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Notre chroniqueur Anthony Marcotte nous parle de l'actualité chez le Rocket de Laval ainsi que dans l'ensemble de la Ligue américaine de hockey (LAH). Il permettra aux partisans de suivre assidûment ce qui se passe dans l'antichambre de la meilleure ligue de hockey au monde.
Le Gatinois Hendrix Lapierre dispute présentement sa première saison complète chez les professionnels avec les Bears de Hershey, et il découvre à quel point il s'agit d'un marché unique en son genre dans la Ligue américaine de hockey.

Les Bears, qui forment l'équipe la plus titrée de l'histoire de la LAH avec ses 11 championnats, sont le club-école des Capitals de Washington depuis 2005. Hershey est une toute petite ville de 15 000 habitants du sud de la Pennsylvanie, qui est aussi connue comme la ville du chocolat en raison de l'entreprise du même nom qui y est située.
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« Tout ce que j'entendais au sujet de Hershey n'était que positif avant que j'arrive ici au camp d'entraînement. J'avais du mal à croire tout ce que les gens me racontaient parce qu'il me semble qu'un aussi gros amphithéâtre (le Giant Center avec ses 10 500 places) toujours rempli, ça ne faisait pas de sens. Et pourtant! Tout ce que les gens me disaient sur Hershey était tout à fait vrai, et plus encore! », racontait Lapierre en souriant la semaine dernière lors de la seule visite de la saison des Bears à Laval.
Il faut avoir visité l'endroit pour bien comprendre l'atmosphère qui règne en ville lors des soirs de match. Il y règne une réelle culture gagnante en ville, malgré le fait qu'un club-école soit toujours à la merci des décisions qui se prennent en haut lieu. Les Bruins de Boston avaient été les premiers à y installer leurs pénates en 1938 et ils sont revenus à Hershey à trois reprises depuis ce temps. Les gens de la place auront aussi pu encourager les espoirs des Red Wings de Detroit, des Penguins de Pittsburgh, des Sabres de Buffalo, des Flyers de Philadelphie, de l'Avalanche du Colorado, du Lightning de Tampa Bay et même des Nordiques de Québec l'espace d'une saison en 1980-81. Les entraîneurs Bob Hartley et Bruce Boudreau y ont notamment gagné des championnats avant de faire le saut dans la LNH.
Depuis, ce sont les Capitals qui ont la main heureuse dans le marché de Hershey et tout porte à croire qu'ils y resteront encore longtemps. Louis Robitaille, l'actuel entraîneur et directeur général des Olympiques de Gatineau, faisait partie de la formation au moment du transfert du club-école des Capitals à Hershey en 2005 depuis Portland dans l'État du Maine. Dès sa première saison avec les Bears, Robitaille remportait le championnat de la coupe Calder. Des souvenirs impérissables pour celui qui aura disputé 200 matchs en carrière avec les Bears et qui occupe encore une place de choix parmi les joueurs les plus appréciés de l'histoire du club.
« Les gens n'ont pas idée à quel point c'est spécial de jouer et de vivre à Hershey, explique Robitaille. Tout est parfait en ville. Les gens sont fiers de leurs Bears. Le gazon est bien coupé et ça sent le chocolat! En plus, ils ont réussi à créer des relations avec leurs joueurs qui perdurent encore aujourd'hui. J'y avais encore ma maison jusqu'à tout récemment, avant que je revienne m'installer au Québec pour diriger des équipes dans la LHJMQ. J'étais loin d'être le seul et encore aujourd'hui, d'anciens joueurs comme Bruce Boudreau, Spencer Carbery et Frédéric Cassivi habitent encore l'endroit. »
Chaque ville de la Ligue américaine a ses propres particularités. À Laval, le Rocket évolue tout près de son marché principal, ce qui crée une relation de proximité pour les partisans avec les Canadiens. D'autres organisations de la LNH ont fait le même pari au cours des dernières années, notamment à Calgary pas plus tard que cet été. Ce n'est pas tout à fait le même environnement pour les espoirs des Capitals qui se développent à près de trois heures de route de la capitale américaine dans le plus petit marché du circuit… à l'abri des distractions.
« C'est la ville idéale pour le développement des joueurs », estime Bruce Richardson, l'entraîneur de l'Armada de Blainville-Boisbriand qui a disputé 155 matchs en carrière à Hershey. « Il n'y a qu'un bar en ville, alors tout est propice à se concentrer sur le hockey. Aller voir un match là-bas pour les gens, c'est l'activité de la semaine. Presque tout le monde travaille pour (l'entreprise) Hershey Corporation. J'ai adoré jouer là-bas et encore aujourd'hui, ma femme me dit qu'elle y retournerait demain matin. »
« C'est vraiment une belle expérience de jouer ici, a poursuivi Lapierre. En parlant avec les gens, tu te rends compte qu'il y a beaucoup de partisans qui font pas mal de route pour venir nous voir jouer. Partout où on va en ville, les gens sont super gentils et nous reconnaissent. C'est vraiment un endroit spécial. »
C'est dans ce climat de travail que le jeune Lapierre vit une première saison exceptionnelle sur le plan collectif dans la LAH alors que les Bears trônent au sommet de la section Est depuis le tout début de la saison avec 26 victoires en 33 matchs. Utilisé au centre de la troisième unité, le choix de premier tour des Capitals en 2020 contribue aux succès de son équipe avec 22 points, dont 10 buts, en 39 matchs. Année après année, les Bears établissent un standard d'excellence et visent un autre championnat en 2023.
« Ils pensaient vraiment avoir l'équipe pour se rendre jusqu'au bout l'année dernière », a noté Robitaille qui suit encore de très près les succès de son ancienne équipe. « Ils ont mal digéré leur élimination (au premier tour) et veulent se rendre jusqu'au bout cette année. À Hershey, ils n'hésitent pas à enrôler de bons vétérans pour encadrer les jeunes et à bien les payer. Ça fait toute la différence et les résultats sont là pour le prouver. »
Robitaille ne pouvait dire plus vrai. Aussi incroyable que ça puisse paraître, les Bears ont soulevé plus souvent la coupe Calder (trois fois) qu'ils ont raté les séries (deux fois) depuis le début de leur association avec Washington il y a 17 ans. Il faut le faire!
« C'est vraiment un honneur de jouer pour les Bears, a affirmé Lapierre. C'est quand tu portes leur chandail que tu réalises à quel point leur organisation est respectée à travers la Ligue. Je ne pourrais pas demander mieux.
« Les Bears de Hershey, ce sont les Yankees de New York de la Ligue américaine, tranche Robitaille. Il n'y a aucune autre équipe des ligues mineures tous sports confondus qui s'approche de ce que les gens de Hershey font pour leur équipe. C'est la meilleure place où j'ai joué et ce sera toujours la maison dans mon cœur. »
Photo: Kyle Mace / Bears de Hershey