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Les Oilers d'Edmonton misent tout sur Connor McDavid. On l'a compris cet été, lorsque le directeur général Peter Chiarelli a décidé d'échanger l'attaquant Taylor Hall, ancien sauveur désigné du club, aux Devils du New Jersey pour le défenseur Adam Larsson. Après une saison écourtée par une clavicule brisée, McDavid a définitivement pris le contrôle à Edmonton et les résultats sont impressionnants.

Depuis trois ans, les meilleurs avantages numériques de la LNH (Sharks de San Jose, Capitals de Washington) tentent environ 100 tirs par heure jouée à 5 contre 4, un score obtenu par les Oilers sans McDavid (sa présence pousse le club à 103 tirs tentés à l'heure!). C'est sur ce plan, et c'est pour moi une surprise, que les Oilers ressentent le moins l'impact du surdoué.
À forces égales, il n'y a tout simplement pas de doutes. Les Oilers obtiennent 48 pour cent des tirs lorsque McDavid n'y est pas, 51 pour cent lorsqu'il y est. On parle ici, je me permets de le souligner, d'un jeune homme de 19 ans ayant joué 55 matchs en carrière. Plus saisissant encore est le taux de réussite de son équipe lorsqu'il est sur la glace. Les Oilers ont depuis le début de la saison dernière converti, selon le site Corsica.hockey, 6 pour cent de leurs tirs en buts lorsque McDavid n'est pas sur la glace et 9,9 pour cent de ces tirs lorsqu'il y est.

Il n'est jamais évident de savoir si un joueur a vraiment un impact sur ce genre de taux. On connaît bien quelques exceptions, comme les jumeaux Sedin, ou encore le tandem Ryan Getzlaf /Corey Perry à Anaheim, mais c'est vraiment rare. Le résultat de ce basculement est que, selon la formule de buts attendus basée sur la qualité des tirs de ce site, les Oilers étaient en droit de s'attendre à obtenir 47 pour cent des buts en l'absence de McDavid, et 56 pour cent en sa présence. Au-delà du détail de chaque calcul, la confluence de ces différents indicateurs montre combien, même si on fait abstraction des points obtenus, McDavid est déjà un atout exceptionnel pour sa formation.
Et parce qu'on serait fou de se priver de la contribution de pareil joueur, on le fait même jouer en désavantage numérique. Encore là, les résultats sont à l'avenant. McDavid n'a joué que 10 des 50 minutes de son équipe en cette situation, il faudra donc voir comment tout ça évolue, mais d'emblée, ça regarde plutôt bien. Les Oilers accordent 120 tirs tentés à l'heure sans McDavid et 70 en sa présence! On passe donc d'une performance des pires de la LNH à l'une des meilleures de la ligue!
Mais McDavid n'est pas seul. Cam Talbot a aussi eu son gros mot à dire!
Depuis le début de la saison, Talbot (encore selon corsica.hockey) affiche une prime de 1,8 pour cent sur son taux d'arrêts. C'est-à-dire que, sur 1000 tirs tentés, il accorde 18 buts de moins qu'un gardien moyen de la LNH. C'est énorme! Sachant qu'un gardien peut affronter le double, parfois plus, de ces tirs pendant une saison, on comprend que même si Talbot baisse de régime, il a déjà beaucoup donné!
On ne doit pas se surprendre des performances de Talbot. Au cours des trois dernières saisons, il a été supérieur à la moyenne des ours (en 5000 minutes, environ 80 buts d'économiser sur 1000 tirs).
Mais le cas de Talbot est intéressant pour une autre raison. Normalement, il est pertinent pour une équipe d'investir dans la position de gardien de but lorsqu'on considère que l'on est rendu au stade où le gros de l'équipe est, sinon à maturité, à tout le moins rendue au stade où les victoires doivent commencer à s'empiler.
Un gardien supérieur à la moyenne fait une grande différence pendant la saison régulière, parce qu'il permet de prendre l'avantage sur des formations moins talentueuses ou encore appuyées par un gardien déficient. Mais en séries éliminatoires, cet avantage s'évanouit; à partir de la deuxième ronde, on est pour ainsi dire assurés de se colleter à un cerbère de grande qualité, et c'est alors la capacité à prendre sur l'adversaire l'avantage aux tirs qui devient déterminante.

Le point à retenir est le suivant : une équipe en reconstruction appuyée par un bon gardien va choisir plus loin au prochain repêchage. C'est aussi bête que ça. Peut-on affirmer que les Oilers étaient, à l'été 2015, dans une situation justifiant d'investir des ressources dans l'acquisition d'un gardien de son calibre?
La question me fascine. On venait de terminer 29e, puis de gagner la loterie McDavid. Bourrés d'espoirs à l'attaque, mais sans véritable défensive, on a décidé d'y aller immédiatement. Le plan a échoué de manière spectaculaire l'an dernier, mais la blessure à McDavid a joué pour beaucoup. Et, surtout, il est facile de prêcher à rebours la patience et de reprocher au DG Chiarelli d'avoir brûlé des cartouches sur ce coup. Mais après 10 ans de futilité absolue, les Oilers ont besoin de progresser, coûte que coûte. C'est pourquoi on a dégainé lorsque Talbot est apparu sur le marché, c'est aussi pourquoi on a échangé Hall pour Larsson. On a payé le gros prix pour des joueurs qu'on considérait comme essentiel à la consolidation définitive de l'alignement, et au diable la patience d'attendre que tous ces jeunes prennent du galon.
Après tout, on le voit dans le cas de McDavid, il est présentement une aubaine extraordinaire. Ce statut va changer drastiquement, n'en doutez pas un instant, dès le début de la saison 2018-19. On a donc deux ans pour profiter de la manne, après quoi il faudra remanier tout le club pour aménager une place au prodige. En attendant, Talbot donne un appui essentiel à l'atteinte de la terre promise des Oilers, les séries éliminatoires de la Coupe Stanley.