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La LNH a pris un peu tout le monde par surprise en début de saison en annonçant un resserrement des règles entourant la tenue des mises en jeu. On assiste donc, depuis le début des camps et encore au quart de la saison, à une kyrielle de situations où les juges de lignes argumentent avec les joueurs puis les expulsent.
Mais l'œil humain est ainsi fait qu'il imprime dans nos mémoires les événements remarquables, quitte à nous donner une image déformée des tendances générales qui sont à l'œuvre.

J'ai identifié, à partir des journaux des événements de la LNH, les mises en jeu disputées à forces égales en 2016-17 et 2017-18. Puis, j'ai classé tous les joueurs ayant disputé au moins 10 mises en jeu en 2017-18 en ordre décroissant du nombre de duels réalisés.
Pour voir si ces joueurs étaient expulsés plus souvent à cause des règlements plus stricts, j'ai fait la différence entre la part des mises en jeu disputées lors des deux saisons.
Pour adoucir la courbe du graphique suivant, j'ai utilisé la médiane sur 20 matchs au fil du classement des joueurs. On évite ainsi de déformer inutilement la courbe pour des cas d'exception comme Brayden Schenn ou Dylan Larkin.
Le graphique nous montre que les joueurs les plus actifs aux mises en jeu ont presque tous vu leur part de mises disputées baisser, signe selon moi que ces expulsions ne sont pas qu'anecdotiques. Je pense que cette impression se confirme par le fait que les joueurs qui disputent moins de mises en jeu sont quant à eux plus sollicités.

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On voit au milieu de ce graphique un groupe d'une vingtaine de joueurs qui subissent des variations importantes. On y reviendra plus tard.
Le résultat de ces changements fait qu'un nombre important de joueurs n'ont pas disputé beaucoup de mises en jeu. Pour mieux comprendre ce qui arrive aux joueurs de centre, j'ai resserré l'échantillon autour des joueurs ayant disputé au moins 50 mises en jeu, l'idée étant de s'attarder à ceux qui sont appelés à prendre ces duels un peu plus régulièrement.
Si le comportement des joueurs semble avoir changé à cause du règlement, l'impact se fait aussi sentir en fonction de la zone dans laquelle on dispute une mise en jeu.
En zone neutre et en zone défensive, les taux de réussite ont augmenté, alors qu'en zone offensive, ces mêmes taux ont diminué.

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Cette tendance suit la totalité de l'échantillon des joueurs, ce qui laisse entendre qu'il y a possiblement un changement dans la manière qu'ont les joueurs d'évaluer le risque. Est-ce l'aversion de la ligue pour les pénalités en zone offensive qui se pointe ici le bout du nez? Difficile à dire avec des données d'une saison partielle. Mais il se passe clairement quelque chose.
Ceci étant dit, il n'y a pas que les nouveaux règlements. De toute évidence, une part non négligeable de ces variations est attribuable au simple mouvement normal des assignations. Le groupe de joueurs évoqués plus haut l'illustre bien.

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Parmi ces joueurs, on retrouve Sean Couturier et Claude Giroux. Désormais réunis sur un même trio, Giroux ayant migré à l'aile gauche, on se partage les mises en jeu, ce qui fait que les deux centres ont perdu beaucoup d'opportunités. Même chose pour Steven Stamkos, ou encore Kyle Brodziak. Inversement, on voit des joueurs passer à une nouvelle position, Sean Kuraly le premier.
Les données sur la saison complète vont nous permettre d'avoir une idée plus claire de ce qui est en train d'arriver. Chose certaine, avec les pénalités pour coups de bâton et ces mesures sur les mises en jeu, on vient d'altérer subtilement la mécanique du jeu dans la LNH.