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Tout au long de la saison, les joueurs francophones des Golden Knights de Vegas vont partager avec nous leur expérience avec la toute dernière équipe d'expansion de la LNH, et la toute première équipe professionnelle à évoluer à Las Vegas. Ils vont nous parler de ce qui se passe sur la glace, mais également de leur quotidien à l'extérieur de la patinoire dans leur nouvel environnement.
L'attaquant Pierre-Édouard Bellemare nous parle de son arrivée à Vegas, ainsi que de la place déjà importante que prend l'équipe dans la ville.
Salutations avant tout aux amateurs de hockey, principalement à tous ceux de la France et de l'Europe. C'est avec plaisir que je vais partager avec vous mon expérience sur la « Strip ». Vous me permettrez de commencer ce blogue par un hommage aux mamans, à ma maman.

Vous allez comprendre, je vous raconte. Il y a plusieurs années, quand je jouais dans la Ligue suédoise, nous avons gagné le championnat et la récompense de groupe que nous nous sommes offerte était un voyage à Las Vegas, toutes dépenses payées. Le voyage avait été planifié après le Championnat du monde pour me permettre d'y participer. J'avais tellement hâte. Après le Mondial, je me suis présenté à l'aéroport de Paris tout fébrile. Mais horreur : on m'a refusé l'entrée au pays en raison d'un imbroglio de passeport entre la France et les États-Unis dont j'étais une innocente victime.
J'étais très en colère sur le chemin du retour. Ma mère, Frédérique, m'avait réconforté en me disant que c'était un signe que j'allais repartir pour les États-Unis. Elle avait ajouté que j'allais avoir besoin de mon nouveau passeport pour longtemps. Comme je ne suis pas superstitieux, j'avais répondu : « Ah oui c'est ça… »
Un an plus tard, je signais un contrat avec les Flyers de Philadelphie. Et me voilà maintenant à Las Vegas, à ma quatrième saison de hockey en Amérique du Nord. C'est fou! Si quelqu'un m'avait dit ça à l'époque, je lui aurais gentiment répondu de se la fermer.
Mais ma maman a eu une bonne prémonition. La conclusion à tirer, c'est que les mamans ont toujours raison.
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Notre arrivée à Las Vegas, mon épouse Hannah et moi, s'est déroulée de façon admirable. Les Golden Knights ont très bien fait les choses. Pour les premières semaines, le temps de trouver une maison, nous avons été logés dans un complexe hôtelier différent de celui des autres joueurs parce que nous sommes venus de l'Europe avec notre chat Smiffy et que les hôtels que l'équipe avait réservés temporairement près du complexe d'entraînement n'acceptaient pas les chats.
Nous avons passé moins de temps avec le groupe. Ça nous a permis de nous faire notre propre idée de la ville. Nous n'avions pas de voiture et nous nous sommes baladés en taxi et en Uber. C'était génial, nous avons fait de belles découvertes dans le quartier qui s'appelle Summerlin. Nous avons pu dénicher de bons restaurants et nous familiariser avec la communauté. Tout le monde nous vantait l'endroit. Nous avons tellement aimé que nous l'habitons maintenant.
Nous avons constaté à quel point la vie peut être facile pour les gens de la place. Nous avons maintenant une voiture. Si vous roulez plus de 10 minutes à Las Vegas, ça veut dire que vous êtes vraiment trop loin de l'action. Si vous prenez la route et que vous vous retrouvez dans des bouchons, ça ne rajoute que 10 minutes à votre trajet, pas plus que ça. Tout est à proximité.
C'est différent des autres grandes villes dans le monde. À Paris, à titre d'exemple, les touristes se mélangent aux résidants de la ville. À New York, c'est pareil. À Las Vegas, les touristes restent dans la « Strip » parce qu'ils ne connaissent rien d'autre. Du coup, les communautés alentour sont incroyables. Les familles sont à l'honneur. Les restaurants sont excellents parce que s'ils ne le sont pas, les gens de la place n'y reviendront pas. Il n'y a pas d'attrape-touristes.
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J'ai vite constaté la grande place qu'occupaient déjà les Golden Knights. J'ai eu beaucoup d'interactions amusantes au début avec des gens qui ne savaient qui j'étais. Dans les taxis et transports Uber que je prenais pour me rendre au complexe d'entraînement, plusieurs chauffeurs portaient la casquette des Golden Knights ou encore ils avaient placé un autocollant de l'équipe sur leur voiture. Je les écoutais me parler fièrement de leur nouvelle équipe de sport qu'ils attendaient impatiemment. Rendu à destination, ils me demandaient c'était quoi le complexe où ils me déposaient et je leur disais que c'était la nouvelle patinoire d'entraînement des Golden Knights. Quand ils réalisaient que j'étais un joueur, ils devenaient tout excités. Ils me demandaient des autographes.
La population était très emballée d'accueillir « son » équipe, mais elle ne pouvait pas mettre de visage sur le logo.

C'était au début, maintenant ç'a changé. Les gens nous reconnaissent beaucoup plus rapidement. Il faut dire qu'il s'est produit un épouvantable drame qui a contribué à renforcer le lien entre les amateurs et l'équipe.
Après la tragédie meurtrière du 1er octobre, les gens se sont tournés vers nous pour avoir un peu de positif et de joie et nous avons réussi à leur en donner. On n'a jamais envie de dire que quelque chose de semblable peut avoir aidé, mais ç'a été le cas.
Il y a eu comme un déclic. Les gens ont mis tout leur espoir dans un groupe de 23 joueurs qui ont compris que tout ça allait bien au-delà du sport. Ç'a été un détonateur.
L'engouement est maintenant palpable partout en ville. Nos entraînements font souvent salle comble. Il y a des partisans en permanence à la sortie de la patinoire avec des enfants.
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L'expérience jusqu'à maintenant, c'est du jamais vu pour moi. À Philadelphie, le hockey est bien ancré. Les supporters des Flyers le sont depuis toute leur vie et leurs enfants le sont également parce que c'est l'équipe de leur ville. Ici c'est différent, c'est comme si la ville avait reçu un cadeau. Les gens le regardent et ils n'osent pas trop lui toucher. Mais ils sont tellement contents de l'avoir, c'est un peu ça les Golden Knights.
Il ne me vient pas à l'esprit d'avoir déjà vécu une expérience semblable sur le plan personnel. L'unique comparaison que je peux faire, uniquement que pour nous les joueurs, c'est avec ma participation au tournoi de la Coupe du monde (en 2016). La naissance de l'équipe, ç'a vraiment été comme une "World Cup". Pour ce qui est des partisans, c'est dur de trouver une comparaison parce que je n'ai jamais fait partie d'une concession qui arrive dans une ville super excitée.