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D'aussi loin qu'il se souvienne, Pierre-Olivier Joseph a toujours fait compétition à son grand frère Mathieu. Une compétition amicale certes, mais qui l'a incité à se surpasser afin de suivre les traces de son aîné.
Après tout, le défenseur des Islanders de Charlottetown ne se retrouve pas au 41e rang des meilleurs patineurs en Amérique du nord sur la liste du Bureau de dépistage de la LNH par hasard: son frère a été sélectionné en quatrième ronde par le Lightning de Tampa Bay en 2015.

Tout s'explique aussi facilement... ou presque.
« Le plus vieux prend la compétition davantage avec un grain de sel même s'il est compétitif, mais le plus jeune veut montrer qu'il est capable lui aussi », raconte en riant le père des deux jeunes hommes, Frantzi Joseph.
Puis tout comme son frère qui a percé la formation nationale pour la première fois de sa carrière à l'âge de 19 ans lors du dernier Championnat mondial junior, l'arrière de 17 ans semble se faire un nom avec le temps.

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Sélectionné au cinquième tour du repêchage de la LHJMQ en 2015, il est désormais considéré comme le deuxième meilleur espoir québécois, derrière Maxime Comtois (15e), en vue du repêchage 2017 de la LNH. Il s'agit en soit d'un exploit puisque des 12 Québécois répertoriés par le Bureau de dépistage, il est le seul de cette cuvée à avoir été sélectionné plus tard que la troisième ronde.
« Je suis sorti tard, mais le repêchage ne veut pas dire grand-chose », a fait valoir le principal intéressé qui n'aura probablement pas à plaider sa cause bien longtemps afin de prouver son point.
« C'est sûr que quand tu te retrouves avec pleins de choix de première ronde, qui ont participé à des évènements de Hockey Canada, c'est spécial. Je pense juste qu'il faut continuer à persévérer et de bonnes choses vont arriver. »
Persévérer et travailler, surtout. Parce que l'accession de l'habile défenseur à un poste établi avec les Islanders ne s'est pas faite du jour au lendemain.
À son premier camp d'entraînement au niveau junior, les dirigeants de la formation des Maritimes ont décidé de renvoyer Joseph dans le midget AAA afin qu'il acquière la maturité nécessaire pour passer à la prochaine étape.
« Quand on m'a renvoyé dans le midget, j'ai eu une bonne conversation avec le directeur général et c'était la meilleure décision à prendre, a admis Joseph. J'ai vraiment pris ça positivement. J'ai eu beaucoup de temps de glace et ça m'a donné confiance. »
Seulement 19 matchs plus tard, le cadet des Joseph a reçu l'appel qu'il espérait. Il a alors saisi l'occasion de faire sa place dans la formation à 16 ans malgré que, du haut de ses 6 pieds et 150 livres à l'époque, il concédait plusieurs livres à certains de ses adversaires.
« Il faut que tu penses plus intelligemment et différemment des joueurs plus imposants, a expliqué celui qui porte désormais le titre d'assistant-capitaine. Il faut que tu amènes l'aspect physique dans ton jeu, c'est certain, mais le but c'est d'être plus intelligent que le gros gars à côté de toi. »
Après avoir ajouté 10 livres à sa charpente et disputé 48 matchs de saison régulière à sa première campagne, Joseph s'impose désormais comme un élément important et fiable de la défense des Islanders, qui compte notamment sur les espoirs de l'Avalanche du Colorado Nicolas Meloche et des Canucks de Vancouver Guillaume Brisebois.
Sous les ordres de l'entraîneur Jim Hulton, un ancien adjoint des Panthers de la Floride, il poursuit son développement et connaît une éclosion offensive qui est loin de passer inaperçue cette saison, lui qui totalise six buts et 28 mentions d'aide en 49 matchs.
« Il nous pousse parce qu'il sait ce que ça prend pour se rendre au prochain niveau, a dit Joseph à propos d'Hulton. C'est vraiment plaisant de travailler avec lui. Depuis deux ans, j'ai vraiment progressé sous ses ordres. »
Dans le sang
S'il lance à la blague qu'il a fait la transition de l'attaque vers la défense afin de mieux faire compétition à son frère, on croit Pierre-Olivier sur parole quand il affirme que Mathieu a été la personne qui a exercé la plus grande influence sur son parcours.
Les frangins ont été élevés dans un environnement sportif - leur père Frantzi joue et dirige au hockey depuis de nombreuses années et leur mère France Taillon est une ancienne athlète de compétition - et ils ont su en tirer profit.
Tout cela, ensemble.
« C'était quelque chose sur laquelle on s'entendait, a raconté Mme Taillon. Le sport, ça forge un individu, c'est une belle école de développement. On savait qu'on baignerait là-dedans, sans nécessairement entrevoir tout ce que ça apporterait. »
Ce n'est pas impossible mais au nombre limité de joueurs repêchés dans la LNH, il est effectivement difficile d'imaginer que deux membres d'une même famille puissent tous les deux gravir les échelons jusqu'au sommet. Mais les frères Joseph s'entraident, s'entraînent ensemble au cours de la saison estivale et se consacrent entièrement à ce « projet familial ».
« Je n'aurais pas pensé que les deux se rendraient où ils sont présentement, a avoué le paternel. Par contre, ce qu'on leur disait France et moi, c'est de ne jamais penser qu'ils n'étaient pas capables d'y arriver. »
Deux ans après avoir vu son frère enfiler le chandail du Lightning, ce sera au tour de Pierre-Olivier de passer par la même gamme d'émotions en juin. Et il pourra sans aucun doute compter sur le soutien de son « fan » numéro 1...
Photo de la page couverture: Darrell TheriaultPhotos de l'article: Kaitlin Arseneault