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SAN JOSE - En voyant Matt Murray se rendre vers sa mêlée de presse d'après-match, lançant « excusez-moi, excusez-moi » alors qu'il se frayait un chemin au travers une meute de journalistes comme un adolescent qui essaie de passer devant des gens en file d'attente au parc d'attractions, jamais vous n'auriez deviné que quelques minutes plus tôt, le gardien recrue des Penguins de Pittsburgh venait d'accorder le but plus important de sa carrière.
Joonas Donskoi a dirigé un tir qui a ricoché sur le masque de Murray pour ensuite se retrouver dans le filet à 12:18 de la prolongation, procurant ainsi une victoire de 3-2 aux Sharks de San Jose contre les Penguins dans le troisième match de la Finale de la Coupe Stanley, samedi, au SAP Center.

Murray a repoussé 23 des 26 tirs dirigés vers lui, ce qui n'a pas suffi pour empêcher les Sharks de réduire à 2-1 leur déficit dans cette série quatre de sept.
« Je ne vais assurément pas m'attarder là-dessus », a déclaré Murray, riant à moitié pendant que les mots sortaient de sa bouche.
Et voilà ce qu'il y a de bien chez Murray, du haut de ses 22 ans.
Il peut allouer ce qu'il décrit lui-même comme « un mauvais but », comme celui qu'il a concédé à Joel Ward à 8:48 de la troisième période et qui a égalé le score 2-2, prendre une grande respiration et tout oublier. Il peut laisser passer un filet vainqueur en prolongation et, quelques minutes plus tard, agir comme si rien n'était arrivé.
Voilà quelque chose qu'il fait bien. Aller de l'avant, c'est là quelque chose qu'il fait bien. Il a une fiche de 4-0 en séries éliminatoires de la Coupe Stanley après avoir subi la défaite. C'est là un bon signe pour les Penguins en vue du quatrième match, qui aura lieu lundi.
« Après avoir donné un but, tu ne peux pas l'enlever du filet et tu ne peux pas l'effacer du tableau indicateur, alors tu vas de l'avant et tu penses simplement à arrêter le tir suivant, a souligné Murray. J'ai réussi de bons arrêts en troisième et d'autres en prolongation. Malheureusement, celui-là [en prolongation] s'est faufilé derrière moi, mais je me suis bien senti tout au long de la soirée, pour être honnête. »
C'est ce que les Penguins adorent de Murray. Ils aiment son calme, son sang-froid. Ils ont confiance en lui. Tout va bien et c'est de bon augure en ce qui concerne son avenir à Pittsburgh; peut-être même qu'il va se retrouver avec une bague de la Coupe Stanley au doigt à sa première présence en séries.
Mais il y avait un seul problème avec tout ce qui s'est passé, samedi. Le but de Ward, celui qui a égalé le score, n'aurait jamais dû survenir.
Il y a plusieurs raisons pour lesquelles Ward n'aurait dû jamais se retrouver en position de décocher un tir frappé sans être gêné, un pied en dessous de l'endroit où est inscrit STANLEY CUP FINAL (Finale de la Coupe Stanley) dans la zone des Penguins.
Sidney Crosby aurait dû diriger la rondelle profondément en zone adverse. Kristopher Letang n'aurait pas dû suivre la poussée à l'attaque avec Crosby quand les Penguins étaient encore à quelques secondes d'écouler la punition mineure double de quatre minutes de Nick Bonino pour bâton élevé.
Ward a tiré pendant que les Sharks s'avançaient à trois contre deux.
Peu importe, Murray sait qu'il aurait dû faire l'arrêt. C'est un tir qu'il arrêterait probablement à tout coup si Ward dégainait neuf autres tirs du genre.
« Je me suis bien senti tout au long de la soirée, alors je ne suis pas prêt à dire qu'un mauvais but équivaut nécessairement à un mauvais match », a noté Murray.
Personne ne prétend que c'est le cas. Mais dans le contexte d'une Finale de la Coupe Stanley, quand un gardien laisse passer un tir frappé de 41 pieds auquel on n'oppose aucun obstacle, coûtant ainsi à son équipe l'avance en troisième période, on n'oublie pas le jeu en haussant simplement les épaules.
On en discute et on analyse le tout jusqu'au match suivant.
Murray l'a décrit comme un but « un peu bizarre ». Il a évoqué le fait que le point de contact dans l'élan de Ward est plus reculé que la moyenne des joueurs, que la rondelle est tombée à la dernière seconde et qu'il a « simplement balayé la main » pour tenter de gober le disque et l'a « raté ».
Est ensuite venu l'aveu de culpabilité.
« Ce n'était absolument pas un bon but à accorder, a lancé Murray. Mais j'ai trouvé que j'ai fait de bons arrêts par la suite. »
Aucun doute. Encore une fois, c'est pourquoi les Penguins l'adorent autant.
« Ils ont appliqué de la pression en fin de match et il a fait des arrêts, a noté Crosby. Il a fait des arrêts en prolongation. [Murray] a été excellent. Il nous a donné une chance de l'emporter. »
Il a réussi à le faire en effectuant des arrêts étincelants en prolongation.
Murray a résisté au défenseur des Sharks Brent Burns à bout portant et il a ensuite gobé la rondelle après une minute de jeu en période supplémentaire.
Il a bloqué le tir de Burns du coin de la patinoire à 6:18 et il a réalisé un arrêt formidable sur le tir des poignets de Joe Thornton à l'issue d'une attaque à deux contre un avec Joe Pavelski à 6:59. Pavelski a menacé quelques secondes plus tard, mais Murray s'est bien collé au poteau gauche et il a réussi à repousser ce tir-là aussi.
Mais le tir de Donskoi avait une vélocité que Murray ne pouvait bloquer. Sur le tir ascendant, le disque a frôlé le côté de son masque et abouti dans le coin supérieur droit du filet.
« Je ne suis pas certain que la rondelle a été déviée, mais je sais qu'elle roulait quand il a pris son élan, a dit Murray. La façon dont son bâton était placé, il était pas mal fermé alors je ne pensais pas que ça s'en allait vers le coin supérieur ; je crois qu'il essayait juste d'atteindre le filet. La rondelle a roulé ou a frappé quelque chose et elle a ricoché sur le côté de ma tête et s'est faufilée. Le tir était bien placé, j'imagine. »
Au point où il devenait impossible à arrêter?
« Il y a toujours quelque chose que tu aurais pu faire de différent, a lancé le jeune gardien, refusant de s'enlever le blâme. Mais c'est certain que je ne passerai pas de temps à me morfondre. »
Il ne l'a certainement pas fait samedi soir.
Murray s'est présenté devant les journalistes avec leurs caméras et leurs enregistreuses et s'est comporté comme si rien de particulier n'était arrivé. Il ne semblait aucunement anéanti. C'est ce qui fait son charme et c'est pourquoi les Penguins lui font confiance et l'aiment autant.
Mais peut-être qu'à l'occasion du quatrième match, il n'accordera pas de but sur un tir frappé de 41 pieds auquel on n'aura pas fait obstacle. Si c'est le cas, ils l'aimeront encore plus. Et ils pourraient même l'emporter.