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Notre chroniqueur Anthony Marcotte nous parle de l'actualité chez le Rocket de Laval, ainsi que dans l'ensemble de la Ligue américaine de hockey (LAH). Il permettra aux partisans de suivre assidûment ce qui se passe dans l'antichambre de la meilleure ligue de hockey au monde.
Le Rocket de Laval vient de causer une certaine surprise en montrant la porte de sortie dans le minimum de trois parties à ses opposants des Americans de Rochester, mercredi soir. Un but dramatique du Lavallois Jean-Sébastien Dea en début de troisième période de prolongation a propulsé le club-école des Canadiens de Montréal à une première demi-finale de la Ligue américaine depuis 2011.

Depuis, que ce soit à Hamilton ou bien à St. John's, la filiale des Canadiens n'a jamais connu beaucoup de succès. On se souvient du dernier passage des IceCaps lors du printemps 2016 quand la troupe dirigée par Sylvain Lefebvre s'était fait montrer la porte de sortie au premier tour face au Crunch de Syracuse. Depuis, fraîchement déménagé à Laval avec un nom rappelant l'une des plus grandes légendes du hockey, jamais le Rocket ne s'était montré le bout du nez en éliminatoires en quatre années d'opération.
Il y a bien sûr eu la pandémie qui est venue freiner une palpitante course aux séries en mars 2020, puis la saison dernière, quand la LAH a décidé de ne pas organiser de séries pour des questions logistiques en raison des restrictions à la frontière. Tout de même, cette équipe avait un urgent besoin de gagner afin de cimenter sa place dans un marché néophyte de la Ligue américaine.
Dès le début de la saison, on a senti qu'il pourrait se passer quelque chose de spécial avec cette équipe. L'adhésion de plusieurs vétérans québécois de premier plan qui désiraient porter le chandail du Rocket a été une véritable bénédiction pour l'organisation. La rétrogradation de quelques vétérans comme Cédric Paquette et Sami Niku est venue combler des besoins importants à l'attaque et à la ligne bleue. Puis, il y a eu l'émergence d'un vétéran gardien que personne n'attendait, Kevin Poulin, alors que l'équipe avait cruellement besoin de fiabilité entre les poteaux. Depuis, c'est Cayden Primeau qui a repris la balle au bond et il connaît des séries phénoménales.
Tentons d'y voir plus clair dans les succès du Rocket de Laval en cinq points à l'approche de la série demi-finale de la Ligue américaine qui devrait commencer le 4 juin prochain, à Springfield (club-école des Blues de St. Louis) ou à Charlotte (club-école des Panthers de la Floride et du Kraken de Seattle).

1. Le leadership

Avant d'entamer les séries, le Rocket présentait une formation plus âgée et expérimentée, particulièrement dans les séries éliminatoires de la Coupe Stanley. Cédric Paquette possède une bague de la Coupe (Lightning de Tampa Bay en 2020), tout comme Devante Smith-Pelly (Capitals de Washington en 2018), qui malgré un rôle plus effacé, exerce un rôle de mentor très apprécié auprès de ses plus jeunes coéquipiers. Gabriel Bourque, qui compte 36 matchs d'expérience en séries dans la LNH en carrière, montre aussi la voie et il a été l'auteur du but vainqueur pour éliminer le Crunch au tour précédent.
Au poste de capitaine, Xavier Ouellet est dominant dans la Ligue américaine et n'a pas caché ses aspirations de tout donner pour essayer de se rendre jusqu'au bout. Pour la première fois en six ans, Ouellet n'a pas disputé de match dans la LNH cette année, mais on ne l'a jamais senti s'apitoyer sur son sort, au contraire. Ouellet est l'ultime soldat pour le Rocket et s'avère un capitaine rêvé pour Jean-François Houle.
D'autres vétérans se sont joints au noyau de l'équipe pour vivre l'expérience du hockey à Laval. Les Jean-Sébastien Dea, Louie Belpedio, Danick Martel, Brandon Gignac et Kevin Roy sont demeurés toute la saison à Laval et ont tous eu leur mot à dire à un certain point au cours de l'année pour conduire l'équipe en séries.
Un thème revient souvent autour de l'équipe présentement : le calme désarmant qu'affiche cette formation match après match. En situations critiques, il n'y a jamais de panique qui se dégage au sein du groupe. Nul doute que l'expérience a son gros mot à dire dans tout ça.

2. La défensive

Les Americans de Rochester ont vraiment trouvé chaussure à leur pied dans leur série face au Rocket, et ce, malgré tous les succès offensifs qu'ils ont pu obtenir dans les deux tours précédents face à Belleville et Utica. Les ténors offensifs JJ Peterka, Jack Quinn, Peyton Krebs et Arttu Ruotsalainen ont été tenus au silence pendant une bonne partie de la série grâce au rendement défensif lavallois.
Depuis le début des éliminatoires, Jean-François Houle a fait confiance à son groupe des six piliers : Ouellet, Belpedio, Niku, Tobie Paquette-Bisson, Tory Dello et Corey Schueneman. Le jeune Mattias Norlinder a aussi bien fait dans la formation pendant cinq matchs avant de subir ce qui semble être une commotion cérébrale dans le premier match contre Rochester.
« Contre une équipe comme Rochester, tu n'as pas le choix d'être constamment sur elle parce que dès que tu lui donnes la moindre ouverture, elle va te faire mal, disait Jean-François Houle pendant la série. Quand on est agressif sur eux, on obtient de bons résultats. »

3. Cayden Primeau

Le gardien du Rocket est devenu la grande vedette de ce remarquable parcours en séries. Après avoir vu Kevin Poulin se faire confier le filet dans le match no 1 contre Syracuse, Primeau a rebondi le lendemain avec une performance de 37 arrêts pour signer la victoire. Il n'a jamais plus regardé derrière depuis.
Ses chiffres sont remarquables. Il revendique six victoires en sept matchs, affiche une moyenne de buts alloués de 1,93 et un pourcentage d'arrêts à ,936 jusqu'à maintenant. Un rendement supérieur jusqu'ici en comparaison avec ce qu'avait fait Price en 2007, lui qui s'était mérité le titre du joueur par excellence en séries à Hamilton après la conquête de la coupe Calder.
Il est peut-être trop tôt pour faire des comparaisons entre les parcours de Price et de Primeau, mais une chose est certaine, le rendement de l'Américain de 22 ans doit en rassurer plus d'un en vue de la saison prochaine où la situation des gardiens chez les Canadiens est plutôt incertaine.

4. Le 'coaching'

Jean-François Houle avait de grands souliers à chausser en acceptant le poste d'entraîneur-chef du Rocket en début de saison après le départ de Joël Bouchard, un homme de hockey qualifié et grandement apprécié par les amateurs après un excellent travail réalisé en trois ans à la barre de l'équipe.
Aujourd'hui, personne ne parle de Bouchard à la Place Bell. Jean-François Houle est le maître incontesté à bord et semble faire l'unanimité dans le vestiaire. Ça ne l'a pas empêché de prendre des décisions difficiles depuis le début des séries.
Il a désigné Poulin comme gardien partant avant le premier match des séries pour revenir avec Primeau dès le lendemain. Il n'a aussi pas hésité à retrancher de sa formation quelques jeunes vétérans qui ont aidé à conduire l'équipe en séries, comme Kevin Roy et Jean-Christophe Beaudin. Il ne doit pas être facile de montrer le chemin des gradins à Smith-Pelly plus souvent qu'à son tour, mais Houle a un travail à faire et sait ce que ça prend pour aligner la meilleure formation possible. En l'absence de Norlinder, Houle est revenu à une formation de 12 attaquants et il a choisi d'insérer dans ses rangs le jeune Lucas Condotta, qui vient de connaître deux excellents matchs pour aider son équipe à éliminer les Americans.
Houle ne le dira jamais publiquement, mais il y a fort à parier qu'avoir eu l'avantage sur son homologue Benoit Groulx au premier tour lui a fait particulièrement plaisir.

5. Une ambiance survoltée à la Place Bell

Le domicile du Rocket est devenu un endroit très hostile pour l'adversaire. La frénésie des séries a vraiment gagné Laval et le Rocket a été à l'aise toute la saison devant ses partisans. Le Rocket est devenu le meilleur spectacle en ville et les gens s'arrachent les billets pour venir encourager l'équipe. Le rituel d'avant-match n'a rien à envier à bien des marchés de la LNH et le bruit à l'intérieur de l'édifice est tout simplement ahurissant. Une vague déclenchée par les partisans a duré plus de 7 minutes pendant le match numéro 2 contre Rochester, du jamais-vu!
Des milliers de billets ont déjà trouvé preneurs dès l'ouverture des guichets vendredi pour les trois matchs de la demi-finale qui doivent être présentés les 8, 10 et 11 juin à la Place Bell. C'est à croire que les amateurs de hockey, qui n'ont pas vraiment pu se déplacer pour encourager le Tricolore lors de son incroyable parcours de l'an dernier, se sont rabattus sur le club-école en espérant un championnat cette fois-ci.
Et à regarder le Rocket aller présentement, tout est possible.