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Mike Bossy, puis là Guy Lafleur… Deux pans de mur du hockey québécois qui disparaissent en moins d'une semaine, faudrait que ça arrête. J'ai beaucoup de peine. « Le Démon blond » était mon idole d'enfance. Un superhéros que je croyais indestructible, comme tous les superhéros. Il part beaucoup trop tôt.

Que quelques lignes d'écrites, et, déjà, je dois refouler des larmes. L'exercice s'annonce émotif.
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Au cours des prochaines journées, on repassera en revue tous les exploits de « Flower » et on discourra sur la place qu'il occupe dans l'histoire des Canadiens de Montréal et de la LNH.
On fera également l'éloge de la super-vedette accessible et généreuse de son temps qu'il a toujours été. Je tiens à ce que vous sachiez que tout ce que vous lirez ou entendrez précisément sur la thématique est vrai à l'exposant 1000. Laissez-moi vous raconter.
Retour dans le temps, le 14 juillet 1989 : le jeune journaliste de « La Presse canadienne » affecté à la couverture du hockey que je suis ne croit pas à la chance qu'il a quand les Nordiques de Québec embauchent Guy Lafleur.
Guy Lafleur à Québec! Moi qui commence dans le métier, je côtoierai mon idole d'enfance sur une base régulière. Pincez-moi quelqu'un!
Un « fan » est parfois déçu de faire la connaissance de son héros parce qu'il n'est pas comme il l'idéalisait. C'était ma crainte. Une crainte que j'ai tôt fait de repousser du revers de la main.
Mon idole était encore mieux que je l'imaginais en signant la carte de membre de son « fan-club » en 1977.
Je n'exagère pas. Affable et gentil, celui que j'ai appris à appeler tout simplement « Guy » m'a fait sentir tout aussi important que les vétérans journalistes qui, comme moi, voyageaient avec l'équipe. Il était du genre à me saluer en arrivant à l'aéroport par une légère tape sur l'épaule, ou encore avec une boutade.
Sur la route, surtout à sa deuxième saison avec les Nordiques, il s'invitait parfois à souper avec nous, les journalistes, la veille des matchs. Il disait à la blague que ça ne lui tentait pas d'aller manger dans un « fast food » avec les vertes recrues Mats Sundin et Owen Nolan.
Guy Lafleur qui vous demande s'il peut vous accompagner pour le repas, ça ne se refuse pas! Je n'oublierai jamais ces heures passées à écouter les savoureuses anecdotes qu'il nous contait. Un pur délice! En plus, Guy insistait toujours pour s'acquitter du coût du vin. Il nous disait : « Choisissez-en un bon, pas de la piquette, je m'occupe du reste ».
Revenez un instant en 2022 et imaginez Carey Price s'inviter à souper avec les journalistes... C'était une tout autre époque.
Il fallait vivre le phénomène Guy Lafleur dans l'Ouest canadien afin de comprendre l'ampleur de sa popularité qui s'étendait jusque dans l'Est, dans les provinces de l'Atlantique. De Vancouver à Winnipeg, en passant par Edmonton et Calgary, on lui réservait le traitement de « rock star ».
Après chacun des matchs, l'autobus des Nordiques était pris d'assaut par des centaines d'amateurs, désireux d'obtenir un autographe ou de se faire prendre en photo, ou les deux.
Une à la fois, Guy répondait à toutes les demandes, avec le sourire et en échangeant avec chacun. La plupart du temps, les soirs de matchs où nous demeurions dans la ville, il disait au responsable des relations avec les médias Jean Martineau de partir sans lui, qu'il rentrerait à l'hôtel en taxi.
C'était un athlète plus grand que nature, comme on en a perdu le moule. Il suivait l'enseignement que lui avait inculqué son maître à penser, le grand Jean Béliveau. Comme Béliveau, il prenait le temps de signer les cartes de hockey et les photos qu'on lui envoyait à sa résidence et de les retourner par la poste.
Je n'ai pas le souvenir de lui avoir confié qu'il avait été mon idole d'enfance. Ça me gênait. C'est la même gêne qui m'a paralysé le matin de son tout dernier match, le 31 mars 1991 (la journée de ma fête). Je n'ai pas tendu les bras pour avoir un de ses bâtons en bois bleu « CHIMO » autographiés qu'il distribuait aux collègues.
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J'ai revu Guy à d'innombrables reprises après sa retraite. Chaque fois, la poignée de main était franche et sincère, tout autant que ferme.
Au début des années 2000, au retour d'un tournoi de hockey mineur estival dans la région de Montréal, j'ai vendu l'idée aux parents de nos enfants d'arrêter à son restaurant de Berthier. Je leur ai dit que si Guy était présent, ça lui ferait plaisir de signer des autographes pour les jeunes… et les moins jeunes.
C'est exactement ce qui s'est produit. Guy avait été d'une générosité sans bornes. Des parents m'en parlent encore.
Guy Lafleur, c'était ça.
En reste-t-il des comme lui? Non, parce que c'était mon idole.