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Rick Tocchet avance humblement qu'il aura surtout un rôle d'observateur avec le Canada à la Confrontation des 4 nations, et qu'il va porter une attention particulière aux détails les plus infimes afin de les mettre en pratique dès son retour derrière le banc des Canucks de Vancouver.

Gagnant du trophée Jack-Adams à titre d’entraîneur de l’année dans la LNH, la saison dernière, Tocchet a également un long curriculum vitae en tant que joueur dans la LNH et sur la scène internationale. Il a notamment fait partie des équipes victorieuses de son pays à la Coupe Canada en 1987 et 1991, étant dirigé les deux fois par Mike Keenan.

Nommé entraîneur adjoint pour le Canada en compagnie de Bruce Cassidy, Peter DeBoer et Misha Donskov pour travailler avec l’entraîneur-chef Jon Cooper, Tocchet est impatient de participer à ce tournoi qui sera, selon lui, d’une très grande qualité.

« Diriger les Connor McDavid de ce monde, Brayden Point, Nathan MacKinnon, Sidney Crosby, avec qui j’ai une relation particulière… Je regarde la liste et je peux vous dire que je vais être comme un petit espion à absorber de l’information et à apprendre de tous ces gars-là », a dit Tocchet avant d’arriver à Montréal.

Le Canada affrontera la Suède dans le premier match du tournoi au Centre Bell, mercredi (20 h HE, MAX, truTV, TNT, SN, TVAS).

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Les coéquipiers des Penguins de Pittsburgh Rick Tocchet et Ulf Samuelsson célébrant leur conquête de la Coupe Stanley 1992 contre les Blackhawks de Chicago; et Tocchet sur la patinoire du Madison Square Garden pendant les séries éliminatoires, cette année-là.

Tocchet a remporté la Coupe Stanley en 1992 en tant qu’attaquant avec les Penguins de Pittsburgh, puis en 2016 et en 2017 en tant qu’entraîneur adjoint avec cette même équipe. Il a joué et il est aujourd’hui entraîneur, alors il comprend l’importance du rôle joué par chacun, l'importance de parfois sortir de sa zone de confort au bénéfice de l’équipe.

« Tu dois vraiment être bon dans les casse-têtes à tout moment, a imagé Tocchet. Certains gars ont l’habitude de jouer 24-25 minutes par match et d’être sur la première vague de l’avantage numérique, mais dans certaines situations, tu dois être capable d’occuper une chaise différente et de faire un travail différent.

« Ici, tu devras possiblement être un certain type de joueur pour un moment en particulier. Tu dois être en mesure de laisser ton égo de côté et d’être la pièce manquante du casse-tête dans une situation de jeu bien précise.

« La Confrontation des 4 nations est un tournoi très court. Tu n’as pas quelques semaines pour t’en remettre si tu connais un mauvais match. Tu ne peux pas te permettre de connaître un mauvais match. Tu as besoin que tout le monde pousse dans la même direction sur chaque détail. »

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Rick Tocchet patine derrière le but de la Suède tandis que Peter Sundstrom et le gardien Peter Lindmark suivent la rondelle lors d'un match de la Coupe Canada 1987 au Forum de Montréal.

Tocchet est revenu sur une conversation qu’il a récemment eue avec Crosby, le capitaine du Canada qui a mené les Penguins aux titres de la Coupe Stanley de 2009, 2016 et 2017. Crosby a également remporté la médaille d’or avec le Canada aux Jeux olympiques de 2010 à Vancouver et de 2014 à Sotchi, au Championnat du monde 2015 et à la Coupe du monde de hockey 2016.

« Quand j’ai parlé à Sid l’autre jour, il m’a dit : "Je veux savoir, si jamais je joue à l’aile, que dois-je faire sur une mise en jeu dans cette situation?" C’est le genre de détail sur lequel s’attarde un gars comme Sid. Pour moi, c’est incroyable. »

Tocchet est prêt à faire tout le nécessaire pour aider le Canada aux 4 nations.

« Je vais mettre la main à la pâte, peu importe les besoins, que ce soit pour certaines tâches, certains systèmes de jeu, a-t-il lancé. Dans un tournoi comme celui-ci, tu tentes d’aider les joueurs, mais tu les laisses aussi aller. Tu ne peux pas "surcoacher". »

Tocchet apporte un riche bagage d’expérience au sein du personnel d’entraîneurs du Canada, lui qui a également occupé des postes derrière le banc des Coyotes de l’Arizona, du Lightning de Tampa Bay et de l’Avalanche du Colorado.

« Il y a un peu une philosophie du "ouvre la porte et laisse-les jouer", mais il y a également quelques lignes directrices et une structure que tu veux leur apporter, a-t-il dit en vue des 4 nations. Ce sont des joueurs de première classe. Laisse-les aller et ne t’impose pas trop. »

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Rick Tocchet fonce vers le gardien suédois Peter Lindmark, couvert par Peter Sundstrom, lors d'un match de la Coupe Canada 1987 au Forum de Montréal.

Tocchet a des souvenirs marquants des éditions de la Coupe Canada de 1987 et de 1991. Parmi les 16 entraîneurs des quatre équipes à la Confrontation des 4 nations, il est le seul à avoir joué à la Coupe Canada. L’entraîneur adjoint de la Suède Daniel Alfredsson et l’adjoint de la Finlande Tuomo Ruutu ont représenté leur pays à la Coupe du monde de 2004; Alfredsson a également participé à celle de 1996.

En 19 saisons dans la LNH entre 1984 et 2002, Tocchet a inscrit 952 points (440 buts, 512 passes) en 1144 matchs de saison régulière avec les Flyers de Philadelphie, les Penguins, les Kings de Los Angeles, les Bruins de Boston, les Capitals de Washington et les Coyotes. Il a également récolté 11 points (52 buts, 60 passes) en 145 rencontres de séries éliminatoires.

« J’ai été chanceux de pouvoir remporter la Coupe Stanley comme joueur, puis deux autres fois comme entraîneur adjoint à Pittsburgh, a dit Tocchet. Pour moi, la Coupe Canada 1987 est ce qui s’en approche le plus. Mais la Coupe Stanley reste au sommet. Jouer une saison complète avec tes coéquipiers pour ensuite triompher, il n’y a rien qui bat ça.

« Je me souviens de la Coupe Canada 1987 avec les Russes, de la situation politique à l’époque, de la façon dont ils étaient perçus comme l’équipe de hockey supérieure. L’Armée rouge, des joueurs qui s’entraînaient à toute heure du jour pour devenir cette grosse machine rouge.

« Ces matchs de la Coupe Canada ont été magiques pour moi. On voyait qu'il y avait de la haine dans la compétitivité. On respectait leurs joueurs, mais quand on gagnait, on gagnait pour notre pays. »

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Rick Tocchet du Canada avec Jim Johnson des États-Unis devant le gardien de but Mike Richter lors du premier match de la finale de la Coupe Canada 1991 à Montréal.

Tocchet, un joueur des Flyers âgé de 22 ans pendant la Coupe Canada, considère le fait d'être membre de cette équipe nationale « comme l'une des plus grandes réalisations de ma carrière ».

« Mike Keenan, mon entraîneur chez les Flyers, a joué un grand rôle dans mon invitation au camp, mais il y a eu tellement de bons joueurs qui ont été retranchés, des membres du Temple de la renommée, s’est-il souvenu. Je suis très honoré d'avoir été choisi pour cette équipe. Apprendre de joueurs comme Wayne Gretzky, Mario Lemieux, Mark Messier, Paul Coffey, Raymond Bourque… c’est une expérience que je n’oublierai jamais. »

Le but dramatique de Lemieux sur une passe de Gretzky à 18:34 de la troisième période, lequel a mené le Canada vers une victoire de 6-5 dans le match no 3 (série deux de trois) de la finale contre l’Union soviétique, pourrait être le deuxième but le plus célèbre et le plus revu de l’histoire du pays, derrière celui de Paul Henderson lors du match décisif de la Série du siècle en 1972 à Moscou.

Dans l’ombre de ce but de Lemieux qui a soulevé le toit du Hamilton's Copps Coliseum, il y a le but en avantage numérique de Tocchet en première période, puis sa passe sur le but de Brian Propp un peu plus de cinq minutes plus tard. Sans ça, le score aurait pu être bien différent.

De plus, Tocchet jouait presque sur une jambe, lui qui avait subi une sévère entorse aux ligaments de son genou gauche neuf jours plus tôt. Il s’est tout de même présenté tel un bon soldat, avant de rater le match de demi-finale du Canada contre la Tchécoslovaquie, avant d’aggraver sa blessure dans le premier match contre les Soviétiques, ce qui l’a forcé à rater le match no 2.

Tocchet est retourné à Philadelphie pour rendre visite à l’orthopédiste des Flyers.

« Il ne m’a pas fait d’injection ou quoi que ce soit, a-t-il raconté. Le docteur a simplement regardé mon genou, et je lui ai dit : "Je veux disputer ce match plus que tout autre match dans ma vie". Il m’a répondu : "Je ne peux pas te blâmer le jeune". »

Tocchet est retourné à Hamilton et encore aujourd’hui, il accorde tout le mérite au massothérapeute Jurgen Merz, qui a fait des miracles au sein de la dynastie des Oilers d’Edmonton des années 1980, de l’avoir remis sur pieds.

« Est-ce que vous avez déjà vu le film Karate Kid, lorsque Daniel se blesse à la jambe et que M. Miyagi le soigne, a demandé Tocchet en riant. C’était un moment semblable avec Jurgen. Peu importe ce qu’il a fait à mon genou, il m’a permis de jouer et de tenir tout le match. Je représentais un cas incertain au départ, mais il m’a permis de jouer, et le reste appartient à l’histoire. »

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Dale Hawerchuk verse du champagne sur Rick Tocchet dans le cadre de la célébration du gain du Canada 6-5 contre l’Union soviétique dans le match décisif de la Coupe Canada 1987 au Copps Coliseum de Hamilton, en Ontario.

Cette histoire ne s’est toutefois pas très bien amorcée pour le Canada. Les Soviétiques ont pris les devants 3-0 après huit minutes de jeu, ce qui a ébranlé l’équipe locale et leurs partisans.

Mais Igor Kravchuk a ensuite été puni pour double-échec. Keenan a tapé sur l’épaule de Tocchet pour l’envoyer dans la mêlée pour le jeu de puissance.

« Mike m’a dit d’y aller, mais je n’ai pas bougé, a mentionné Tocchet. Pourquoi est-ce que c’est moi qui suis choisi, avec tout le talent que nous avions? Alors il m’a tapé sur l’épaule à nouveau et m’a dit de sauter sur la glace.

« J’y suis donc allé, la rondelle est arrivée sur mon bâton et j’ai marqué. Mike nous a envoyés à nouveau sur la glace quelques présences plus tard. (Brent) Sutter, Propp et moi avons accompli notre boulot, nous avons réduit l’écart 3-2 et la foule s’est déchaînée.

« Cette séquence a été l’une des plus importantes de ma carrière, parce que nous avons permis à l’équipe de revenir dans le match, et nous avons donné la chance à Gretzky et Lemieux de prendre le relais. Nous avons fait notre travail, Mario et Gretz peuvent maintenant opérer leur magie. C’était notre objectif. »

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Rick Tocchet des Penguins de Pittsburgh qui représente la Conférence prince-de-Galles, et qui affronte Phil Housley des Jets de Winnipeg de la Conférence Campbell, au cours du Match des étoiles de la LNH 1993 au Forum de Montréal. En 1984, Tocchet a inscrit le premier de ses 440 buts de saison régulière dans la LNH au Forum.

Le but de Lemieux préparé par Gretzky a marqué l’imaginaire, et a fait trembler les fondations de la ville de l’acier qu’est Hamilton, en plus de lancer des célébrations dans le vestiaire qui s’apparentaient à celles que Tocchet allait par la suite vivre comme joueur et comme entraîneur adjoint des Penguins.

« L’euphorie… nous étions un groupe de joueurs de différentes équipes qui se sont rassemblés pour représenter notre pays, s’est-il remémoré. Il n’y avait pas de place pour l’ego. Je pense que nous avons passé au moins un mois ensemble au camp d’entraînement. Il y a eu quelques secondes après ce match où je me demandais ce que je faisais dans ce vestiaire. Je regardais autour de moi, et je voyais Wayne, Mario, Paul. C’était surréel.

« J’ai gardé mon chandail, et on m’a remis une bague commémorative. Ils ont aussi fabriqué un pendentif de la Coupe Canada, et je l’ai donné à ma défunte mère. Nous étions des immigrants italiens. Elle a grandi en adorant le hockey, et elle était là pour vivre cette conquête. »

La performance de Tocchet était sur toutes les lèvres dans le vestiaire.

« Rick était là sur une jambe et il a fait tourner l’allure du match en notre faveur, a affirmé Gretzky. Il est un jeune fantastique. Je serais fier d’être son coéquipier à tout moment. »

« Rick Tocchet … je veux dire, est-ce que ce gars-là a du cran ou quoi, a renchéri Sutter. Je n’éprouve que du respect pour lui. Il a tellement de cœur. »

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Rick Tocchet, en tant qu’entraîneur adjoint des Penguins de Pittsburgh en 2015-16, dessine un jeu pour le capitaine Sidney Crosby et Chris Kunitz pendant une pause.

Aujourd’hui, Tocchet a hâte de ressentir l’électricité dans l’air du Centre Bell, l’un de ses amphithéâtres préférés, dans le cadre de la Confrontation des 4 nations. Il s’agit de la ville où il a inscrit le premier de ses 440 buts de saison régulière dans la LNH, aux dépens du gardien des Canadiens Steve Penney au Forum de Montréal le 15 octobre 1984.

« Lorsque vous allez à Montréal, les partisans font en sorte que tu veux jouer au hockey, a-t-il lancé. S’il nous arrive d’être fatigués, dans cet aréna, les partisans font en sorte que tu oublies ta fatigue. »

Lorsqu’il va voir les chandails ornés de la feuille d’érable, Tocchet pourrait plonger dans un ou deux de ses souvenirs concernant la Coupe Canada, tout en savourant chacun des moments qu’il va vivre cette semaine.

« J’ai encore tellement de souvenirs de la Coupe Canada, et je m’y suis fait des amis pour la vie, a souligné Tocchet. Wayne et Mario et Paul Coffey font partie de mes meilleurs amis. C’est difficile à imaginer. Ce championnat m’a apporté des amis pour la vie.

« Aujourd’hui, aux 4 nations, j’ai la chance de parler de hockey avec tous ces gens, d’apprendre de ces gars-là, ce qu’ils font, la manière dont ils pensent sur la glace, et ce sera inestimable pour moi en tant qu’entraîneur. »

Photo principale : Rick Tocchet pendant la période d’échauffement avec le Canada au Forum de Montréal avant un match de 1987 à la Coupe Canada; Tocchet derrière le banc des Canucks de Vancouver avant un match en 2024.