Phil Kessel

SAN JOSE - Est-il possible de gagner avec Phil Kessel?
C'est là une question qui n'aurait jamais dû être soulevée, bien qu'on l'ait posée plusieurs fois quand il s'alignait avec les Bruins de Boston et les Maple Leafs de Toronto. Ce qu'il aurait plutôt fallu demander, c'est : Comment le placer dans un contexte qui lui permettra de bien exploiter son talent afin qu'il aide son équipe à gagner ?
Maintenant que les Penguins de Pittsburgh y sont presque arrivés, la question devient : L'équipe aurait-elle aussi bien fait sans lui ?

Kessel est le principal candidat pour remporter le trophée Conn Smythe, qu'on remet au joueur le plus utile à son équipe dans les séries éliminatoires de la Coupe Stanley, alors que les Penguins ont une avance de 3-1 face aux Sharks de San Jose en Finale de la Coupe Stanley. Le cinquième match de la série quatre de sept aura lieu jeudi au Consol Energy Center à Pittsburgh (20h HE ; TVA Sports, CBC, NBC).
Kessel est le meneur chez les Penguins pour les buts, avec 10, ainsi que pour les points, avec 21. Il a ainsi allégé le fardeau du capitaine Sidney Crosby et d'Evgeni Malkin, le lauréat du Conn Smythe en 2009. L'entraîneur Mike Sullivan vante son dévouement et le fait qu'il excelle dans tous les aspects du jeu.
« Jamais tu n'oses imaginer quelque chose du genre », a lancé Kessel pendant qu'il était entouré de journalistes dans un couloir du SAP Center à San Jose, après avoir participé à deux des trois buts des Penguins dans la victoire de 3-1 des siens, lundi. « Mais le fait d'être à un match de l'emporter, c'est quelque chose de spécial. »
En trois saisons avec les Bruins et en six campagnes avec les Maple Leafs, Kessel a participé aux séries à trois reprises et il a atteint le deuxième tour une fois. C'était là davantage un reflet du niveau de jeu de ses équipes que du sien.
Kessel avait des forces considérables : la vitesse et la capacité de marquer des buts. Bien qu'il avait tendance à produire par séquences au cours d'une saison, il affichait de la constance d'une saison à l'autre. De 2008-09 à 2013-14, il a inscrit entre 30 et 37 buts à chacune des campagnes de 82 matchs ; il a totalisé 20 buts durant le calendrier de 48 rencontres en 2012-13, soit l'équivalent de 34 filets sur une saison complète. Et il a produit lorsqu'il a eu l'occasion de prendre part aux séries, alors qu'il a enregistré 13 buts et 21 points en 22 matchs éliminatoires, égale à ses 21 points en 22 matchs des séries cette saison.

Ses détracteurs se sont toutefois attardés aux qualités qu'il n'avait pas : un sens aigu de la défensive, un corps musclé, une personnalité extrovertie. On l'a blâmé de façon démesurée pour les échecs de ses équipes, même si les Bruins et les Maple Leafs n'alignaient pas des formations dignes d'un club champion.
La seconde partie de cette affirmation a dû sembler familière aux oreilles de Crosby et Malkin. Quand Jim Rutherford s'est amené au poste de directeur général en 2014, il s'est donné pour mission de mieux entourer ses deux principaux joueurs de centre. La plus importante des nombreuses décisions qu'il a prises lui a permis d'obtenir Kessel des Maple Leafs en juillet 2015.
Kessel n'a pas développé de chimie avec Crosby. Ni avec Malkin. Mais Rutherford a remplacé l'entraîneur Mike Johnston par Mike Sullivan, et les Penguins ont alors choisi de chercher d'abord et avant tout à exploiter leurs forces, c'est-à-dire leur vitesse et leur talent. Rutherford a fait d'autres changements, ce qui l'a amené à faire l'acquisition de l'attaquant Carl Hagelin, des Ducks d'Anaheim, en janvier.
Sullivan a créé un nouveau trio en mars : Hagelin à l'aile gauche, Nick Bonino au centre et Kessel à l'aile droite. Non seulement le trio « HBK » s'est-il mis à produire, mais cela a donné de sérieux maux de tête aux équipes adverses : à quel trio faut-il jumeler notre meilleure unité défensive ? Celui de Crosby, de Malkin ou de Kessel ?
« Le fait que Kessel, Crosby et Malkin se retrouvent au sein de trois trios différents… Ces trois-là font tous plus d'argent que n'importe lequel des joueurs dans notre équipe, a noté l'entraîneur des Sharks Peter DeBoer. Leur opposer les bons joueurs s'est avéré un problème pour tout le monde tout au long des séries. »
La production de Crosby et Malkin, ce printemps, est légèrement inférieure à leur moyenne en carrière à ce chapitre. Mais les Penguins ont continué à gagner malgré tout parce que Kessel produit quasiment au même rythme que par le passé, et d'autres joueurs ont également apporté leur contribution. Kessel a aussi participé à l'effort collectif des siens en défensive.
« Quand je le regarde jouer, je me dis qu'il est dévoué. Il se dévoue à nous aider à gagner », a souligné Sullivan.
L'entraîneur des Penguins a louangé les habiletés offensives de Kessel, notant au passage qu'on sous-estime la qualité de ses passes.
Il a ensuite dit ceci :
« Ce qui m'impressionne le plus chez Phil, c'est l'engagement dont il fait preuve sans la rondelle, quand il se retrouve dans notre zone, à quel point il s'implique le long des bandes. Il fonce vers la rondelle avec force. Il joue de la bonne façon en ce moment. C'est impressionnant à voir. Selon moi, c'est sa volonté de jouer du hockey complet qui permet à son trio d'être aussi efficace qu'il l'a été depuis le début des séries. »
Lorsqu'on lui a fait remarquer que ce sont là des déclarations qu'on n'entendait jamais de la bouche des entraîneurs par le passé quand ceux-ci parlaient de Kessel, et quand on lui a demandé ce qu'il a fait pour inciter Kessel à s'impliquer autant, Sullivan a répondu qu'il a mis son attaquant au défi de s'améliorer dans certains aspects de son jeu. Il a toutefois vanté Kessel pour avoir décidé de s'engager de la sorte.
Voici une théorie : Bien que les critiques de Kessel lui reprochaient auparavant de ne pas jouer du hockey complet, ceux-ci l'évaluaient avant tout en fonction de sa production à l'attaque ; c'est pourquoi il avait l'impression qu'il devait marquer pour aider son équipe à gagner, parce que son équipe n'était pas très bonne. Maintenant, on ne met pas autant l'accent sur ses statistiques individuelles, il est en mesure de mieux paraître face aux joueurs qu'on lui oppose et il voit davantage le lien direct qu'il y a entre l'importance de bien jouer dans les deux sens de la patinoire et remporter la Coupe Stanley. C'est un cercle vertueux : plus il le fait, plus ça fonctionne, plus on reconnaît la validité de ses efforts en ce sens, plus il le fait.
Les Penguins l'ont mis en position de connaître du succès, mais le contraire est aussi vrai.
« Nous n'en serions pas à ce stade si Phil n'avait pas joué le genre de hockey qu'il a joué pendant ces séries, a affirmé Sullivan. Il a été un joueur formidable pour nous. C'est un joueur complet en ce moment. Quand il joue de cette façon, il est un des meilleurs joueurs dans la Ligue, selon moi. »