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C'est arrivé un peu à l'improviste : le Wild du Minnesota et Mikko Koivu ont paraphé un nouveau contrat cette semaine, deux saisons supplémentaires à raison de 5,5 millions $ par année. La surprise était double, tant pour le montant engagé que par le fait que Koivu a encore une année complète à écouler sur son présent contrat.
Capitaine du Wild depuis la saison 2008-09 et âgé de 34 ans, il était pourtant peu probable que Koivu s'en aille sous d'autres cieux, pour peu, bien sûr, que le Wild veuille encore de ses services. Mais, un peu comme Tomas Plekanec à Montréal, il y a de ces vétérans que les organisations aiment bien et souhaitent garder heureux en leur évitant le stress des saisons menant au statut de joueur autonome sans compensation.

Pour les joueurs ayant passé le cap de la trentaine, le marché est, en effet, de moins en moins intéressant et c'est pourquoi Koivu n'a pas dû hésiter longtemps avant d'accepter cette entente, qui lui assure un salaire confortable jusqu'à l'âge de 37 ans.
Il faut le dire, le Wild est une équipe qui tente un jeu d'équilibriste particulièrement périlleux par les temps qui courent : on cherche manifestement à rebâtir en demeurant compétitifs, l'idée étant d'éviter les écrasements sordides auxquels on assiste ces jours-ci à Detroit et Vancouver. On doit donc comprendre la signature de Koivu dans ce contexte.
Il y a, en gros, toute une série de joueurs dans cette équipe qui peuvent prétendre au statut de joueur de premier plan, mais qui sont à des stades divers de leur carrière. À une extrémité du spectre, Koivu, justement. Tout juste derrière lui, on retrouve Zach Parise, Ryan Suter (signés de concert pour une éternité) et Eric Staal (obtenu pour une bouchée de pain l'an dernier). Ce sont les vétérans aguerris, encore efficaces, mais dont on redoute un déclin aussi imprévisible que brutal.
Staal, Koivu et Suter roulent encore à plein régime, mais Parise, teigne éprise des batailles de tranchée, ressemble de plus en plus à un joueur en déclin accéléré : 62, 53, 42 points à ses trois dernières campagnes et un taux de tirs par match qui décline désormais rapidement, de 3,5 à 2,8 tirs en trois ans. Avec encore huit années à écouler à son impossible contrat, c'est un boulet qu'on va bientôt accrocher aux mollets de l'équipe.
Vient ensuite la deuxième génération de joueurs, ceux qui ont fait leurs preuves et demandent désormais des salaires plus conséquents. Il n'y a pas de véritable étoile dans ce groupe, mais Mikael Granlund, Nino Niederreiter, Charlie Coyle et Jared Spurgeon sont des joueurs de premier plan, capables de se tirer d'affaire dans toutes les situations. Jason Zucker, Marcus Foligno, Jonas Brodin et Tyler Ennis complètent ce groupe de joueurs qui incarnent aujourd'hui la plus grande force de l'édition actuelle du Wild, sa profondeur.
Enfin la relève. Matt Dumba fait tranquillement ses classes depuis trois ans et on attend de lui qu'il prenne plus de place dès la présente saison. Luke Kunin, choix de première ronde en 2016, pointe aussi à l'horizon, mais c'est surtout Joel Eriksson-Ek qui s'annonce comme le joueur de premier plan de la prochaine génération : 16 points (dont 10 buts) en 13 matchs de championnats internationaux et 7 points en 15 matchs dans la LNH. Même s'il n'avait que 19 ans l'an dernier, on a choisi de lui faire jouer plus de neuf matchs dans le grand circuit, brûlant ainsi une première année de son contrat de recrue. Dans son cas, donc, l'horloge tourne. Dans trois ou quatre ans, s'il remplit les espoirs qu'on fonde en lui, il va coûter cher. Ce sont désormais les jeunes attaquants de son statut qui font sauter la banque l'été venu.
Revenons-en à Koivu. On l'a vu à Montréal avec Plekanec, il y a prise de risque. Mais Koivu a joué, depuis trois ans, un rôle trop important pour qu'on risque de s'en passer. Sur le plan offensif, premièrement, il continue à produire à un rythme honorable à forces égales, environ 35 points par tranche de 82 matchs depuis trois ans. Ajoutez à cela une vingtaine de points en avantage numérique et on parle d'une production franchement honorable.
Ce qui distingue vraiment le capitaine du Wild, c'est sa capacité à accomplir ce boulot en jouant un rôle défensif de premier plan. Au cours des deux dernières saisons jouées sous les ordres de Mike Yeo, Koivu a certes obtenu sa large part de mises en jeu en zone offensive (
55 et 57 pour cent
), mais il a livré la marchandise. Au cours de cette période, le Wild accorde 55 tirs par heure jouée à 5-contre-5, pile sur la moyenne de la ligue. Lorsque Koivu est sur la glace, l'adversaire n'obtient plus que 47 tirs à l'heure, 42 seulement lorsque Koivu est jumelé à Suter en défensive. Sans Koivu, l'équipe, avec ou sans Suter, passe à 57 tirs accordés à l'heure.
L'arrivée de Bruce Boudreau à la barre du club change la donne. Koivu est désormais enterré en territoire défensif, ou il dispute 64 pour cent de ses mises en jeu. Aussi, son temps de jeu partagé avec Suter passe de 60 à 48 pour cent. Il accorde désormais 56 tirs à l'adversaire par heure jouée, le même total que le reste de son équipe. Mais son équipe produit autant de tirs en sa présence qu'en son absence. Sachant qu'il joue un rôle défensif encore plus extrême, sa contribution se comprend désormais ainsi : le Wild n'a plus vraiment de minutes « molles » à offrir à ses adversaires, qui doivent tour à tour soit se débrouiller contre les talents offensifs du club placés dans des situations qui sont à leur avantage, soit tenter de traverser Koivu lorsque la situation désavantage le Wild.
C'est ce rôle de protecteur, ajouté à sa réelle contribution offensive, qui justifie qu'on ait décidé de prendre dès maintenant le risque d'offrir un contrat à Koivu. Tout comme avec Dumba par le passé, qu'on a graduellement initié aux tâches plus difficiles en le tenant loin de l'immense présence défensive de Suter, on se donne ainsi le temps de polir le jeu d'Eriksson-Ek dans l'ombre défensive de Koivu.