Crosby_Cups

HALIFAX, Nouvelle-Écosse -Il était « Sid le Kid ». Maintenant, il est « Sidney l'adulte d'âge mûr ».
« Pas sûr que ça sonne aussi bien », a lancé le capitaine des Penguins de Pittsburgh Sidney Crosby en riant.

Le surnom a certes besoin d'être peaufiné, mais le fait qu'il célébrait son 30e anniversaire de naissance, lundi, signifie que Crosby, un triple champion de la Coupe Stanley, doit s'habituer à l'idée qu'il entreprend ce qu'on considère habituellement comme la dernière ligne droite dans une carrière de la LNH.
La trentaine, ce sont les années où il est censé devenir plus difficile de gagner et plus difficile de rester au sommet, surtout dans une ligue qui rajeunit avec l'avènement de joueurs vedettes tels que Connor McDavid, Jack Eichel et Auston Matthews, qui ont à peine 20 ans - ou, comme dans le cas de Matthews, n'atteindront le cap de la vingtaine que dans six semaines.
Pour mettre les choses en perspective, signalons notamment que ni Wayne Gretzky ni Gordie Howe n'ont décroché la Coupe Stanley après avoir atteint la trentaine. Ils l'ont chacun remportée quatre fois dans la vingtaine. Mario Lemieux et Bobby Orr n'ont pas réussi le coup après 30 ans eux non plus, bien que leur carrière ait été écourtée par les blessures, comme ç'a failli être le cas de Crosby il y a six ans.
Crosby, en raflant la Coupe Stanley pour la troisième fois et le trophée Conn Smythe pour la deuxième fois le printemps dernier, a mérité le droit de faire partie des discussions quand vient le temps de déterminer qui sont les cinq meilleurs joueurs de tous les temps. Mais il sait aussi quel a été le palmarès des joueurs par le passé une fois qu'ils ont atteint la trentaine. Sa réaction : l'indifférence.
« C'est un chiffre, a dit Crosby. C'est juste un chiffre à mes yeux. »
Ce n'est pas surprenant que Crosby fasse si peu de cas de l'impact que peut avoir son âge sur sa carrière. Pourquoi en serait-il autrement compte tenu de ce qu'il a accompli ces dernières années ?
Ce serait futile de tenter de minimiser l'ampleur des exploits que Crosby a accomplis au cours des 26 derniers mois et plus.
Alors qu'il participait à la 122e présentation du Défilé du Jour de la fondation de Halifax-Dartmouth dans le rôle de grand maréchal, lundi, il a tenu la Coupe Stanley pendant que, derrière lui, suivait un char allégorique où on retrouvait les trophées Conn Smythe, Maurice Richard et Prince de Galles, ainsi que le trophée de championnat de la Coupe du monde de hockey 2016. Crosby les a tous remportés au cours de la dernière saison.
Il a par ailleurs mis la main sur la Coupe Stanley et le trophée Conn Smythe en 2016 après avoir raflé la médaille d'or au Championnat du monde 2015 de la FIHG, ce qui lui a permis de se faire une place au sein du club « Triple or » de la FIHG, dont font partie les athlètes qui ont décroché la Coupe Stanley, une médaille d'or olympique et une médaille d'or au Championnat du monde.
Tout cela rend la tâche difficile, sinon impossible, à quiconque cherche à remettre en doute le statut de Crosby en tant que meilleur joueur dans la LNH.
« On dirait qu'il va en s'améliorant », a noté l'attaquant de l'Avalanche du Colorado Matt Duchene, qui s'entraîne à l'occasion avec Crosby durant la saison morte. « C'est drôle la manière dont les gens pensent, pas vrai? On dirait qu'ils attendent que les meilleurs commencent à décliner. Les gens voulaient le clouer au pilori au début de la saison 2015-16. On disait qu'il n'allait pas marquer 25 buts et il a fini par connaître une formidable deuxième moitié de saison, par remporter la Coupe et par remporter le Conn Smythe. C'est incroyable à quel point il a ce don, dès la seconde où tu te mets à douter de lui, de te le faire regretter. »
Reste que Crosby devra éventuellement ajuster la façon dont il s'entraîne, probablement plus qu'il l'a fait jusqu'ici, afin de rester au sommet de ses moyens pendant plusieurs années encore. Il devra sans doute chercher à en faire davantage tout en faisant plus de place aux moments de repos. C'est l'équilibre qu'un athlète vieillissant doit veiller à maintenir. Cela peut s'avérer un défi plus difficile à relever pour ceux qui sont habitués d'être au sommet de leur profession.
Toutefois, l'entraîneur adjoint des Penguins Mark Recchi, qui a joué jusqu'à l'âge de 43 ans, estime que la motivation de Crosby est telle, lorsque vient le temps de s'entraîner, qu'il devrait être en mesure de jouer aussi longtemps qu'il le voudra et d'être parmi les meilleurs de la ligue pendant plusieurs années encore.
« Il est au sommet en ce moment et il lui reste un certain nombre d'années au sommet parce qu'il a si bien pris soin de lui et qu'il connaît son corps mieux que jamais », a noté Recchi, qui sera intronisé au Temple de la renommée du hockey en novembre. « Quand tu es plus jeune, tu dois encore apprivoiser bien des choses, mais quand tu es rendu à un certain stade, tu sais ce que tu dois faire au niveau de la condition physique pour avoir du succès. Il sait exactement ce qu'il doit faire et ça lui permettra de rester au sommet pendant un certain nombre d'années, quelque chose comme cinq, six, sept ans. »
Crosby a toujours cherché à repousser ses limites et à maintenir ses réflexes de « Sid le Kid » en s'entraînant l'été avec de plus jeunes joueurs, notamment l'attaquant de 21 ans de l'Avalanche Nathan MacKinnon qui, comme Crosby, est originaire de Cole Harbour en Nouvelle-Écosse et y réside pendant la saison morte.
« Il n'a rien perdu », a souligné le résidant de Cole Harbour Paul Mason, qui a été un des entraîneurs de Crosby dans les rangs juvéniles et demeure un de ses proches. « Il ne pense pas au résultat. Il pense aux façons dont il peut s'assurer de faire ce qu'il peut faire pour être le meilleur joueur possible pour son équipe. »
Le fait qu'il joue à Pittsburgh avec de plus jeunes joueurs tels que Jake Guentzel (22 ans), Olli Maatta (22), Conor Sheary (25) et Bryan Rust (25) aide aussi. Crosby estime que cela lui permet de voir quelle est la mentalité et l'approche des plus jeunes. C'est là quelque chose qui peut être très utile pour tout vétéran.
« Ils ont beaucoup de confiance quand ils arrivent et ils estiment qu'ils ont leur place dès le départ, et avec raison parce que plusieurs d'entre eux ont montré qu'ils peuvent avoir un impact dans l'immédiat, a fait remarquer Crosby. C'est bon parce que ça me pousse et ça m'aide à comprendre qu'il y a toujours d'autres joueurs qui s'amènent et qui font en sorte que le hockey continue d'être de plus en plus rapide. J'aime ça. »
Selon Recchi, c'est important aux yeux de Crosby que les Penguins aient remporté des titres récemment parce que c'est la preuve que ce qu'il fait fonctionne et qu'il n'est pas nécessaire d'apporter des changements.
« Il sait exactement comment il doit jouer, a affirmé Recchi. J'espère qu'on commencera à reconnaître à quel point son jeu est excellent dans les deux sens de la patinoire maintenant. On ne lui donne pas assez de mérite à cet égard. J'aimerais qu'on commence à le faire. Mais il sait exactement comment il doit jouer. »
Quant à la volonté de gagner qu'a Crosby, rien n'a changé. S'il y a quelque chose, c'est que Crosby semble plus motivé que jamais à tout rafler encore une fois parce qu'il sait que c'est la seule façon de prouver que l'impact qu'il peut avoir dans la trentaine sera à la hauteur de l'héritage qu'il a laissé dans la vingtaine.
« Tu as droit à une certaine fenêtre pour faire ça, a noté Crosby. Ce n'est pas quelque chose que tu tiens pour acquis. Il y a une fenêtre d'opportunité et j'essaie de profiter au maximum de cette fenêtre. »
La fenêtre de Crosby est encore grande ouverte. Il y aurait lieu de lui donner un nouveau surnom, par contre.
« Détenteur de trois titres de suite », par exemple ?
« C'est avec cette idée en tête que nous allons entreprendre le camp d'entraînement, a-t-il affirmé. Ce sera tout un défi, mais pourquoi pas ? »