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Assis dans le bureau des entraîneurs de l'équipe adverse au Centre Georges-Vézina de Chicoutimi à quelques heures d'un match face aux Saguenéens, Benoit Groulx décide de confier les rênes de ses Olympiques à ses adjoints.
Il ne se juge plus en mesure de prendre les bonnes décisions pour le bien de la formation gatinoise qu'il dirige pourtant depuis plus de 10 ans.
« Ma tête était ailleurs, s'est souvenu Groulx en entrevue avec LNH.com. J'étais complètement absorbé par le défi qui se présentait devant moi. »
C'était le 5 décembre 2014. Quelques jours plus tard, le camp de sélection d'Équipe Canada junior allait s'ouvrir, la dernière étape avant le début du Championnat mondial junior présenté à Montréal et à Toronto.

L'aboutissement d'un long processus qui avait commencé tout de suite après la décevante quatrième place dont avait dû se contenter l'équipe en Suède au mois de janvier précédent. Adjoint de Brent Sutter cette année-là, Groulx avait identifié certains éléments qu'il souhaitait modifier à son arrivée derrière le banc.
La formation canadienne n'avait récolté que deux médailles d'argent et une médaille de bronze au cours des cinq années qui avaient suivi la séquence de cinq conquêtes consécutives de l'or entre 2005 et 2009.
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Il fallait trouver une manière de remédier au problème et de renouer avec la tradition d'excellence du programme.
« Je trouvais que la génération de joueurs qui arrivaient à Hockey Canada avait beaucoup changé et qu'ils se fiaient beaucoup à ce qu'ils avaient accompli au niveau junior, a-t-il relaté. Au lieu d'arriver là avec un sentiment de devoir prouver qu'ils sont parmi les meilleurs au monde, ils arrivaient avec le sentiment du devoir accompli. »
C'est ainsi qu'avant même le camp estival, Groulx a pris la route pour aller rencontrer certains des joueurs qui allaient jouer un rôle prédominant au sein de la formation, dont Connor McDavid et l'éventuel capitaine Curtis Lazar, afin de leur expliquer de long en large le plan qu'il souhaitait mettre en place.
Ce plan gravitait autour d'un seul et même concept : les joueurs qui allaient représenter l'unifolié lors du prestigieux tournoi allaient être des « joueurs de classe mondiale » (world-class players), un terme qui revenait sur les lèvres de Groulx à chaque point de presse.
Chacun des 30 invités au camp de sélection avait reçu une liste de choses à respecter pour être considéré comme un « joueur de classe mondiale » et pour éventuellement aider l'équipe à atteindre la médaille d'or.
« Nous avons rapidement créé une connexion et elle a toujours été présente avec nos joueurs, a avancé celui qui dirige maintenant le club-école du Lightning de Tampa Bay dans la Ligue américaine. Nos joueurs se sentaient confortables, ils connaissaient le plan. Nous avons eu la chance de diriger un groupe de joueurs exceptionnel. En tant qu'entraîneur, tu t'en aperçois quand tu donnes des consignes et qu'elles sont appliquées immédiatement. »
Aucun doute

McDavid-Domi-Canada

Outre McDavid et Lazar, Groulx comptait sur une attaque dévastatrice animée par les Nic Petan, Sam Reinhart, Max Domi et Anthony Duclair. Avec tout ce talent offensif et la fiabilité de la brigade défensive jamais le doute n'a traversé l'esprit de l'équipe canadienne.
Même pas lorsque la Russie a marqué trois buts rapides en un peu plus de trois minutes pour réduire l'écart à 5-4 en fin de deuxième période lors du match pour la médaille d'or.
« Nous étions prêts. Tout s'est bien passé et nous avons été sereins tout au long du tournoi, a analysé Groulx. Nos meilleurs joueurs ont été nos meilleurs. Nous n'avons jamais douté. Je pense que nous avons bâti cette confiance-là au fil des semaines et c'est cette confiance qui nous a habités en finale.
« Je me souviens que même à 5-4 après deux périodes, nos joueurs savaient que nous devions fermer la porte en troisième et que nous étions capables de le faire. »
C'est ce qu'ils ont fait, non sans peine. Les Russes ont dominé 11-4 au chapitre des tirs au but au dernier tiers, mais ce sont les Canadiens qui ont pu célébrer au son de la cloche devant 19 000 amateurs en liesse au Air Canada Centre de Toronto.
Sur la ligne bleue durant l'hymne national canadien, Groulx revoyait dans sa tête tout le travail accompli en coulisses dans les mois précédents pour en arriver à ce parcours sans fautes.
Il balayait en même temps les gradins du regard pour repérer son fils Benoit-Olivier - un espoir de premier plan en vue du prochain repêchage de la LNH - et partager ce moment spécial avec lui. Quand il a soulevé le trophée, il n'a pas manqué de le pointer du doigt, un souvenir qui restera gravé à jamais dans la mémoire du fils et du paternel.
« Ç'a été un moment très émotif, a raconté Groulx. Quand j'ai levé le trophée, j'ai ressenti beaucoup de fierté et d'émotions en voyant mon fils dans les estrades. Ç'a été un beau moment pour nous deux et j'espère qu'un jour, nous aurons l'occasion d'inverser les rôles. »