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Chaque mercredi pendant la saison 2018-19, LNH.com s'entretient avec un intervenant du monde du hockey pour discuter de leur opinion sur l'état de ce sport, de leur vie et de leur carrière, en plus de revenir sur l'actualité.
Cette semaine, cinq questions avec Gilles Courteau.

Bien de l'eau a coulé sous les ponts depuis la saison inaugurale de la Ligue de hockey junior majeur du Québec (LHJMQ), il y a 50 ans, et force est d'admettre que le circuit s'est complètement métamorphosé depuis 1969.
La LHJMQ a navigué à travers les nombreux changements dictés au cours des années par la Ligue nationale de hockey pour en arriver à ce qu'elle est maintenant devenue.
« Le plus gros changement que j'ai vu, c'est la qualité des propriétaires qui ont joint les rangs des clubs de la LHJMQ », a affirmé le commissaire Gilles Courteau. « Ç'a amené une dimension complètement différente.
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« Sans rien enlever aux propriétaires qui étaient là au début de la Ligue, ceux qui sont là aujourd'hui le sont pour les bonnes raisons. Ils sont là pour le développement des joueurs sur la glace et à l'extérieur et pour leur donner tous les outils nécessaires pour qu'ils deviennent de bons joueurs, de bons étudiants et de bonnes personnes. »
M. Courteau, qui est commissaire du circuit depuis 1986, a accepté de s'entretenir avec LNH.com pour faire le point sur certains dossiers chauds qui concernent le principal circuit de développement québécois.
Le style de jeu et la nature même du hockey ont beaucoup changé depuis votre première année en poste. Diriez-vous que la métamorphose du sport tire à sa fin et que le hockey a finalement trouvé sa nouvelle identité?
Le style de jeu a suivi l'évolution du sport. Les joueurs ont des habiletés tellement extraordinaires aujourd'hui, ils sont tellement rapides et c'est tellement naturel, que c'est ce qui est la nature du jeu aujourd'hui. C'est la vitesse et les habiletés. Les joueurs ont tous développé ça et ça donne un spectacle très intéressant.
Les changements qu'on a eus - le retrait de la ligne rouge, la diminution de l'accrochage et des bagarres - c'est ce qui fait qu'on a de très bons joueurs de hockey dans notre ligue et qu'ils ont l'occasion de s'exprimer comme il se doit.
Et ces joueurs réussissent dans la LNH. Je pense à Yanni Gourde, à Jonathan Marchessault et aux autres joueurs de leur gabarit. Des Jonathan Drouin, Charles Hudon et Samuel Girard. Ce ne sont pas des gars avec de gros gabarits, mais le style de jeu d'aujourd'hui leur permet d'évoluer dans la LNH et c'est ce qu'on a développé dans les dernières années.
Le chef de la direction de Hockey Canada Tom Renney disait récemment que le reste du monde commençait à rattraper les grandes puissances sur la scène internationale. Qu'est-ce qui est fait au niveau de la Fédération pour s'assurer de conserver les standards de développement et de qualité des joueurs?
Quand Tom Renney parle de cette manière, c'est que dans l'évolution du Championnat mondial junior, tout le monde a commencé à faire des programmes comme celui de Hockey Canada qu'ils ont développés à leur façon et à leur rythme. Ils arrivent aujourd'hui avec des équipes ultra-performantes et de bons programmes en place. Il va falloir que le Canada s'ajuste.
Aujourd'hui le hockey, c'est un jeu de détails. Le CMJ, c'est un tournoi tellement serré en raison du nombre de bonnes équipes. Ça arrive des années où tu ne seras pas sur le podium. Ce n'est pas parce que tu n'auras pas joué un bon tournoi, mais parce que d'autres équipes vont avoir joué de bons matchs et vont avoir marqué des buts opportuns.
L'année dernière, nous avons gagné l'or. Cette année, nous ne sommes pas sur le podium. Ce n'est pas à cause de ça qu'il faut faire un symposium sur le hockey et qu'on se demande ce qui est croche. Nous ne sommes pas croches, c'est une question de détails. Il faut faire des ajustements appropriés et on va les faire. Nous allons faire un bilan dans deux semaines, on va regarder ce qui s'est passé, et à partir de là, on va aller de l'avant et voir quels sont les endroits spécifiques dans lesquels on doit s'améliorer.
Au chapitre de la production de joueurs pour la LNH, il y a eu un creux de vague en 2016 et en 2017 avec seulement 14 joueurs sélectionnés, mais la Ligue a repris du poil de la bête l'an dernier avec 23 joueurs. Êtes-vous satisfaits du rendement de la Ligue à ce chapitre et croyez-vous que c'est possible d'en arriver à une production soutenue et non cyclique?
L'aspect cyclique a toujours existé au niveau de la LHJMQ. Ce qui se produit avec nos joueurs, c'est qu'ils ne sont pas sélectionnés, mais ils signent des contrats comme joueurs autonomes. L'un dans l'autre, ça revient au même. On a peut-être même plus de succès que si nous avions plus de joueurs sélectionnés qui ne signaient pas de contrat au bout de deux ans et qui devaient aller jouer dans un autre circuit.
Nos gars signent des contrats, ils ont du succès et ils livrent la marchandise. Quand on fait le décompte de ça, on trouve notre compte au niveau du nombre de joueurs qui évoluent dans la LNH.
Auparavant, on nous apposait une étiquette négative. Pendant longtemps, on considérait que c'était un cadeau pour les équipes de la LHJMQ de participer au tournoi de la Coupe Memorial. Depuis la victoire de Granby en 1996, c'est un objectif pour nos équipes de gagner la Coupe Memorial et nous avons prouvé que nous sommes en mesure de gagner. Nous avons gagné sept fois en 12 ans. Ce sont des éléments respectables. Cette étiquette est chose du passé.
On parle de la production de joueurs, mais on a aussi vu des entraîneurs faire le saut dans la LNH, particulièrement avec les Canadiens de Montréal cette année (Dominique Ducharme et Joël Bouchard). Qu'est-ce que la Ligue fait pour favoriser le développement de ses entraîneurs et est-ce qu'il est encore vrai que la principale porte d'entrée pour les entraîneurs québécois est le CH?
C'est certain que les Canadiens représentent une porte d'entrée importante pour les entraîneurs québécois, mais je pense qu'il y a des situations qui démontrent que les autres équipes de la LNH montrent aussi une ouverture. À Tampa Bay, Benoit Groulx est entraîneur-chef du club-école et son adjoint est Gilles Bouchard. À Winnipeg, Pascal Vincent dirige le Moose du Manitoba et Éric Dubois est son adjoint.
Nos entraîneurs se vendent bien. Ils participent aux compétitions nationales et internationales avec Hockey Canada et assistent aux séminaires d'entraîneurs. Ça leur permet de se faire connaître et d'échanger avec des gens de partout. Ils sont en mesure de trouver leur place sur l'échiquier du hockey. Ce sont des gens qui ont du talent.
Si quelqu'un n'était pas reconnu comme un bon entraîneur, on ne lui confierait pas un club-école ou une équipe de la LNH. Le succès que nous avons aujourd'hui avec nos entraîneurs, ça fait bonne bouche dans les sphères de la LNH.
Alexis Lafrenière est considéré comme le potentiel premier choix du repêchage de 2020, ce qui en ferait le premier Québécois depuis Fleury en 2003. Comment voyez-vous la prochaine année se dessiner pour Lafrenière, mais aussi pour la Ligue avec tout l'intérêt qu'il suscite?
Je suis très content de la manière dont Alexis Lafrenière se comporte. C'est un jeune qui démontre beaucoup de maturité et qui fait bien sur la glace et en dehors de la glace. C'est un gars qui prend les choses au sérieux. Il a un très bon encadrement à Rimouski. Il demeure dans une bonne famille de pension, il est bien encadré par l'organisation, son groupe d'agents s'occupe bien de lui et ses parents sont également faciles d'approche.
Je pense que le passé de l'Océanic de Rimouski démontre qu'ils peuvent prendre soin d'un joueur comme Alexis Lafrenière. Ils ont eu les Brad Richards, les Vincent Lecavalier, les Sidney Crosby…
Alexis est une tête d'affiche depuis l'âge de 16 ans quand il est arrivé dans la LHJMQ. Il réagit bien aux situations. Ce que j'aime de lui, c'est qu'il est capable de bien gérer tout ça. C'est un gars qui a les deux pieds sur terre. J'aime beaucoup la manière dont il évolue au sein de notre ligue et je suis certain que ça va bien le préparer pour la LNH.