Le renversement de tendance, à partir de la saison écourtée de 2013, est manifeste. Thornton est de plus en plus surexposé aux meilleurs éléments adverses, en même temps que la qualité relative de ses coéquipiers diminue. Honnêtement, l'ampleur de son revirement m'a surpris.
Plusieurs facteurs s'entrecroisent ici. Premièrement, on passe d'une époque (les années 07-10) où Thornton joue 21, 22 minutes par match en compagnie de joueurs comme Patrick Marleau, lui aussi utilisé à profusion. Au fil des saisons, l'émergence de joueurs comme Logan Couture et Joe Pavelski ajoute de la profondeur aux Sharks, qui diminuent le temps de jeu de Thornton. Mais, depuis quelques années, les Sharks peinent à se renouveler.
Dans ce contexte, on a fait le choix, depuis la saison 2013-14, d'associer systématiquement Thornton à Joe Pavelski. À leur aile se sont succédé Brent Burns, Melker Kalrsson et Tomas Hertl. De même, depuis deux ans, Thornton prend désormais un nombre disproportionné de mises en zone offensive.
La réponse des adversaires est, dans ce contexte, manifeste : on surveille Thornton comme jamais avant parce que celui-ci est de plus en plus spécifiquement associé à des joueurs et des situations offensives. Alors qu'il jouait, dans ses grandes années, en désavantage numérique et prenait des mises en jeu dans toutes les situations, on voit aujourd'hui ses tâches défensives s'alléger.
Les performances soutenues de Thornton ne sont donc pas seulement le fait de ses exceptionnels dons physiques et de sa persévérance. On a su, à San Jose, continuer à miser sur lui tout en s'assurant de le soustraire aux situations où ses talents n'étaient pas nécessaires. Ce genre d'adaptation illustre pourquoi, au-delà des talents de ce remarquable meneur de jeu, les Sharks font encore partie des meilleurs clubs de la ligue : on ne se contente pas de reproduire année après année le même plan de match, on ajuste, on adapte, on recycle.
Les équipes qui peinent à performer d'une saison à l'autre regardent souvent du côté de l'alignement, déplorant l'absence de tel ou tel type de joueur. Mais dans les faits, c'est la capacité à tirer le maximum de ce qu'ils ont sous la main qui distingue les bonnes formations. Le travail des Sharks au fil des saisons (et malgré un changement d'entraîneur!) l'illustre éloquemment.