00-Photo-Minas-Panagiotakis_Getty-Images

« J'ai probablement crié contre les arbitres trop souvent », a admis Brendan Gallagher à la blague, réfléchissant au conseil qu'il donnerait à une version de 20 ans de lui-même, aujourd'hui assagi par une décennie d'expérience dans la Ligue.

ACHETER: Chandail de Brendan Gallagher

« Je ne pense pas que j'avais nécessairement tort », a-t-il clarifié, toujours en riant. « Mais j'aurais pu gérer un peu mieux certaines situations. Il m'a fallu quatre ou cinq ans pour améliorer mes relations, et j'ai encore du travail à faire auprès de quelques gars, mais ça s'en vient. »

Bien qu'il ait eu besoin de quelques années pour gagner la sympathie des arbitres de la LNH, Gallagher a obtenu son statut de favori des partisans à Montréal presque immédiatement après avoir fait ses débuts dans la LNH, le 22 janvier 2013. Au cours de la dernière décennie, il s'est jeté à droite, à gauche, avec abandon, tout en s'implantant de façon presque permanente dans le demi-cercle bleu adverse, contribuant à cimenter sa réputation de leader, le cœur et l'âme de son club, qui ne prend jamais un quart de travail de congé, et encore moins un match.

Toujours un coeur d'enfant

Beaucoup de choses ont changé depuis que Gallagher a fait ses premiers coups de patin dans l'uniforme des Canadiens il y a exactement 10 ans, mais plus de 600 matchs plus tard, le sentiment reste le même chaque fois qu'il a la chance d'enfiler l'emblématique chandail bleu-blanc-rouge.

« Je pense que, d'une certaine façon, je suis toujours ce même jeune de 20 ans qui sourit tout le temps et qui est heureux d'être ici. Mais, en même temps, je pense que j'ai vraiment grandi », a précisé Gallagher, qui a été repêché au cinquième tour, 147e choix au total, par Montréal en 2010.
« Ce n'est pas que je ne le savais pas avant, mais avec le temps j'ai vraiment compris ce qu'est un Canadien de Montréal et ce que ça représente pour tant de gens.

« On comprend que c'est spécial, ce que l'on fait. Plus on passe de temps ici, plus on comprend qu'on n'est pas seulement des joueurs de hockey; l'impact qu'on a sur la vie des gens est plus important qu'on le pense, parfois. Beaucoup de personnes jouent dans la Ligue nationale de hockey, mais tout le monde n'a pas la chance de jouer pour les Canadiens de Montréal, a-t-il ajouté. C'est une expérience vraiment spéciale et il faut essayer d'en profiter le plus possible. »

La passion et l'éthique de travail de Gallagher ont été ses cartes de visite dès son arrivée au camp d'entraînement de l'équipe après le lock-out de la LNH en 2012-2013, injectant dès le départ autant de cran que d'enthousiasme juvénile à une formation composée principalement de vétérans.
« J'ai juste eu de la chance que Berg [Marc Bergevin, alors directeur général] et Michel Therrien veuillent me donner une chance. Je n'ai pas été inséré dans l'alignement lors du premier match, se souvient-il. À l'entraînement du lendemain, il y a eu un exercice que j'ai bien fait. C'était un exercice de bataille et les gars m'encourageaient et me faisaient sentir bien. Le soir suivant, j'étais dans la formation. »

Après avoir gagné sa place pour le deuxième match, le fougueux attaquant a explosé dès le départ, offrant à Alex Galchenyuk le premier but de sa carrière dans la LNH, et il n'a jamais regardé derrière depuis.

« Même la première année, on pouvait voir qu'il avait quelque chose de spécial », se souvient Brian Gionta, le premier capitaine de Gallagher dans la LNH, qui avait 34 ans lorsque ce dernier a fait ses débuts dans la Ligue. « Je me rappelle à quel point il était respectueux et terre-à-terre. Il venait avec ses bottes de travail et était le coéquipier par excellence. »

02_Photo_Bruce-Bennett_Getty-Images

« Il est arrivé et il était presque complètement autosuffisant, a-t-il ajouté. Il a dû apprendre certains aspects du niveau de jeu professionnel, bien sûr, mais il avait déjà de bonnes habitudes, l'éthique de travail et l'esprit d'équipe nécessaires. Il avait ces qualités en lui de façon innée. C'était un bon coéquipier, il savait comment travailler à l'entraînement et il n'avait aucune de ces mauvaises habitudes qui peuvent parfois faire mal à long terme. »
Ça ne veut pas dire que Gallagher a eu un dossier sans tache en tant que recrue. Il se souvient d'au moins une leçon de préparation - et de protection solaire - qu'il a dû apprendre à ses dépens.

« Je me souviens d'une fois où j'ai un peu trop profité du soleil en Floride. Michel Therrien m'a appelé avant le match et j'avais un coup de soleil. Je pensais que ça allait être une rencontre pour rigoler, a partagé Gallagher. Ce n'était pas une blague.

« J'avais un coup de soleil sur le visage et il m'a dit : "T'es-tu préparé? T'es-tu préparé?". Et la réponse était évidemment "Non." Ça semble idiot, mais ça en fait partie », a poursuivi Gallagher, qui a terminé sa saison inaugurale comme finaliste au trophée Calder, remis à la meilleure recrue de la LNH. « En tant que jeune, on apprend de petites choses comme celle-là : si l'on passe la journée au soleil, on n'aura pas notre énergie habituelle. J'ai beaucoup appris de lui. Il n'y avait pas de zones grises. Il comprenait ce qui nous faisait progresser et, de temps en temps, il nous le disait directement. »

Le bon entraîneur au bon moment

Gallagher a eu la chance d'apprendre de quatre entraîneurs-chefs différents au cours de son passage dans la Ligue, de Therrien à Claude Julien, en passant par Dominique Ducharme, et maintenant Martin St-Louis. Avec chaque nouveau patron derrière le banc est venue une nouvelle occasion de grandir et d'apprendre.

« Tous mes entraîneurs sont arrivés à de bons moments dans ma carrière. Michel Therrien était l'entraîneur parfait pour moi en tant que recrue, a déclaré Gallagher. Il s'est assuré que je ne sois pas sur la glace dans des situations où j'allais être en difficulté. Il m'a protégé. Puis, au fil de la saison, j'ai commencé à gagner sa confiance et il s'est mis à m'offrir plus de responsabilités. Ce n'était jamais donné, il fallait le mériter, mais une fois qu'on l'avait mérité, il n'hésitait pas à nous mettre dans ces positions. Il m'a donné toutes les chances de réussir. »

« Puis, Claude est arrivé. Notre équipe était en déclin à ce moment-là, et il nous a redonné confiance. Il m'a mis dans une position où je jouais beaucoup avec Pleky [Tomas Plekanec] et aussi avec Phil [Danault]. Jouer avec ce genre de joueurs de centre a été très bénéfique pour mon jeu. On m'a sur la glace contre certains des meilleurs joueurs au monde et, ensuite, Phil, Tuna [Tomas Tatar] et moi sommes devenus un trio vraiment efficace en matière de contrôle du jeu, et nous avons apprécié ce défi et cette opportunité qui nous ont été donnés par Claude », s'est souvenu Gallagher, meilleur buteur des Canadiens lors de la première année complète de Julien derrière le banc, en 2017-2018, sa première de deux saisons de plus de 30 filets avec le Tricolore.

04-Photo-Francois-Lacasse_NHLI-via-Getty-Images

« Ensuite, quand Dom est arrivé, évidemment, ce n'était qu'une courte période, mais il nous a donné une chance d'aller en finale de la coupe Stanley », a poursuivi Gallagher, qui a récolté une passe sur le but d'Artturi Lehkonen en prolongation lors du sixième match de la demi-finale de 2021 contre Vegas, et qui a envoyé les Canadiens en finale pour la première fois depuis 1993. « Dom a fait passer notre équipe d'un point bas à un point où nous avons été capables de nous reprendre. Ce parcours et cette expérience sont quelque chose qu'on n'oublie jamais en tant que joueur de hockey. »

Enfin, il y a Martin St-Louis, l'entraîneur-chef actuel de Gallagher, qui a lui-même connu une carrière de 16 ans comme joueur, disputant 1134 matchs de saison et 107 autres en séries éliminatoires. Apprenant des leçons de longévité de la part d'un champion de la coupe Stanley et d'un membre du Temple de la renommée de 5 pieds et 8 pouces, il se pourrait que Gallagher soit une fois de plus tombé sur le parfait entraîneur pour lui, au parfait moment de sa carrière.

« Marty était mon joueur préféré quand j'étais petit. J'ai ensuite joué contre lui et j'ai vu à quel point il était compétitif. Et maintenant que j'ai la chance d'apprendre sous ses ordres, je vois toutes les idées qu'il a. Il pense le jeu d'une façon vraiment différente et ça ouvre de petites zones dans notre cerveau. Tant qu'on ne l'a pas entendu de sa bouche, on n'y pense pas vraiment, même si tout a beaucoup de sens. J'ai hâte de continuer à apprendre de lui et j'ai déjà beaucoup appris sur la façon de penser le jeu. »

05_Photo_Jared-Silber_NHLI-via-Getty-Images

Des leçons d'anciens coéquipiers

Étudiant du jeu depuis le début, Gallagher a réussi notamment parce qu'il a profité de chaque occasion d'apprendre des leaders de l'équipe, tant ses entraîneurs et capitaines que son ancien colocataire Josh Gorges.

« Quand on roulait vers l'aréna ou qu'on en revenait, Gorgie parlait beaucoup et j'apprenais plein de choses, ce qui comptait énormément pour moi », a raconté Gallagher, qui a vécu avec Gorges et sa femme, Maggie, pendant ses deux premières saisons avec les Canadiens. « Gorgie m'avait observé dans mes batailles en fond de territoire et il m'avait dit : "Tu ne seras pas plus fort que les autres gars et tu ne pourras pas les repousser. Tu dois juste bien te positionner et penser au jeu. Utilise ton cerveau et pense au jeu. Il y a des moments où il faut être agressif, et d'autres où il faut prendre du recul." Il donnait toujours des petits trucs comme ça, que ce soit la façon de se préparer pour un match ou de petites astuces sur la glace. Il partageait beaucoup de sa sagesse.

07-Photo-Francois-Laplante_Freestyle-Photography_Getty-Images-----

« Mon Dieu, j'espère qu'il ne lira jamais cette entrevue », a-t-il ajouté en riant.

« Dans une ville comme Montréal, je devais simplement jouer au hockey. Je n'avais pas à me soucier de quoi que ce soit d'autre qui se passait, des distractions, de ce que j'allais manger, de me déplacer dans la ville, de quoi que ce soit. Tout était pris en charge. C'est difficile pour moi de dire que je serais là où j'en suis aujourd'hui si Josh et Maggie n'avaient pas pris les devants et fait tout ça pour moi, alors c'est quelque chose que j'apprécie vraiment. »

Si Gallagher avait la chance d'apprendre de Gorges en soupant et lors de leurs trajets quotidiens, il a aussi tiré des leçons plus subtiles de certains leaders plus discrets du vestiaire, au fil des ans.

« Jouer avec un gars comme Corey Perry m'a aussi aidé, simplement à regarder la façon dont il prenait soin de son corps. Il était tout le temps sur la patinoire, il ne la quittait pratiquement jamais. Le premier arrivé, le dernier parti. Il était comme ça, Pares », a indiqué Gallagher, qui a remporté une médaille d'or aux côtés de Perry en tant que membre d'Équipe Canada au Championnat du monde de l'IIHF en 2016, quelques années avant que Perry ne s'entende avec Montréal, avant la saison 2020-2021. « Il joue dur et il place son corps dans des endroits difficiles. Ce n'est peut-être pas le gars le plus fort, mais il prend simplement soin de son corps et il sait ce qu'il faut pour être un pro et être prêt à compétitionner chaque match. Et pour ce qui est d'apporter sa contribution à chaque match... je suis heureux d'avoir pu jouer avec lui. »

08-Photo-Francois-Lacasse_NHLI-via-Getty-Images

« Et puis il y a Gio, de qui j'ai beaucoup appris. Il a un gabarit similaire, a marqué beaucoup de buts, a joué un style semblable, a joué à la même position que moi. La façon dont il était capable de trouver de petites ouvertures; j'ai beaucoup appris en le regardant, a ajouté Gallagher. J'ai pu apprendre beaucoup de choses de sa façon de penser le jeu et de celle de Pleky. »

Encore beaucoup de hockey à jouer pour Gally

Réussir en tant que professionnel est une chose, mais rester un professionnel - et demeurer constant - aussi longtemps que possible est ce qui différencie les grands joueurs des autres. La longévité dans la Ligue, surtout pour les joueurs de petite taille qui jouent plus gros qu'ils ne le sont, n'est pas le fruit du hasard.

« Gio se moquait de moi parce que tout ce que je faisais, c'était jouer au soccer, alors qu'il faisait des étirements pendant 45 minutes, s'est souvenu Gallagher. Et aujourd'hui, j'arrive à l'aréna 45 minutes plus tôt que jamais parce qu'il y a plus à faire. En vieillissant, je pense qu'il faut prendre un peu mieux soin de soi. »

Gallagher a appris à la dure comment se rétablir, même s'il continue de mettre son corps au combat tous les soirs et qu'il ne jouera probablement jamais en périphérie. Ce serait contre nature.

« Au cours de sa première année, je lui ai dit qu'il allait devoir adapter son jeu et qu'il ne pourrait pas se lancer tête première tout le temps », a récité Gionta, qui a disputé plus de 1000 matchs en 16 ans de carrière. « Je lui ai dit : "Tu devras - je ne veux pas dire « choisir » parce que tu es construit d'une certaine façon et tu vas toujours tout donner sur la glace - mais tu devras être un peu plus prudent par moments et ne pas te jeter dans toutes les mêlées. Il faut choisir les mêlées dans lesquelles on saute. »

10-Photo-Minas-Panagiotakis_Getty-Images

Un conseil avisé de la part de son ancien capitaine, qui a passé plus de dix ans et demi dans la LNH, annonçant sa retraite quelques mois avant son 40e anniversaire. Cependant, convaincre un joueur comme Gallagher de décélérer de temps à autre est plus facile à dire qu'à faire.
« Je ris parce que j'ai répété la même chose quand nous sommes allés souper ensemble il y a quelques mois. Puis, un match ou deux plus tard, il a eu une présence sur la glace où il a foncé dans le gardien, il est revenu, a frappé quelqu'un d'autre, est sorti et s'est fait défoncer à la ligne bleue... Je lui ai envoyé la vidéo par texto en lui disant : "Tu n'écoutes clairement pas mes conseils" », a dit Gionta en riant.
« Oh, on me l'a dit. On me l'a dit plusieurs fois, mais je suis un peu têtu, a rétorqué Gallagher. Écoutez, il y a des leçons qu'il faut apprendre par soi-même. »
Gallagher, dont le contrat actuel se termine à la fin de la saison 2026-2027, sait qu'il a encore beaucoup de bon hockey en lui. S'il est heureux de se remémorer ses dix premières années en tant que professionnel, il n'est pas encore prêt à regarder dans le rétroviseur, même s'il aime la chance qu'il a de payer au suivant en aidant à l'encadrement d'une nouvelle cohorte de jeunes Canadiens enthousiastes.
« Je pense que les temps changent un peu, mais, en ce qui concerne la façon dont le vestiaire fonctionne, c'est la même chose. Tout le monde a le respect de tout le monde. Chacun est un élément clé de l'équipe. Et, quand vous êtes assis dans ce vestiaire, on attend de vous que vous fassiez votre travail, et que vous soyez qui vous êtes », a-t-il expliqué.

11_-Photo-Minas-Panagiotakis_Getty-Images

« Je suis à l'aise de parler à certains de ces gars, de les aider et de faciliter un peu leur apprentissage, comme d'autres l'ont fait pour moi. On veut être dans cette position où l'on aide les gars et où l'on met l'organisation dans de bonnes conditions de réussite, a-t-il ajouté. Je m'assure que tout le monde soit respecté à travers ça. Le vestiaire est en quelque sorte notre lieu sûr. On s'en occupe et on s'assure que tout le monde se sente bien, soit heureux et s'amuse. Faire ça mène généralement à du succès sur la glace. »