans parce qu'il me rendait la vie facile. »

Une carrière qui vaut assurément la peine d’être saluée.

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