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MONTRÉAL – Être nommé premier choix au total du Repêchage de la LNH vient avec son lot de pression, qui peut peser sur n’importe quel joueur… et Juraj Slafkovsky ne fait pas exception à la règle.

L’attaquant de 6 pi 3 po et 220 lb met autant – et possiblement plus – que quiconque cette pression sur ses épaules, surtout après une saison recrue dans la LNH qui s’est terminée plus tôt que prévu en raison d’une blessure. Et bien que personne n’ait dit que jouer dans la LNH serait facile – en tant qu’adolescent, en plus – Slafkovsky aurait certainement préféré que sa disette de matchs sans marquer à la fin de la saison dernière ne se transpose pas à sa deuxième. 
 
« Je pense que la pression sur les épaules de Slaf vient en grande partie de lui-même. On pouvait parfois le voir tôt dans la saison, dans son langage corporel, par exemple », a expliqué l’entraîneur adjoint Trevor Letowski, un vétéran de 616 matchs dans la LNH. « On essaie simplement de le mettre dans une situation où il peut réussir. » 
 
Mais les entraîneurs ne se fiaient pas qu’à sa feuille de pointage pour mesurer le succès de Slafkovsky. En fait, ils étaient très satisfaits de sa progression plus tôt en 2023-2024, même si elle ne se traduisait pas par des buts ou des mentions d’aide. 
 
« Je trouve qu’il y a beaucoup de matchs cette année lors desquels Slaf a joué de façon extraordinaire, mais il n’amassait pas de points », a fait remarquer l’entraîneur-chef Martin St-Louis en février. « Quand je regardais ça, je me disais : “Ce ne sera pas long avant qu’un match comme celui-là lui permette d’aller chercher deux ou trois points.” »  

D’ailleurs, pas plus tard que mardi dernier, l’attaquant a complété le premier tour du chapeau de sa carrière dans la LNH.

Si St-Louis a du flair, il semblerait que tout le personnel d’entraîneurs ait aussi remarqué que plusieurs éléments dans le jeu et la préparation de Slafkovsky démontraient qu’il était prêt à assumer un rôle plus important. 
 
« J’aime beaucoup la façon avec laquelle il s’est mis à faire les petites choses avec fierté sans la rondelle, surtout défensivement, comme bloquer des tirs et être organisé lorsque [l’adversaire] arrive dans notre zone, a souligné Letowski. Il jouait peut-être avec moins de régularité dans son jeu l’année dernière; ses trajets [sur la glace] sont plus linéaires [maintenant], et il est devenu un joueur assez fiable défensivement. Nous sommes satisfaits de la façon dont il a progressé de ce côté de la glace. » 
 
En tenant compte de ces observations, et en temps opportun, St-Louis et son groupe ont décidé de créer un premier trio composé de Slafkovsky, de Cole Caufield et du capitaine Nick Suzuki, tôt en décembre. Il n’est donc pas surprenant que la production offensive de Slafkovsky se soit mise à considérablement augmenter, lui qui a connu une séquence de huit matchs consécutifs avec au moins un point peu de temps après.
 
Les entraîneurs savaient que placer Slafkovsky dans une position qui lui permettrait de réussir et de grandir serait très important pour développer son jeu. Plusieurs éléments faisaient partie de l’équation : faire preuve de patience, travailler avec les entraîneurs – dont le directeur du développement des joueurs des Canadiens, Adam Nicholas – et demander l’aide de coéquipiers comme Suzuki et Caufield. 
 
« [Slafkovsky] est un joueur très important pour nous présentement, mais il le sera aussi pour très longtemps, et nous voulons qu’il se sente bien, a expliqué Letowski. Nous pensions que c’était le bon moment; on l’a placé dans une situation pour qu’il réussisse avec de bons joueurs, en plus de donner quelques responsabilités à Nick et à Cole pour l’aider à élever son niveau de jeu d’un cran. Et je pense que c’est ce qui s’est produit. » 
 
À ce sujet, la séquence payante de Slafkovsky survenue du 25 janvier au 17 février s’est terminée par un total de 12 points (6B, 6A) obtenus en huit matchs. C’est deux points de plus que ce que le précédent premier choix au total des Canadiens, Doug Wickenheiser, avait réussi à inscrire en 1980-1981, lui qui détenait jusqu’ici le record de concession de la plus longue série de points amassés par un adolescent. Quelques semaines plus tard, Slafkovsky a battu son propre record de saison, amassant des points dans neuf affrontements de suite.

À l’aube de son 100e match dans la LNH, plusieurs comparaient Slafkovsky à quelques jeunes joueurs actuels de la Ligue, ce qui a suscité de l’enthousiasme chez les partisans du Tricolore. En effet, les 41 points de Slafkovsky en marge du palier des 100 rencontres ne sont pas bien loin de ceux d’autres premiers choix au total comme Rasmus Dahlin (56), Owen Power (45) et Jack Hughes (42), en plus de devancer le total d’Alexis Lafrenière (33). L’ailier slovaque a également établi un nouveau record pour le nombre de points obtenus en une saison par un adolescent au sein de l’organisation, dépassant le seuil des 39 points de Mario Tremblay de 1974-1975.

Il est bon d’ajouter d’autres comparatifs à cette liste, à commencer par la vedette de l’Avalanche Mikko Rantanen. En février 2022, la légende du Colorado Peter Forsberg avait évoqué des ressemblances entre Slafkovsky et Rantanen dans une entrevue accordée au média slovaque Dennik N. Rantanen avait cumulé 51 points à ses 100 premiers matchs. Puis, il y a le capitaine des Panthers de la Floride, Aleksander Barkov, qui avait totalisé 43 points pour le même nombre d’affrontements.

Mais Slafkovsky veut forger sa propre identité dans la Ligue, même s’il s’inspire des noms énumérés ci-haut.

« C’est un excellent joueur. J’essaie de retenir quelque chose de chaque joueur, et c’est certain qu’il en fait partie », a déclaré Slafkovsky à propos de Barkov, ancien lauréat des trophées Selke et Lady-Byng. « Il joue de la bonne façon et il est toujours du bon côté de la rondelle. Il gagne tellement de batailles pour la rondelle. Lorsque je le regarde jouer, j’essaie d’apprendre le plus de choses possible, mais je veux aussi être moi-même au bout du compte. »

Certains de ses coéquipiers comme Jake Evans ont remarqué que le jeune ailier forgeait peu à peu son identité, et pas seulement sur la feuille de pointage.

« Il a beaucoup progressé depuis sa première saison, de ses 30 à 40 premiers matchs à ce qu’il fait maintenant : jouer sur le premier trio, marquer de gros buts, jouer de nombreuses minutes », a déclaré Evans juste avant le 100e affrontement de Slafkovsky à Tampa, soulignant notamment sa volonté et son habileté à bloquer des tirs. « Il est beaucoup plus mature, fait des jeux intelligents et a beaucoup plus confiance en lui. Il a vraiment plus de fougue, et ça se voit. »

Afin de continuer de bâtir sa confiance et de s’assurer que son parcours se poursuive, Slafkovsky devra continuer de travailler fort pendant les entraînements, en plus d’utiliser tous les outils d’apprentissage et de perfectionnement que lui offre l’organisation.

Ses entraîneurs espèrent certainement ce que sera le cas.

« Jusqu’à présent, tout se passe bien, mais il est tellement jeune. Je le vois comme un gars qui veut toujours s’améliorer. On espère tous [que les joueurs] gardent cette détermination et cette soif d’apprendre. Il est dans un environnement qui encourage ça et qui rend le tout possible », a dit St-Louis lors de la première séquence de points historique de Slafkovsky. « Je pense que ça va motiver des joueurs comme Slaf à vouloir utiliser toutes les ressources et l’environnement disponibles pour les aider à progresser. Ce qu’on veut faire avec lui n’a pas d’importance; tout commence avec lui, son attitude et son engagement. Ç’a été assez impressionnant jusqu’à présent. »

Un texte de Dan Braverman, traduit par Hélène Cloutier.