Kovacevic badge Chaumont

BROSSARD – Johnathan Kovacevic n’a jamais suivi la route la plus facile. Il a entendu son nom à sa troisième année d’admissibilité au repêchage de la LNH, il a patienté trois saisons avec le Moose du Manitoba dans la Ligue américaine et il a gagné sa place dans un vestiaire de la LNH au mois d’octobre 2022 quand les Canadiens de Montréal l’ont réclamé au ballottage des Jets de Winnipeg.

La portion hockey du cheminement de Kovacevic représente celle d’un défenseur qui a bûché pour atteindre son rêve, mais elle n’a rien d’un parcours unique. La portion académique est plus fascinante.

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Kovacevic détient un diplôme de Merrimack College en génie civil. Il a terminé ses études alors qu’il portait l’uniforme du Moose. Il jonglait donc entre le hockey professionnel et des cours à distance.

Avant le départ du CH pour un long voyage dans l’Ouest canadien et américain, Kovacevic a fait un détour dans le passé pour décrire ses jours sur un banc d’école à Merrimack, une université située à North Andover au Massachusetts et qui fait partie de la division Hockey East dans la NCAA.

« J’ai choisi de suivre ce chemin puisque j’aimais les mathématiques et les sciences, a-t-il expliqué en entrevue à LNH.com. Quand tu choisis ton champ d’études à l’université, tu as juste 17 ans. J’étais jeune, je ne connaissais pas plusieurs professions. Mon objectif consistait à ne pas travailler dans un bureau à ma sortie de l’école. Je me disais qu’en étudiant en génie civil, je trouvais le parfait endroit puisque j’allais travailler sur des chantiers à l’extérieur.

« Je savais que ce serait un baccalauréat exigeant. Des écoles qui offraient le programme cherchaient à décourager les hockeyeurs de s’inscrire puisque ça demandait beaucoup de temps. À Merrimack, ils avaient une philosophie différente. Ils connaissaient mes capacités comme étudiant, mais ils m’avaient averti dès le départ. L’école devait rester la priorité avant le hockey. Il y avait parfois des cours qui se terminaient un peu après le début d’un entraînement sur la glace. Si je manquais un cours pour me concentrer sur mon entraînement, ils me faisaient manquer le match suivant. C’était leur philosophie : l’école en premier. »

Kovacevic s’organisait pour ne pas manquer ses cours. Il a appris à courir encore plus rapidement, mais aussi à se changer à la vitesse de Connor McDavid sur une patinoire. Par chance, ce n’était pas un énorme campus.

« J’avais parfois un cours de 14 h à 15 h 15, mais je m’organisais avec mon enseignant pour finir à 15 h puisque nos entraînements commençaient à 15 h. Je courais pour me rendre à l’aréna et m’habiller. Je m’organisais pour que l’enseignant ou des collègues de ma classe me procurent les notes qui me manquaient pour les dernières minutes du cours. J’avais à jongler avec ça. »

Kovacevic avait l’ADN pour se lancer dans un programme aussi exigeant.

« Il n’y a pas d’ingénieur civil dans ma famille, mais mon père (Novica) a un baccalauréat comme ingénieur en informatique et mon frère (Ryan) a étudié comme ingénieur mécanique. C’est donc dans la famille. Je connaissais le métier d’ingénieur, mais j’étais plus attiré par le génie civil.

« Je voulais me pousser à l’école pour être le meilleur possible, j’avais cet objectif dans tout ce que j’entreprenais. C’était la même chose au hockey. Ça fait partie de ma personnalité. J’aime me mettre au défi. Tu apprends beaucoup sur toi-même en relevant des défis. J’ai appris énormément de choses lors de mon baccalauréat. »

Un premier de classe

Kovacevic a passé trois ans à Merrimack. Après sa troisième saison avec les Warriors, il a paraphé un premier contrat professionnel avec le Moose du Manitoba. C’était à la fin de la saison 2018-19. Les Jets l’avaient repêché au troisième tour en 2017 après une récolte de 19 points (trois buts, 16 passes) en 36 matchs à sa première saison à Merrimack.

Même s’il se lançait dans une nouvelle aventure, le grand défenseur droitier n’avait pas fait une croix sur l’école.

« Aujourd’hui, j’ai fini mes études et j’ai reçu mon diplôme, a-t-il répliqué avec le sourire. J’ai suivi des cours d’été pendant mes trois saisons à Merrimack. J’avais donc un peu d’avance. Quand j’ai signé mon contrat professionnel avec le Moose, j’ai poursuivi mes études.

« Il me restait six cours pour finir mon baccalauréat. J’ai suivi un cours d’été, un autre cours lors d’une session pendant la première moitié de ma première saison chez les pros, deux cours à la session suivante, toujours à ma première année au Manitoba. Il y a ensuite eu la COVID-19. J’ai fini mes deux derniers cours à distance durant l’été. J’ai terminé mes études pratiquement en même temps que ma cohorte de départ. »

Et Kovacevic a maintenu des notes exceptionnelles.

« J’ai fini avec une moyenne de près 4.0 (GPA), a-t-il précisé. J’ai terminé deux cours avec une note de A-, j’avais des A pour les autres cours. »

MTL@TBL: Kovacevic marque depuis son propre territoire

Collin Delia, un ancien des Blackhawks de Chicago et actuel gardien du Moose du Manitoba, a joué avec Kovacevic à Merrimack. Tout comme lui, il étudiait en génie civil, mais il n’a pas encore terminé ses cours. 

« J’étais doué à l’école, mais Johnathan l’était encore plus, a raconté Delia lors d’un entretien téléphonique. Il avait une discipline de fer. Quand tu étudies dans un tel programme, tu n’as pas vraiment de temps pour ta vie sociale. Ton existence se limite à un triangle : l’aréna, la cafétéria et les laboratoires de génie. Je me souviens qu’il y avait des moments où j’étudiais encore pour un examen le matin d’un match. Je le faisais puisque je savais que je n’aurais pas d’autre temps. »

Dans le vestiaire du Tricolore, Mike Matheson et Jordan Harris ont connu la vie sur un campus universitaire américain, respectivement à Boston College et Northeastern. 

« Non, ça ne devait pas être facile pour lui, a affirmé Matheson. Mais maintenant que je connais bien Johnathan, je ne suis pas surpris de connaître son parcours universitaire. Il est très intelligent. Il a des intérêts variés aussi. Il est le type de gars qui lit des livres dans l’avion. Il s’intéresse à un paquet de trucs, il ne passe pas ses journées sur son cellulaire à regarder Instagram. »

« Quand je jouais à Northeastern, Devon Levi étudiait en sciences informatiques, a renchéri Harris. Il passait beaucoup de temps dans ses livres. Kovy vivait probablement la même réalité. Il devait prioriser ses études et le hockey, sa vie sociale passait en troisième. »

Quand on lui parle de sa vie sociale à son époque universitaire, Kovacevic n’a pas le sentiment d’avoir manqué le bateau. 

« J’avais un bon équilibre. Mais j’étais probablement chanceux puisque j’étais un bon étudiant à la base. Je pouvais sortir avec mes amis, mais je les voyais moins qu’ils pouvaient se voir entre eux. Du lundi au jeudi, ma vie se résumait à suivre mes cours, participer aux entraînements l’après-midi, manger à la cafétéria après l’entraînement et finir ma journée à la bibliothèque jusqu’à 21 h ou 22 h. 

« Mais la fin de semaine, j’avais du plaisir à l’extérieur de nos matchs. Je sais que j’ai sacrifié un peu ma vie sociale, mais pas trop. Et pour être bon à l’école et sur la glace, tu as besoin d’être heureux dans la vie. Je l’étais et je le suis encore. » 

Des options pour le futur

Kovacevic se bat encore pour sa place à la ligne bleue des Canadiens, sautant parfois son tour. Sur le plan contractuel, il lui reste une autre année à un salaire très raisonnable de 767 000 $. 

Quand on lui demande de se projeter encore plus loin dans le futur, soit au jour où il accrochera ses patins, Kovacevic ignore le chemin qu’il empruntera. 

« Je ne sais pas encore. Je me laisserai surprendre par le futur. Quand j’arrêterai de jouer, j’aurai plusieurs choix. Je joue au hockey depuis longtemps. J’ai consacré tellement d’heures à ce sport que j’aimerais transmettre mon savoir à une autre génération. Que ce soit comme entraîneur ou avec un rôle dans la direction. J’aimerais mélanger mes connaissances comme ingénieur à celles du hockey.

« Il y a tellement de statistiques maintenant dans le hockey. Je pourrais faire le pont entre les notions de mathématiques et celles des jeux sur la glace. J’ai l’œil d’un hockeyeur et la tête du mathématicien. »