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Par Pierre-Antoine Mercier

Match numéro six de la finale de la Conférence de l'Ouest dans la Ligue de l'Ontario (OHL), Nick Suzuki et le Storm de Guelph font face à l'élimination pour une sixième fois lors des séries éliminatoires 2018-2019.

En milieu de deuxième période, Suzuki se démarque et file à un contre un face à un joueur du Spirit de Saginaw. Il remarque alors à ce moment précis que le seul joueur adverse entre lui et le gardien est l'attaquant Owen Tippett.

Combien de joueurs auraient eu le réflexe, dans un moment aussi important, de jeter un coup d'oeil au joueur devant eux pour se rendre compte qu'il ne s'agit bel et bien pas d'un défenseur, mais plutôt d'un attaquant?

Ce fut le cas de Suzuki, et il ne s'agit ici que d'un seul exemple parmi tant d'autres.

Pour bien comprendre son intelligence, on se doit d'analyser certains éléments qui entrent en ligne de compte en ce qui a trait à son Q.I. hockey.

Créativité

Depuis son tout jeune âge, le hockey occupe une grande partie de sa vie. Malgré ses exploits sur la patinoire, les parents de Suzuki ont toujours préconisé l'importance des études.

C'est la raison pour laquelle Suzuki a emprunté un chemin bien différent. Contrairement à plusieurs athlètes professionnels, l'espoir des Canadiens n'a pas effectué ses études dans une école qui était reconnue pour ses programmes de sports. En effet, il a plutôt étudié au London Waldorf School, une école privée qui se spécialise dans les arts.

Suzuki a alors étalé son côté artistique en plus de développer une certaine habileté à être bon dans plusieurs domaines, dont la peinture. Il a également obtenu d'excellents résultats tout au long de son parcours scolaire, à l'exception du fameux cours de calcul.

En résumé, Suzuki est persuadé que ce choix lui aura été grandement bénéfique.

« Je suis convaincu que ça m'a aidé. Sortir des sentiers battus est un excellent moyen pour devenir un meilleur joueur de hockey, simplement en raison du fait que tu vois des choses que les autres ne voient pas », a expliqué l'attaquant de 20 ans. « Je pense que toutes ces formes d'art que j'ai étudiées aident mon cerveau à réfléchir rapidement et avec précision. »

S'il y a bien un joueur qui a appris à découvrir toute la créativité de Suzuki au fil des ans dans la OHL, c'est bien le défenseur Sean Durzi.

Suzuki et Durzi ont amorcé leur carrière ensemble dans la OHL en 2015 avec l'Attack d'Owen Sound avant d'être tous les deux échangés au Storm en janvier dernier. Ils ont d'ailleurs remporté la Coupe J. Ross Robertson, remise aux champions de la OHL, la saison dernière.

Son ancien coéquipier est donc très bien placé pour décrire toute l'étendue de son talent.

« Il peut mettre la rondelle au fond du filet comme personne d'autre ne sait le faire. Si vous regardez les buts qu'il a marqués dans la OHL, vous remarquerez qu'il peut faire scintiller la lumière rouge à partir de n'importe quel endroit sur la patinoire. Je crois qu'il mène la Ligue pour le nombre de buts inscrits à partir de derrière la ligne des buts », a mentionné Durzi, un espoir des Kings de Los Angeles. « C'était vraiment spécial de jouer avec lui durant toutes ces années parce qu'il est capable de tout faire sur la glace. »

Vision

Ce n'est pas un secret de polichinelle, le meilleur atout de Suzuki est sa vision sur la glace. Le choix de premier tour (13e au total) des Golden Knights de Vegas en 2017 a d'ailleurs été élu à titre du joueur le plus intelligent de la OHL la saison dernière selon les entraîneurs du circuit.

Mais bien avant de remporter cet honneur, Suzuki a développé son Q.I. hockey à travers différents sports, tels que le basketball, le volleyball et le soccer. Parlant de soccer, Suzuki a joué à niveau compétitif jusqu'à l'âge de 14 ans.

Le centre originaire de London, en Ontario, croit que ce sport a grandement contribué à améliorer sa vision sur une patinoire.

« Le soccer aide beaucoup. Au soccer, tu dois être en mesure de lire le jeu avant même d'avoir le ballon. Cet aspect du jeu se transpose sur la glace. Je pense que je suis en mesure de voir des lignes de passe que d'autres joueurs ne voient pas », a confié l'attaquant qui a récolté un total de 141 buts et 328 points en 251 matchs dans les rangs de la OHL. « Je crois que c'est en grande partie en raison du soccer, car tu dois t'habituer à distribuer le ballon dans des zones précises du terrain, même si tu es entouré de joueurs adverses. »

Durzi a été témoin de ces passes inimaginables à de nombreuses reprises au courant des dernières saisons. Le choix de deuxième tour (52e au total) en 2018 des Maple Leafs de Toronto reconnaît que Suzuki peut pratiquement tout faire sur une patinoire.

« Je crois que c'est juste sa vision sur la glace et la façon dont il rend les joueurs autour de lui meilleurs. Parfois, il faut un temps d'adaptation pour jouer avec Nick, car il parvient à compléter des jeux auxquels tu ne t'attends pas. C'est quelque chose de vraiment spécial chez lui », a souligné Durzi. « Il peut faire beaucoup de jeux que d'autres joueurs ne sont pas en mesure de faire. Et ce sont tous des jeux qu'il peut réaliser sans même regarder, alors tu dois être toujours alerte lorsqu'il est sur la glace, car il est capable de te repérer et te permettre d'obtenir une occasion de marquer. »

Mais Suzuki ne fait pas seulement que récolter des points. Selon son ancien entraîneur-chef avec le Storm, George Burnett, il est voué à un avenir très prometteur.

« Nick apporte beaucoup plus que des points. Il est très calme. Il parle très rarement, mais quand c'est le cas, tout le monde écoute », a précisé Burnett. « Il comprend le jeu extrêmement bien. Il excelle dans les cercles de mises au jeu, il écoule des punitions en désavantage numérique et il bloque des tirs. C'est un joueur complet avec un bel avenir devant lui. »
Aux dires de Durzi, Suzuki n'excelle pas seulement au hockey.

« Je pense que Nick est un très bon athlète et pas seulement un joueur de hockey. Peu importe le sport qu'il joue, il est toujours l'un des meilleurs. Je crois qu'il est juste un athlète naturel et qu'il est capable de réaliser des jeux, peu importe le sport », a déclaré l'espoir des Kings. « Il était toujours le meilleur passeur lorsque nous jouions au basketball. C'est vraiment spécial d'avoir un esprit comme ça dans tous les sports. Je pense que quand tu es un athlète naturel comme il est, le hockey devient quelque chose de naturel également pour lui. »

Performances historiques

Suzuki a été un rouage fort important dans la conquête du titre de la OHL pour Guelph. Il a terminé son parcours éliminatoire avec une récolte de 16 buts, 26 mentions d'aide et 42 points en seulement 24 matchs, mettant ainsi la main sur le trophée Wayne Gretzky '99' à titre du joueur le plus utile des séries éliminatoires de la OHL. En plus, Suzuki a établi un nouveau sommet dans l'histoire du Storm pour le plus grand nombre de points lors des séries.
 
Depuis les années 2010, seulement cinq joueurs, incluant Suzuki, sont parvenus à atteindre le plateau des 40 points en séries. Disons que l'espoir du Tricolore s'y retrouve en bonne compagnie aux côtés de Connor McDavid (49 points - 2015), Mitch Marner (44 points - 2016), Mark Scheifele (41 points - 2013) et Matthew Tkachuk (40 points - 2016).

Durzi affirme que Suzuki a eu un impact majeur dans la conquête de la Coupe J. Ross Robertson.

« C'était inégalable. Il a vraiment élevé son jeu d'un cran et c'est quelque chose que tu travailles pour vraiment bien faire dans les situations importantes. Tu veux te mettre de la pression dans les entraînements et dans les matchs chaque jour pour te préparer à des moments du genre », a expliqué son bon ami. « Ayant grandi avec Nick dans la OHL, j'ai réalisé qu'il a ce qu'il faut pour ces grands moments. Quand le match est en jeu, il n'y a probablement personne d'autre que j'aimerais mieux avoir sur la glace. »

Les performances de Suzuki lui ont valu beaucoup d'éloges. L'entraîneur-chef des 67's d'Ottawa, André Tourigny, a d'ailleurs comparé l'attaquant de 20 ans au champion de la Coupe Stanley, récipiendaire du trophée Conn Smythe et du trophée Frank J. Selke, Ryan O'Reilly.

Disons qu'il n'a pas à être gêné de cette comparaison.

« C'était très cool à entendre. Il est originaire d'une ville pas très loin de chez moi », a raconté Suzuki. « Il a tellement accompli beaucoup de choses dans sa carrière. Il a toujours été un solide attaquant dans les deux sens de la patinoire. Il a encore plus d'habiletés que je n'aurais pu l'imaginer et réaliser. C'est une très belle comparaison pour moi. »

Suzuki a également remporté son lot de trophées la saison dernière. En plus de mettre la main sur la Coupe J. Ross Robertson et le trophée Wayne Gretzky '99', il a soulevé le trophée William Hanley, remis annuellement au joueur le plus gentilhomme, pour une troisième saison consécutive. Cet exploit représente également un record dans l'histoire de la OHL.
Burnett est très fier de son ancien joueur et reconnaît qu'il s'agit d'une nomination amplement méritée.

« Il est très facile à diriger. Je n'ai jamais eu à critiquer son éthique de travail ou sa préparation. Il veut être utilisé dans toutes les situations. Le fait de remporter le trophée du plus gentilhomme ne veut pas dire qu'il n'est pas compétitif. Il est un fier compétiteur et il travaille très fort », a expliqué l'entraîneur-chef du Storm. « C'est tout un accomplissement de remporter le même trophée durant trois saisons consécutives. Il mérite d'être reconnu à plusieurs niveaux. »
 
Désormais que son stage junior est terminé, que réservera l'avenir pour Nick Suzuki?

« Je m'attends à ce qu'il connaisse beaucoup de succès dans la LNH. On doit donner crédit à son éthique de travail et à son amour pour le jeu. Je crois que ses résultats découlent beaucoup de sa passion. Nick aime ce jeu plus que quiconque. »

« Il étudie et regarde des matchs chaque jour, mais il ne fait pas simplement regarder pour son pur plaisir, il observe toujours pour apprendre quelque chose en particulier. S'il continue de travailler et d'étudier le jeu comme il le fait, je ne m'attends à rien de moins que beaucoup de succès », a conclu Durzi.