Le graphique ci-dessus n'est pas nécessairement des plus parlants pour Seguin seul (qui n'a joué qu'une cinquantaine de minutes sans Benn en avantage numérique depuis son arrivée à Dallas), mais il est diablement révélateur de l'importance d'associer des joueurs de talents sur le jeu de puissance. À l'image de ce qui s'est passé à Tampa Bay entre St-Louis et Stamkos, le fait d'avoir établi une telle synergie entre deux joueurs de grand talent pèse lourd dans les succès des Stars. Lorsque Seguin et Benn sont réunis, les Stars marquent un peu plus de huit buts par heure passée à 5 contre 4, un score qui descend à six buts par heure lorsque Benn y est sans Seguin.
Et l'impact sur Benn lui-même est saisissant. En un peu moins de 1500 minutes jouées à 5 contre 4, Benn obtient depuis le début de sa carrière environ 19 tentatives de tirs par heure jouée, et ce peu importe qu'il soit avec ou sans Seguin. Mais, associé à ce dernier, le nombre de ses tirs qui atteignent le filet passe de 10 à 12 par heure et le nombre de buts obtenus passe de 1,3 à 2,1, une augmentation de 60 pour cent. Le talent met le talent en valeur.
Cela rend-il compréhensible qu'on ait choisi de peser un peu plus fort sur le crayon plutôt que de risquer d'attendre? Benn a 27 ans, Seguin 24. Si on accepte que Benn est aujourd'hui au sommet de son art et que les joueurs commencent souvent à ralentir significativement à l'âge de 30 ans, ça laisse une fenêtre de trois, peut-être quatre saisons avant que ce contrat risque de devenir dur à porter. Sachant que Seguin est encore sous contrat pour trois autres années, il n'y a plus de doute possible : la fenêtre d'opportunité des Stars est maintenant ouverte.
En ce sens, on achète la paix pour l'instant, mais ce contrat risque quand même de hanter rapidement les Stars. On semble encore, dans la LNH, aux prises avec un réflexe rapidement acquis lors de l'ancienne convention collective voulant qu'on offre aux joueurs autonomes des contrats à long terme visant à diluer leur impact sur le plafond salarial. C'était compréhensible si, par exemple, cela permettait de garder Marian Hossa sous contrat à un coût annuel moyen de 5,2 millions $ par saison.
Mais à 9 millions $ et plus, on s'approche drôlement du salaire maximum. Et dans le cas de Benn, l'essentiel de ce contrat couvre des saisons jouées passé l'âge de 30 ans. S'il vieillit comme Joe Thornton, c'est fantastique! S'il prend plutôt le chemin de Dany Heatley (ou David Krejci), c'est plus embêtant. Chaque joueur est unique, mais le risque est massif.
Je ne suis pas au fait des détails de la structure des impôts perçus à Dallas et en Floride, mais le peu que j'en sais repose sur cet article publié par TSN l'an dernier. Il semble bien qu'on ne puisse attribuer la différence de valeur monétaire des deux ententes à une différence d'impôt sur le revenu, les deux états ayant un niveau quasi identique d'imposition. Il semble bien que l'on ait accordé ce salaire au capitaine des Stars parce que c'est, tout simplement, ce qu'on a réussi à négocier avec lui.
C'est pourquoi j'ai l'impression que les Stars, sans rien enlever à la contribution exceptionnelle de Jamie Benn, ont payé « en haut du marché ». Stamkos, qui est plus jeune, a signé pour un million $ de moins par saison et terminera son contrat âgé de 34 ans. Les chiffres ne disent pas tout, le côté émotif a aussi son importance dans ce business, on l'entend beaucoup ces jours-ci. Mais le fait est que les Stars mettent le paquet sur le court terme en s'engageant ainsi. Lorsqu'ils arriveront au prochain contrat de Tyler Seguin, les choix pourraient devenir beaucoup plus difficiles.