Karl Alzner

MONTRÉAL - Si vous n'êtes pas trop certains de savoir ce qu'offrira Karl Alzner aux Canadiens, vous ne devriez pas manquer d'occasions pour le découvrir.

Avec autant de nouveaux éléments et de points d'interrogation au sein de la brigade défensive du Tricolore cette saison, l'arrivée d'Alzner à Montréal viendra assurément stabiliser quelque peu les choses. Son différentiel de plus-61 en une moyenne d'un plus de 20 minutes d'utilisation par match depuis son arrivée à temps plein dans la Ligue nationale en 2010-2011 le démontre bien.
C'est justement le 8 octobre 2010 que le défenseur originaire de Burnaby, en Colombie-Britannique, a disputé le premier de 540 matchs consécutifs en saison régulière dans la grande ligue, avec les Capitals de Washington. Pour quelqu'un qui avait effectué 13 allers-retours entre la LNH et la Ligue américaine à ses débuts professionnels en 2008-2009, le principal intéressé admet qu'il essaie de ne pas trop y penser, malgré le fait qu'on le lui rappelle constamment.
«Quand j'y pense, c'est plutôt cool. Ce n'est pas facile à faire. Je suis loin de reculer devant les choses qui font mal sur la glace. Le crédit revient à la préparation physique et à l'entraînement, mais il y a également de la chance. C'est ce qui est le plus important. J'ai été très chanceux et c'est une belle reconnaissance. Mais selon moi, chaque match joué n'en est qu'un autre», indique le choix de premier tour, cinquième au total, des Capitals en 2007.

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À Washington, Alzner évoluait au sein d'une formation principalement axée sur l'offensive. Lorsque des francs-tireurs comme Alex Ovechkin, Evgeny Kuznetsov, Nicklas Backstrom et T.J. Oshie s'aventuraient profondément en zone adverse, ils pouvaient le faire la tête tranquille, sachant qu'il était là pour freiner les contre-attaques adverses.
En avril dernier, après avoir joué blessé à plus d'une reprise, Alzner a été forcé de regarder ses coéquipiers jouer du haut de la passerelle de presse pour la première fois de sa carrière, après avoir bloqué un tir avec sa main droite. Ce n'était pas la première fois qu'il sacrifiait son corps pour le bien de son équipe, sauf que jamais auparavant on ne lui avait refusé d'enfiler son équipement et de chausser ses patins.
«C'était super bizarre. Je n'ai vraiment pas aimé ça. Personne n'aime regarder un match, tu n'as aucun contrôle. Se blesser en saison régulière est une chose, mais subir une blessure au moment de l'année où c'est le plus important est tout simplement brutal», témoigne Alzner, qui a été forcé d'être un spectateur le 17 avril dernier, en raison d'une fracture à la main subie lors du match no 2 de la série Capitals-Maple Leafs.
«Le bon côté dans tout ça est que ma séquence en saison régulière est toujours intacte. Mais au bout du compte, la seule chose qui importe est de jouer et de gagner des matchs en séries.»
Au printemps 2016, il avait décidé de jouer malgré une blessure à l'aine durant quelques parties, mais au printemps dernier, il n'a même pas pu le faire puisqu'on ne lui a pas donné le choix. Les médecins des Capitals ont décidé que sa main était beaucoup trop mal en point pour survivre aux rigueurs des séries de la LNH.
«Lorsque les docteurs m'ont dit que je ne pouvais pas jouer, c'était frustrant parce que je savais que j'aurais pu jouer. J'aurais mis un peu plus de ruban sur le bout de mon bâton. Tu peux faire tellement de choses, comme geler ta main et pour ne pas ressentir la douleur. La seule chose qui peut te préoccuper est que la blessure s'aggrave», raconte Alzner, qui a été contraint à l'inactivité durant six parties il y a quelques mois, avant de revenir au jeu au deuxième tour lors du match no 3 face aux Penguins.

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En plus de sa fracture à la main et de sa blessure à l'aine, Alzner a toujours continué d'avancer au cours de sa carrière, malgré notamment un pouce cassé, un muscle fléchisseur de la hanche amoché et une sérieuse élongation d'un muscle oblique de l'abdomen. Toutefois, s'il y a une chose qui l'a presque mis K.-O. à quelques occasions, ce sont les maladies. Comme ç'a été le cas avec l'ancien attaquant des Canadiens Mark Recchi, qui a dû mettre fin à une séquence de matchs à 570 en raison d'une pneumonie, en décembre 1998.
Jamais affligé d'un virus aussi percutant que celui du membre du Temple de la renommée, le nouveau numéro 22 du Tricolore a quand même déjà vécu une situation en particulier où il n'aurait jamais pensé être capable de quitter son lit.
«Une fois, on est allés jouer un match à Chicago et je suis tombé malade au milieu de la nuit, vers deux heures du matin, alors qu'on jouait à 11h30 le lendemain matin. Je n'ai pas eu le temps de récupérer, mais j'ai repris le collier tout de suite. À l'époque, on était les deux meilleures équipes de la Ligue et je me disais que je ne pouvais pas rater ce match en raison de son importance. C'est dans des moments comme celui-là que tu dois prendre des décisions», indique Alzner, qui a effectué 22 présences et été utilisé pendant 18 min 13 s malgré son piteux état, le 28 février 2016.
«Je ne mène pas en marquant des buts ou en faisant d'autres choses du genre, je tente de le faire par l'exemple et avec du cœur. Ce sont les choses que je peux contrôler.»
Lorsqu'il disputera son premier match avec les Canadiens jeudi soir face aux Sabres, Alzner prendra part à une 541e rencontre d'affilée en saison régulière. Dans toute l'histoire de la Ligue nationale, seuls deux autres défenseurs ont réussi à atteindre cette marque : Jay Bouwmeester (737) et Keith Yandle (633). Deux arrières qui n'ont toutefois jamais été reconnus pour s'impliquer autant physiquement que le nouveau venu à Montréal.
D'ailleurs, les 162 lancers bloqués et les 105 mises en échec d'Alzner en 2016-2017 dépassent largement les totaux de la saison dernière de ses deux prédécesseurs (111 et 67 respectivement pour Bouwmeester, 76 et 28 pour Yandle).

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«C'est pour cette raison que je suis ici. C'est mon travail. Si je ne le fais, qu'est-ce que je vais faire? Je dois faire ces choses et je n'ai pas de problème avec ça. C'est ma force. Il n'y a pas beaucoup de gars qui aiment faire ça, souligne le colosse de 6 pi 3 po et 217 lb en riant. Ils préfèrent s'impliquer un peu plus offensivement. La chose qui me rend le plus fier est lorsque je vois un joueur retourner à son banc, frustré. C'est ce que je fais : j'essaie de protéger mon gardien et de protéger mon équipe, peu importe la manière.»
À l'aube de sa 10e campagne dans le circuit Bettman, Alzner est le premier à admettre qu'il ne veut pas trop penser à sa séquence d'homme de fer. Puisqu'il est une personne assez superstitieuse, éviter d'en parler est ce qu'il préfère. Mais avec des attentes élevées à son endroit en raison du lucratif contrat qu'il a signé au cours de la saison morte, il espère prendre part aux 410 parties en saison régulière, et à plusieurs rencontres éliminatoires, que disputera sa nouvelle équipe d'ici la fin de son entente de cinq saisons.
«Chaque année, je me dis que ça ne continuera pas, mais je trouve une manière d'être chanceux. J'ai souvent dit à ma femme : "Je ne crois pas que je serai en mesure de continuer." Mais lorsque j'arrive à l'aréna et que je me retrouve en compagnie des gars, je trouve une façon de le faire. Il n'y a pas d'autres manières de le dire», conclut Alzner.