Hayley Wickenheiser4

Hayley Wickenheiser a toujours voulu être comme Wayne Gretzky ou Mark Messier. Durant son enfance dans les années 80 à Shaunavon, en Saskatchewan, elle avait l'habitude de s'installer dans le fauteuil du salon avec son père pour regarder attentivement les Oilers d'Edmonton à Hockey Night in Canada.

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« Il me disait : "Regarde comment Gretzky ralentit le jeu à la ligne bleue avant d'effectuer un jeu" ou "Vois comment Messier parvient à décocher un tir en s'appuyant sur son pied inverse", a raconté Wickenheiser. Nous commentions le match au fur et à mesure en fonction des jeux. »
Entre les périodes, elle enfilait ses patins et se rendait à la patinoire tout près de chez elle, s'imaginant qu'elle était ces légendes, imitant tous leurs faits et gestes.
Elle passait des heures sur cette patinoire. Ses parents devaient pratiquement la traîner pour qu'elle vienne souper.
Une fois, alors que toute la famille était au lit, son père est descendu dans la cuisine pour aller se chercher un verre d'eau. Il a regardé par la fenêtre arrière.
Devinez ce qu'elle faisait?
« Elle était seule sur la glace en train de s'exercer à un peu de tout », s'est rappelé son père, Tom. « Il fallait vraiment la sortir de la glace nous-mêmes. »
Elle avait alors 5 ou 6 ans.
« J'essayais d'être silencieuse, puis je sortais le soir pour m'entraîner avec la lune comme seule lumière pour éclairer la glace, car j'aimais tout simplement être sur la glace, a-t-elle dit. J'inventais des choses. Je faisais semblant et j'étais créative.
« C'est un peu de cette façon que j'ai appris à jouer au hockey. »
C'est l'essence même de son histoire.

WICKOUTDOORS

Wickenheiser aura finalement accompli de grands exploits, remportant cinq médailles aux Jeux olympiques (quatre d'or, une d'argent) et 13 médailles au Championnat du monde de la FIHG (sept d'or, six d'argent). À deux reprises, en 2002 et 2006, elle a été nommée joueuse la plus utile à son équipe lors du tournoi olympique féminin. Elle a terminé sa carrière en étant la meneuse chez les femmes aux Jeux olympiques avec 51 points (18 buts, 33 passes) en 26 matchs.
Elle a participé au camp des recrues des Flyers de Philadelphie en 1998 et 1999 et s'est entraînée avec des joueurs de la LNH pendant des années. Elle est devenue la première femme à jouer au hockey professionnel à temps plein à une position autre que celle de gardien en 2002-03, quand elle a récolté 11 points (deux buts, neuf mentions d'aide) en 23 rencontres avec Salamat, une équipe masculine en troisième division finlandaise, et elle a continué à jouer au hockey professionnel en Europe.
Dans tout ce parcours, sa motivation à jouer était pure et simple. Elle jouait parce qu'elle était en amour avec ce sport. Elle était bien sûr fière de montrer l'exemple, mais elle ne compétitionnait pas contre des hommes pour prouver quelque chose. Elle le faisait pour s'améliorer.
Elle se poussait constamment à être la meilleure.
Maintenant âgée de 41 ans, elle se dépasse encore en étant la directrice adjointe au développement des joueurs chez les Maple Leafs de Toronto et en étudiant en médecine à l'Université de Calgary. Elle sera intronisée au Temple de la renommée du hockey le 18 novembre. Son nom sera inscrit dans le Grand Hall, près de ceux de Gretzky et de Messier.
« Chez les femmes, elle était plus proche de Mark Messier que de Wayne Gretzky, car on n'a jamais revu quelque chose de semblable à Gretzky, chez les hommes comme les femmes », a affirmé Bobby Clarke, qui l'a invitée au camp des recrues des Flyers quand il était directeur général et qui est lui aussi membre du Temple. « Je pense qu'il n'y a pas eu de meilleure joueuse dans le hockey féminin. Pour moi, elle était assurée d'entrer au Temple. C'est dire à quel point elle était bonne. »
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En jouant avec des garçons en grandissant, Wickenheiser avait l'habitude de garder ses cheveux courts. Elle se rendait plus tôt à l'aréna pour se changer dans un autre vestiaire.
« Je ne voulais pas que personne sache qui était la fille, car je voulais être acceptée pour ma façon de jouer au hockey », a-t-elle expliqué.

WICKYOUNG

À l'âge d'environ 8 ans, une école de hockey de Swift Current, en Saskatchewan, a refusé de l'admettre. C'était seulement pour les garçons.
« C'était comme si on était revenu à une autre époque », a lancé sa mère, Marilyn. « Je leur ai répondu que je ne comprenais pas pourquoi on la refusait et leur ai demandé de me donner des raisons. Je n'ai jamais obtenu une raison. Puis, j'ai dit : "Je pense que c'est une question de droits de la personne, et cette histoire n'en restera pas là." C'est à ce moment-là qu'on l'a acceptée. »
C'était très animé dans l'aréna. Tout le monde voulait savoir qui était la fille.
« Ils s'attendaient à la voir tomber, se relever, puis tomber de nouveau, a mentionné son père. Au lieu, ils regardaient le jeu et voyaient bien qu'ils ne pouvaient pas faire la différence. Moi, j'ai simplement souri et je n'ai jamais rien dit. »
Quand Wickenheiser avait environ 12 ans, la famille a déménagé à Calgary. Elle a joué au niveau bantam AAA avec des garçons. Elle a passé une saison avec des filles, mais le calibre n'étant pas assez relevé, elle a tenté le midget AAA avec des garçons. Après un bon tournoi à Medicine Hat, en Alberta, elle a été appelée dans le bureau de l'entraîneur, s'attendant à recevoir des éloges.
Elle a plutôt été retranchée.
« Durant tout mon apprentissage, j'ai toujours dû faire face à ça, a-t-elle dit. Il y a eu beaucoup d'adversité. Les gens ne voulaient pas voir une fille dans les parages. »
Puis, elle a reçu l'appel du Canada. Wickenheiser s'est taillé une place sur l'équipe nationale féminine à l'âge de 15 ans, entamant une carrière de 23 ans.
Ce serait simple de dire que le reste est l'histoire que nous connaissons tous. Mais elle n'a jamais emprunté le chemin facile, comme l'a rappelé la membre du Temple de la renommée Danielle Goyette, son ancienne coéquipière et entraîneuse, dans un témoignage rédigé pour LNH.com.
Durant l'été, lors de ses visites à la ferme de son grand-père à Lumsden, en Saskatchewan, Wickenheiser n'avait pas de gymnase. Elle s'en faisait un par elle-même avec tout ce qu'elle trouvait. Par exemple, elle plaçait des roches dans une brouette avant de s'étendre sur le dos et de soulever les poignées. Presque comme dans un film de Rocky.

WICKWHEELBARROW

Quand le hockey féminin a fait ses débuts aux Jeux olympiques 1998 de Nagano, Clarke était DG de l'équipe masculine du Canada. Il a eu la chance de voir de près l'équipe féminine sur la glace, en plus de pouvoir parler aux joueuses dans le village olympique.
« Pour moi, qui avais passé sa vie dans le hockey masculin, ça m'a ouvert les yeux, a souligné Clarke. En parlant à Wick et à ses coéquipières, j'ai réalisé qu'ils étaient de véritables joueuses de hockey. Elles veulent seulement jouer au hockey et s'améliorer. Elles veulent faire les bonnes choses pour leur équipe et ce n'est pas différent des joueurs que nous avions dans l'équipe masculine. »
Clarke a invité Wickenheiser aux camps des recrues des Flyers, car il voyait bien qu'elle avait besoin de compétition plus relevée pour s'améliorer. Cette fois-là, on l'a accueillie à bras ouverts chez les hommes, mais la scène avait de quoi rappeler des souvenirs.
« Si tu demeurais dans les estrades, tu ne pouvais pas savoir qu'il y avait une fille sur la glace, a lancé Clarke. Elle était meilleure que beaucoup de nos joueurs de 18 ans. »
Elle avait 20 et 21 ans lors de ces deux camps. Elle était donc un peu plus âgée.
« J'étais près de la bande lors de l'un de ces camps et j'ai entendu un de nos jeunes joueurs s'exclamer : "C'est une fille!" », s'est rappelé Clarke en riant. « Son coéquipier lui a répondu : "Je sais, et elle est meilleure que nous!" »
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Wickenheiser est un modèle, bien sûr.
Son héritage est le Canadian Tire Wickenheiser World Female Hockey Festival, connu sous le nom de WickFest. Il s'agit d'un tournoi qui inclut des ateliers et des séminaires sur des sujets comme l'approche mentale et la nutrition. Le WickFest célébrera son 10e anniversaire cette saison, du 14 au 17 novembre et du 21 au 24 novembre à Calgary ainsi que du 30 janvier au 2 février à Surrey, en Colombie-Britannique.
« Ce dont je suis le plus fière, c'est que maintenant, une petite fille au Canada et partout en Amérique du Nord peut se rendre à l'aréna avec un sac et un bâton pour jouer au hockey, et personne ne va remettre ça en question », a-t-elle dit.

Wickenheiser kids

Mais rappelez-vous ce qui a fait de Wickenheiser un modèle. Rappelez-vous ce qui a fait d'elle une membre du Temple de la renommée du hockey.
Souvenez-vous de l'essence de son histoire.
« Quand on parle des joueuses de hockey féminin, on dit souvent : "Elle est un beau modèle", car on ne l'a pas assez vu jouer ou on ne la connait pas assez », a-t-elle expliqué.
« J'ai toujours voulu bien faire, je voulais être la meilleure joueuse possible, et j'ai vraiment tenté de dominer mon sport. Ça signifie beaucoup pour moi quand les gens parlent de ma façon de jouer et du genre de joueuse que j'étais. On ne voit pas ça souvent avec les athlètes féminines. »
Au final, il faudra se souvenir de Wickenheiser comme l'une des meilleures, si ce n'est pas la meilleure, à avoir joué au hockey féminin, une attaquante de puissance qui a élevé les standards au hockey féminin, une grande joueuse.
Elle était très compétitive, écopant parfois de pénalités. Elle donnait tout chaque soir, ce que ce soit dans un match devant une foule modeste au milieu de nulle part ou dans un aréna plein à craquer pour une finale olympique.
« C'est quelqu'un qui m'a inspirée avec sa façon de jouer quand j'étais jeune », a déclaré l'attaquante du Canada Natalie Spooner. « Je me souviens d'avoir vu un match quand j'avais environ 13 ans et je la trouvais tellement rapide sur la glace. C'était à la Coupe des quatre nations. Je me suis dit qu'elle était dominante. »
Angela Ruggiero, qui a fait face à Wickenheiser comme défenseure avec les États-Unis, a mentionné : « Elle était comme tous les autres joueurs admis au Temple de la renommée : exceptionnelle, rapide. Il fallait la surveiller quand elle était sur la glace. »
Relisez cette phrase : elle était comme tous les autres joueurs admis au Temple de la renommée.
Ça signifie qu'elle a obtenu ce qu'elle a toujours désiré, et encore plus. Elle a été acceptée pour sa façon de jouer au hockey, et ce, au plus haut niveau.
« Je me rappelle que lorsque j'étais sur la glace, je devais l'empêcher d'utiliser son bâton », a affirmé l'attaquante des États-Unis Kendall Coyne Schofield. « Il ne fallait pas la laisser avoir la rondelle. Il fallait se mettre dans son chemin, ne pas la laisser s'approcher du filet.
« Mais je me rappelle m'être dit que c'était génial de pouvoir l'affronter. Ça s'est produit tôt dans ma carrière. Elle était à la fin de la sienne. C'est une légende, peut-être la meilleure à avoir joué au hockey, une autre pionnière que ce sport a eu la chance d'avoir. »
\ Avec la contribution de la journaliste NHL.com Tracey Myers*