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Dès que Lars Eller s'est retrouvé avec les Canadiens de Montréal, tous ses faits et gestes ont été scrutés à la loupe.
Pièce maîtresse de la transaction qui a envoyé le gardien Jaroslav Halak aux Blues de St. Louis, un mois environ après que celui-ci eut réalisé des miracles et mené les Canadiens jusqu'en finale de l'Association de l'Est au printemps 2010, Eller a dû vivre avec le fait qu'on avait des attentes démesurément élevées à son endroit.

Mais dès le début, il a accepté le défi et cherché à jouer à la mesure de ces attentes.
« Ouais, évidemment, mais c'est quelque chose qui pourrait prendre un peu de temps », avait dit Eller à sa première journée au camp d'entraînement des Canadiens, à l'automne 2010. « Jaro était un excellent joueur, il était un élément important de cette équipe. Je ne peux pas le remplacer dans le rôle qu'il avait dans cette équipe. Évidemment, tu veux faire ton propre nom. »
Un peu plus de six ans après s'être amené à Montréal, Eller a été échangé aux Capitals de Washington en retour de choix de deuxième tour à l'occasion des repêchages 2017 et 2018 de la LNH. Et ce, sans avoir réussi à atteindre ce qu'il s'était donné comme objectif à l'âge de 21 ans, à l'occasion de son premier camp d'entraînement avec la formation montréalaise.
Eller ne s'est pas fait un nom avec les Canadiens, du moins pas de la façon dont l'équipe, les partisans et lui l'espéraient. Au fil de ses six saisons à Montréal, Eller est devenu un joueur de centre solide en défensive, un joueur assez fiable pour qu'on l'oppose aux meilleurs joueurs adverses. Mais il n'est jamais devenu une menace à l'attaque comme il espérait l'être, alors qu'il n'a atteint le cap des 30 points qu'une fois en six campagnes.
Le directeur général des Canadiens Marc Bergevin a reçu Eller en héritage à son arrivée en poste en 2012 et lui a accordé en 2014 son contrat actuel de quatre ans d'une valeur de 14 millions $. Après avoir complété la transaction durant le repêchage 2016 de la LNH, il a déclaré qu'Eller était parfois son pire ennemi, surtout lorsqu'il s'imposait lui-même trop de pression. Lorsqu'on ajoute cela à la pression considérable qu'on lui imposait déjà en raison de la transaction qui l'a amené à Montréal, ça en faisait beaucoup à gérer pour un jeune homme. Eller a d'ailleurs reconnu, lundi, qu'il laissait souvent les grandes attentes qu'il avait à son endroit affecter son niveau de jeu.
« J'ai mis beaucoup de pression sur mes propres épaules, a-t-il reconnu. Parfois, j'en mettais trop et j'étais parfois trop dur envers moi-même. Je veux juste faire de mon mieux. Peut-être qu'à l'occasion, c'était trop, et il y avait des moments où je n'avais pas beaucoup de plaisir à jouer ; ça affectait parfois mon jeu. C'est tout simplement un apprentissage que tu dois vivre et ça fait partie de ton évolution comme joueur. Oui, je suis certain que ç'a paru. »
Bien qu'Eller ait manqué de constance durant son séjour à Montréal, il faut dire qu'il y avait des circonstances qu'il ne contrôlait pas qui ont exacerbé la situation ; il a d'ailleurs fait allusion à cela, lundi, lorsqu'il parlé de la façon dont les Capitals lui ont souhaité la bienvenue.
Ce qui lui a fait le plus plaisir, c'est d'entendre le directeur général des Capitals Brian McLellan dire qu'il tentait d'arracher Eller aux Canadiens depuis un an et qu'il sera le joueur de centre du troisième trio au sein de sa nouvelle équipe.
« Ils me voient occuper un poste bien défini, un rôle précis, et je crois que cette stabilité va me profiter, a dit Eller. C'est là quelque chose qui me rend vraiment heureux. »
À Montréal, on a eu tendance à jouer aux chaises musicales avec le rôle qu'on confiait à Eller. D'abord présenté comme un jeune joueur qu'on préparait pour le poste de centre du deuxième trio, il est ensuite devenu un joueur de centre chargé de freiner l'adversaire au sein du troisième trio, puis un ailier gauche et encore un centre ; à travers tout cela, il a joué avec une longue liste de compagnons de trio.
« Je n'irais pas jusqu'à dire que c'était un problème, a déclaré Eller. Peut-être que parfois, ça me gênait davantage que ça m'aidait. Mais j'ai toujours eu l'attitude que c'est une bonne chose d'apprendre à jouer différents rôles, que ça peut t'aider. J'étais parfois à l'aile et j'étais parfois au centre. Je pense qu'au fond, je suis un joueur de centre et c'est à ce poste que Washington me voit jouer aussi. »
Sous les ordres de l'entraîneur Michel Therrien au cours des quatre dernières saisons, le compagnon de trio avec qui Eller a joué le plus souvent à cinq contre cinq a été Alex Galchenyuk ; malgré tout, il n'a disputé que 38,2 pour cent de ses minutes de jeu totales à armes égales avec Galchenyuk, selon stats.hockeyanalysis.com. À titre comparatif, mentionnons que pendant la même période de temps, le joueur de centre David Desharnais a disputé 59,3 pour cent de son temps de glace avec le meilleur ailier gauche des Canadiens, Max Pacioretty.
En bout de ligne, Eller a disputé au moins 200 minutes de jeu au cours des quatre dernières saisons avec 11 attaquants différents (du plus grand nombre de minutes disputées ensemble jusqu'au plus modeste) : Galchenyuk (38,2 pour cent des minutes), Brandon Prust (22,2 pour cent), Rene Bourque (12,5 pour cent), Jiri Sekac (12 pour cent), Brendan Gallagher (11 pour cent), Tomas Plekanec (9,7 pour cent), Dale Weise (8,2 pour cent), Jacob De La Rose (7,3 pour cent), Brian Gionta (6,3 pour cent), Sven Andrighetto (6,1 pour cent) et Devante Smith-Pelly (6,1 pour cent).
À noter que trois des quatre premiers joueurs dans cette liste, et six des 11 qu'on y retrouve, ne s'alignent plus avec les Canadiens.
Eller a dit avoir eu une discussion avec l'entraîneur des Capitals Barry Trotz plus tard dans la soirée de son échange vendredi et il s'est dit encouragé par le fait que le contexte devrait être différent pour lui à Washington.
« Barry m'a dit qu'il m'avait placé derrière [Nicklas] Backstrom et [Evgeny] Kuznetsov dans le rôle de troisième centre, a indiqué Eller. Je suis certain qu'on va me donner de bons ailiers, avec qui je vais avoir du plaisir à jouer et pouvoir créer beaucoup de choses à l'attaque, tout en jouant de façon responsable en défensive. »
Eller a fait savoir que le plus beau souvenir qu'il garde de son séjour à Montréal est la présence des Canadiens en finale de l'Association de l'Est contre les Rangers de New York au printemps 2014. Ils se sont rendus là en bonne partie parce qu'il avait récolté 13 points en 17 matchs des séries éliminatoires de la Coupe Stanley cette année-là.
Mais le fait qu'il s'agit là de son plus beau souvenir, après six saisons passées à Montréal, permet de mieux comprendre à quel point Eller est enchanté de se retrouver au sein d'une équipe des Capitals qui est menée par la superstar Alex Ovechkin.
« Je m'en vais jouer pour une équipe qui aspire à la Coupe Stanley, a-t-il souligné. C'est plaisant de jouer au sein d'une équipe gagnante où il y a une mentalité gagnante ; et ils ont assurément des chances de mettre la main sur la Coupe. C'est là une perspective vraiment excitante. »
Plus important encore pour Eller, toutefois, est le fait qu'il s'amène à Washington pour jouer un rôle de joueur de soutien, et qu'il n'aura plus le statut de joueur qui a été échangé en retour d'un favori des partisans. À cet égard, on peut dire que sa carrière avec les Capitals commence déjà sur une note bien plus prometteuse qu'à Montréal.