Forsberg

La série finale disputée entre les Predators de Nashville et les Penguins de Pittsburgh donne lieu à du jeu échevelé. Les deux équipes pratiquent un style structuré et méthodique, mais on sent que la fatigue et les blessures pèsent. Résultat, bien que tout ce beau monde travaille d'arrache-pied à tenir le rythme en restant au diapason de ses coéquipiers, les matchs se sont jusqu'ici gagnés sur des séquences explosives et parfois chaotiques.

Cet état de choses se reflète dans la façon dont ces deux équipes ont généré leurs chances. Lorsqu'on distingue le contexte d'où proviennent les tirs tentés par les deux équipes, on voit en effet des différences d'approche. J'ai, pour cet article, classé les tirs des deux équipes en fonction de l'événement qui les précèdent. Un tir est-il obtenu à la suite d'une mise en jeu ou d'un tir? Une fois cet élément établi, j'ai reclassé les tirs survenus à la suite d'un premier tir : quel intervalle de temps sépare ces deux tirs?
Ce classement a permis d'identifier un premier détail intéressant à considérer : les tirs suivant les mises en jeu ont représenté environ 40 pour cent du total des tirs lors des trois premières rondes. Depuis le début de la Finale de la Coupe Stanley, on est plutôt à 50 pour cent. Bien que ça ne soit pas l'objet du présent article, je me permets de le souligner, parce que ça nous indique, je pense, que les mises en jeu ont une plus grande importance dans cette série finale. On y reviendra.
Si on distingue les tirs obtenus à la suite d'une mise de ceux obtenus à la suite d'un tir (je les qualifie de tirs en jeu ouvert), on constate que les Predators connaissent leur meilleure séquence des séries éliminatoires, alors que les Penguins, après avoir eu le dessus en finale d'association, peinent à s'établir dans les deux contextes.

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La domination des Predators sur les jeux suivant les mises n'est pas surprenante, mais il est intéressant de constater que les Penguins ont été aussi clairement dominés à 5 contre 5. Pourtant, les buts sont nombreux pour la bande à Sidney Crosby.
On peut se demander si ce n'est pas parce que les Penguins obtiennent des tirs de meilleure qualité, mais la distance moyenne des tirs tentés laisse entendre que ça n'est pas exactement le cas. Les Predators obtiennent des tirs de plus près dans toutes les situations. Il faut donc creuser un peu plus loin.

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J'ai regroupé les tentatives de tirs obtenus en jeu ouvert en trois intervalles de temps. Les tirs obtenus à moins de 5 secondes d'un premier tir sont des rebonds en bonne et due forme. Les tirs obtenus dans un intervalle de 5 à 10 secondes sont ce que j'appelle des « contre-attaques ». Ces tirs sont souvent obtenus à la suite d'une réorganisation de l'effort en zone offensive (s'ils suivent un tir de la même équipe) ou une descente en surnombre (s'ils suivent un tir de l'autre équipe). Enfin, je considère que les tirs obtenus après plus de 11 secondes d'un premier tir comme faisant partie de la troisième catégorie, la plus importante certes, mais qui ne nous dit pas grand-chose à partir des données ici disponibles.
Lorsqu'on prend les seuls tirs obtenus en jeu ouvert et croise ces regroupements en secondes avec l'identité du club ayant obtenu le tir précédent, on voit une distinction intéressante apparaître.
Je vous présente d'abord les graphiques des deux équipes pour les commenter ensuite.

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Les deux équipes ont obtenu un nombre de tirs similaires à la suite d'un tir de l'adversaire : 15 pour les Penguins, 16 pour les Predators. Les deux équipes ont surtout obtenu des tirs de loin, mais Nashville a réussi quelques contre-attaques dangereuses : quatre tirs à moins de 10 secondes et avec une distance moyenne de 22 pieds.
Nashville a aussi obtenu beaucoup plus de rebonds rapides, 10 contre 5 pour les Penguins dans une fenêtre de moins de 5 secondes, mais les deux équipes tirent encore là de relativement loin (plus de 30 pieds).
Il semble que là où Pittsburgh a su prendre l'avantage, c'est sur les tirs dans la fenêtre de 5 à 10 secondes suivant un premier tir. Non seulement ont-ils obtenu deux fois plus de tentatives que les Predators, mais la distance moyenne des tentatives est extrêmement réduite, 19 pieds seulement.
Cet avantage s'est transposé aux buts. Pittsburgh a obtenu trois de ses 10 buts marqués dans la série dans ces circonstances; soit deux dans la fenêtre de rebond, un dans la fenêtre de contre-attaque. Nashville a obtenu tous ses buts (sauf un but de Colton Sissons en avantage numérique) dans des situations de jeu ouvert.
C'est plus subjectif comme jugement, mais ces données renforcent l'impression selon laquelle les Penguins font, depuis le début de la série, leur pain et leur beurre des rebonds juteux laissés par Pekka Rinne. Les Predators dominent pour l'essentiel le fil des matchs, mais ne sont jamais à l'abri d'une rafale meurtrière de la part des Penguins. Après trois matchs, cette dynamique semble bien installée et c'est pourquoi on ne peut tout simplement compter sur les indicateurs traditionnels de possession de rondelle pour identifier un favori. Les deux équipes ont des forces différentes et la capacité des Penguins à exploiter Rinne ne va pas s'effacer au fil des prochains matchs