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Il y a 40 ans, naissait une dynastie du hockey n'ayant pas comme nom les Canadiens de Montréal.
Le 24 mai 1980, un samedi en fin d'après-midi d'une longue fin de semaine, Bob Nystrom procurait aux Islanders de New York leur première conquête de la Coupe Stanley. Nystrom a semé la frénésie au Nassau Coliseum d'Uniondale en redirigeant du revers la passe de John Tonelli derrière le gardien Pete Peeters, à 7:11 de la prolongation du match no 6 de la Finale contre les Flyers de Philadelphie. Les « Insulaires » allaient savourer trois autres championnats en succession après avoir mis fin à la suprématie des Canadiens, quadruples champions entre 1976 et 1979.

« Le mot qui m'est venu en tête à l'époque, c'est "finalement" », évoque l'ancien ailier droit vedette des Islanders Mike Bossy, en remontant dans le temps.
« Finalement, parce que nous aurions dû remporter cette première Coupe bien avant », ajoute Bossy en entrevue à LNH.com.
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Après s'être butés aux Canadiens en demi-finale au cours des séries 1976 et 1977, les Islanders ont trébuché face à des adversaires moins coriaces au cours des deux saisons suivantes.
Comme le souligne l'ancien défenseur étoile Denis Potvin, les Islanders ont dû se river le nez sur le mur à quelques reprises avant de le franchir.
« Nous avons dû vivre de grandes déceptions, relève-t-il. Nos éliminations au cours des deux années précédentes contre des équipes moins fortes - les Maple Leafs de Toronto en 1978 et les Rangers de New York en 1979 - nous ont fait réaliser que ça fait mal perdre.
« Tu te penses la meilleure équipe et tu arrives en séries, puis "bing bang" tu te fais éliminer, un peu comme le Lightning de Tampa Bay l'an dernier. Tu retiens la leçon », renchérit Potvin.
Pour Bossy, les jeunes Islanders, qui ont fait leur entrée dans la LNH en 1972, manquaient de maturité et d'expérience.
La saison 1979-80 a même apporté son lot d'adversité à l'équipe. Le capitaine Clark Gillies a abandonné son titre de capitaine tout juste avant le début de la saison. Potvin l'a remplacé. L'équipe a mal amorcé la saison, sans Potvin pour les huit premiers matchs, en ne signant que six gains en 21 rencontres. Potvin est retombé au combat à la fin de novembre pour une longue période, blessé au pouce de la main droite. Il n'est revenu au jeu qu'au début de mars.
« Ça n'allait pas bien notre affaire. On s'en allait en séries en boitant en février », image Bossy.
Puis, la magie a commencé à opérer. Les Islanders ont d'abord accueilli le défenseur Ken Morrow, le 1er mars, peu de temps après qu'il eut pris part au « Miracle sur glace » de l'équipe américaine aux Jeux olympiques de Lake Placid. Le directeur général Bill Torrey a ensuite réalisé un coup d'éclat, le 10 mars, en dégotant Butch Goring dans le cadre d'une transaction avec les Kings de Los Angeles.

Butch Goring

Quarante ans plus tard, on dit de la transaction qu'elle a été la meilleure de l'histoire de l'organisation. Pour les ténors de l'équipe dans le temps, l'arrivée du « Viking » Goring a été rien de moins que le dernier morceau du casse-tête de la dynastie des Islanders.
« Ça prenait du culot pour échanger deux de nos joueurs les plus populaires, l'attaquant Billy Harris et le défenseur Dave Lewis, en retour de Goring, estime Potvin. C'était une décision difficile à prendre, mais qui a sûrement été mûrie par Bill Torrey et l'entraîneur Al Arbour. Nous avions un besoin à combler à la position de centre derrière Bryan Trottier, et on a estimé que Butch Goring était le joueur tout désigné. »
Bossy acquiesce qu'on a joué gros parce que l'acquisition de Goring aurait facilement pu faire chou blanc.
« Ç'a été tout un ajout, il a comblé exactement un besoin que nous avions, avance-t-il. Il donnait du répit à Bryan et c'était une arme additionnelle dans notre arsenal. Il nous aidait dans plusieurs aspects, en supériorité et en infériorité numérique ainsi que sur les mises au jeu. C'était le dernier morceau du casse-tête manquant. Avec lui, nous avions maintenant tous les ingrédients : le talent, la maturité et l'expérience. »
Les Islanders, deuxièmes de la section Patrick grâce à une fiche de 39-28-13, ont terminé la saison sur une lancée en ne perdant aucune de leurs 12 dernières rencontres (8-0-4). Ils ont entrepris les séries en se mesurant aux Kings, qu'ils ont défaits en quatre matchs (3-1) dans une confrontation au meilleur de cinq.
Au deuxième tour, ils se sont frottés aux rugueux Bruins de Boston dans une série quatre de sept.
« Ç'a brassé, il y a eu des batailles extraordinaires, se souvient le Franco-Ontarien Potvin. Les Bruins ont joué la carte de l'intimidation avec les Terry O'Reilly, Mike Milbury, Al Secord et Stan Jonathan. Nous leur avons donné la réplique avec les Gillies, Nystrom, Gary Howatt et Gord Lane. La série nous a révélé que nous pouvions tenir notre bout dans tous les styles de jeu. »
Après avoir liquidé les Bruins en cinq matchs, les Islanders ont sorti les Sabres de Buffalo en six matchs, après avoir pris les devants 3-0 dans la série.
En Finale, les Flyers étaient les favoris pour l'emporter à titre de meilleure équipe de la ligue en saison régulière. Avec 116 points de classement, ils avaient récolté 25 points de plus que les Islanders. Ils avaient connu une séquence record de 35 matchs d'affilée sans défaite (25-0-10), une marque qui résiste au temps encore aujourd'hui.
« D'être allé chercher le premier match au Spectrum de Philadelphie a été extrêmement important, argue Potvin. Ça nous a donné beaucoup de confiance. »

Nystom celebration (bw)

Les Islanders l'ont emporté 4-3 en prolongation grâce au but de Potvin réussi en supériorité numérique.
« Ç'a été un de mes buts les plus importants en carrière, admet-il. Les Flyers étaient revenus forts dans le match no 2 en nous bafouant 8-3, mais ça ne nous avait pas ébranlés. Nous étions tout de même dans une position favorable pour gagner la Coupe devant nos partisans dans un sixième match. »
Les Islanders ne se sont effectivement pas laissé démonter, en enlevant les honneurs des deux duels suivants au Nassau Coliseum, 6-2 et 5-2. Les Flyers ont évité l'élimination devant leur public en gagnant le cinquième match 6-3.
Les Islanders menaient 4-2 après deux périodes du match no 6, avant de voir les Flyers créer l'égalité en troisième période.
La tension était à couper au couteau en prolongation jusqu'à ce que Nystrom passe à la postérité avec son but héroïque.

« J'étais sur le banc tout près, et je suivais le jeu vers ma gauche en entrée de territoire des Flyers, se remémore Bossy. Ça s'est développé en chance de marquer et, en voyant la rondelle rentrer dans le but, tout ce qu'on pense à faire c'est d'aller célébrer avec l'auteur du but et tous les coéquipiers sur la glace.
« En soulevant la Coupe, on pense comme Québécois à tous les anciens joueurs vedettes des Canadiens qu'on a vus poser le même geste en grandissant et on ressent un grand sentiment de fierté. »
Potvin a dit avoir eu une pensée pour son idole d'enfance Jean Béliveau des Canadiens.
« J'ai toujours dit que c'est ce dont je suis le plus fier, d'avoir soulevé la Coupe comme capitaine des Islanders », souligne Potvin, qui a grandi à Overbrook, près de Vanier, en Ontario. « J'ai eu une pensée pour mon idole Jean Béliveau. J'ai même une peinture de la scène à la maison. Nos quatre conquêtes de la Coupe Stanley représentent mes plus beaux souvenirs comme joueur, beaucoup plus que mes trophées Norris. »